Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/365

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— Non, dit la petite Émilie en sanglotant et en secouant la tête. Je ne suis pas aussi bonne fille que je le devrais, à beaucoup près, à beaucoup près !

Et elle pleurait toujours comme si son cœur allait se briser.

« Je mets trop souvent votre affection à l’épreuve, je le sais bien, continua-t-elle. Je suis maussade et capricieuse avec vous, quand je devrais être tout le contraire. Ce n’est pas vous qui seriez comme cela avec moi ! Pourquoi donc suis-je ainsi avec vous, quand je ne devrais penser qu’à vous montrer ma reconnaissance et à tâcher de vous rendre heureux !

— Vous me rendez toujours heureux, dit Ham. Je suis heureux quand je vous vois, ma chère. Je suis heureux tout le jour, en pensant à vous.

— Ah ! cela ne suffit pas, s’écria-t-elle. Cela vient de votre bonté et non de la mienne. Oh ! vous auriez eu plus de chances de bonheur, Ham, si vous en aviez aimé une autre, une créature plus sensée et plus digne de vous, une femme à vous, tout entière, et non pas vaine et variable comme moi.

— Pauvre petit cœur ! dit Ham à voix basse, Marthe l’a toute bouleversée.

— Je vous en prie, ma tante, balbutia Émilie, venez ici, que j’appuie ma tête sur votre épaule. Je suis bien malheureuse ce soir, ma tante. Je sens bien que je ne suis pas aussi bonne fille que je devrais être ! »

Peggotty s’était hâtée de s’asseoir auprès du feu. Émilie à genoux près d’elle, les bras passés autour de son cou, la regardait d’un air suppliant.

« Oh ! je vous en prie, ma tante, venez-moi en aide ! Ham, mon ami, essayez aussi de me venir en aide ! Monsieur David, pour l’amour du temps passé, je vous en prie, essayez de me venir en aide ! Je veux devenir meilleure que je ne suis ! Je voudrais me sentir mille fois plus reconnaissante. Je voudrais me rappeler toujours quel bonheur c’est d’être la femme d’un excellent homme, et de mener une vie paisible. Oh ! mon cœur, mon cœur ! »

Elle cacha sa tête sur le sein de ma vieille bonne, et cessant cet appel suppliant qui, dans son angoisse, tenait à la fois de la femme et de l’enfant, comme toute sa personne, comme le caractère de sa beauté même, elle continua de pleurer en silence, pendant que Peggotty l’apaisait comme un baby qui pleure.

Peu à peu elle se calma, et nous pûmes la consoler en lui