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LES APPARITIONS DE NOËL.

née, et désirant aussi détourner, ne fût-ce qu’un moment, le regard de marbre fixé sur lui.

— Je le vois, répondit le spectre.

— Vous ne le regardez pas, répliqua Scrooge.

— Je le vois cependant, dit le spectre.

— Eh bien, reprit Scrooge, je n’ai qu’à l’avaler pour être persécuté pendant le reste de mes jours par une légion de revenants, tous de ma création. Bêtise, vous dis-je ! bêtise ! »

À ce mot, le spectre poussa un cri effrayant et secoua sa chaîne avec un bruit si lugubre et si terrible, que Scrooge se raidit et se cramponna à sa chaise, de peur de s’évanouir ; mais combien augmenta son horreur, lorsque le spectre, ôtant le bandage de sa tête, comme si c’était une coiffure trop chaude dans une chambre, sa mâchoire eut l’air de se détacher, et retomba sur sa poitrine.

Scrooge s’agenouilla et joignit les mains sur ses yeux.

« Grâce ! dit-il, épouvantable apparition ; pourquoi me persécutez-vous ?

— Homme à l’âme mondaine, répondit le spectre, crois-tu en moi, ou n’y crois-tu pas ?

— J’y crois, il le faut bien. Mais pourquoi les esprits parcourent-ils la terre, et pourquoi viennent-ils à moi ?

— Le ciel veut, répondit le spectre, que l’âme de tout homme se répande parmi ses semblables et dans le