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LES CARILLONS.

myriades de figures ? Quand et comment le murmure monotone qui bourdonnait à l’oreille de Trotty endormi ou évanoui devint-il une voix sonore ? « Suivez-le et poursuivez-le, » soupirait tout-à-l’heure cette voix ; « interrompez son sommeil, » criait-elle maintenant. Quand et comment, au lieu d’une sensation lente et confuse, Trotty commença-t-il à percevoir clairement tout ce qui frappait son ouïe et sa vue, à distinguer ce qui était réellement de ce qui n’était pas ? les dates et les moyens d’investigation manquent pour le dire ; mais réveillé et se relevant enfin sur le plancher où il était tombé, Trotty aperçut un spectacle surnaturel.

Il vit la tour, où un charme avait conduit ses pas, fourmiller de fantômes nains, créations fantastiques des cloches ; il les vit incessamment sauter, voler, tomber par milliers des entrailles de l’airain ; il les vit autour de lui sur le plancher, au-dessus de lui dans l’air, descendre et s’éloigner au moyen des cordes, le regarder du haut des solives massives ceintes de fer, le lorgner à travers les fentes et crevasses des murailles, et peu à peu l’entourer de leurs ronds multiples, semblables à ces cercles que déroule au loin sur la surface d’un lac la chute soudaine d’une lourde pierre. Il les vit sous toutes sortes d’aspects et de formes ; il en vit de laids et de beaux, de difformes et de gracieux, de jeunes et de vieux, de bons et de cruels, de gais et de sombres. Il en vit qui dansaient ; il en vit qui chantaient ; il en vit qui