Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/274

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des choses que je pourrais vous enseigner, si vous aviez envie de les apprendre.

— Oh ! je n’en doute pas, monsieur Copperfield, répondit-il, pas le moins du monde. Mais comme vous n’êtes pas vous-même dans une humble situation, vous ne pouvez peut-être pas bien juger de ceux qui y sont. Je n’ai pas envie d’insulter par mon instruction à ceux qui sont plus haut placés que moi ; je suis beaucoup trop humble pour cela… Mais voilà mon humble demeure, monsieur Copperfield ! »

Nous entrâmes tout droit dans une chambre basse décorée à la vieille mode, et nous y trouvâmes mistress Heep, le vrai portrait d’Uriah, si ce n’est qu’elle était plus petite. Elle me reçut avec la plus grande humilité et me demanda pardon d’avoir embrassé son fils : « Mais, voyez-vous, monsieur, dit-elle, quelque pauvres que nous soyons, nous avons l’un pour l’autre une affection naturelle qui ne fait tort à personne, j’espère. » La chambre n’était pat tout à fait un petit salon, pas tout à fait une cuisine, mais elle avait l’air parfaitement décent ; seulement on sentait qu’il y manquait quelque chose pour la rendre agréable. Il y avait une commode avec un pupitre placé dessus ; Uriah lisait ou écrivait là le soir. Il y avait le sac bleu d’Uriah tout rempli de papiers. Il y avait une série de livres appartenant à Uriah, en tête desquels je reconnus M. Tidd. Il y avait un buffet dans un coin de la chambre, avec les meubles indispensables. Je ne me souviens pas que les objets pris individuellement eussent l’aspect misérable ni qu’ils sentissent la gêne et l’économie, mais je sais que la pièce tout entière laissait cette impression.

Le deuil perpétuel de veuve de mistress Heep faisait sans doute partie de son humilité. Malgré le temps qui s’était écoulé depuis la mort de M. Heep, elle portait toujours son deuil de veuve. Je crois bien qu’il y avait quelque modification dans le bonnet, mais, quant au reste, le deuil était aussi austère qu’au premier jour de son veuvage.

« C’est un jour mémorable pour nous, mon cher Uriah, dit mistress Heep en faisant le thé, que celui où M. Copperfield nous fait une visite. Si j’avais pu désirer que votre père restât ici-bas plus longtemps, je l’aurais souhaité pour qu’il pût recevoir avec nous M. Copperfield cette après-midi.

— J’étais sûr que vous ne manqueriez pas de dire cela, ma mère. »

J’étais un peu embarrassé de ces compliments, mais au