Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/111

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prie, dit M. Creakle on promenant les yeux tout autour de la chambre, si jusqu’à l’instant présent ce fait était jamais parvenu à ma connaissance.

— Je ne crois pas que vous l’ayez su positivement, reprit M. Mell.

— Comment ! vous ne croyez pas, dit M. Creakle. Que voulez-vous dire, malheureux ?

— Je ne suppose pas que vous m’ayez jamais cru dans une brillante position de fortune, repartit notre maître d’études. Vous savez ce qu’est et ce qu’a toujours été ma situation dans celte maison.

— Je crains, dit M. Creakle, et les veines de son front devenaient formidables, que vous n’ayez été en effet ici dans une fausse position et que vous n’ayez pris ma maison pour une école de charité. Monsieur Mell, il ne nous reste plus qu’à nous séparer, et le plus tôt sera le mieux.

— En ce cas, ce sera tout de suite, dit M. Mell en se levant.

— Monsieur ! dit M. Creakle.

— Je vous dis adieu, monsieur Creakle, et à vous tous, messieurs, dit M. Mell en promenant ses regards tout autour de la chambre, et en me caressant de nouveau doucement l’épaule. James Steerforth, tout ce que je peux vous souhaiter de mieux, c’est qu’un jour vous veniez à vous repentir de ce que vous avez fait aujourd’hui. Pour le moment, je serais désolé de vous avoir pour ami ou de vous voir l’ami de quelqu’un auquel je m’intéresserais. »

Il me passa doucement la main sur le bras, prit dans son pupitre quelques livres et sa flûte, remit la clef au pupitre pour l’usage de son successeur, puis sortit de la chambre avec ce léger bagage sous le bras. M. Creakle fit alors une allocution par l’intermédiaire de Tungby ; il remercia Steerforth d’avoir défendu (quoiqu’un peu trop chaleureusement peut-être) l’indépendance et la bonne renommée de Salem-House puis il finit en lui donnant une poignée de main pendant que nous poussions trois hurras, je ne savais pas trop pourquoi, mais je supposai que c’était en l’honneur de Steerforth, et je m’y joignis de toute mon âme, bien que j’eusse le cœur très-gros. M. Creakle donna des coups do canne à Tommy Traddles, parce qu’il le surprit à pleurer, au lieu d’applaudir au départ de M. Mell ; puis il alla retrouver son canapé, son lit ou n’importe quoi.