Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/321

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sans reproches, là où les méchants cessent de troubler les bons, et où on trouve le repos de ses peines… Si vous pouviez lui dire quelque chose qui soulageât son chagrin, sans pourtant lui faire croire que je me marierai jamais, ou que jamais une autre me sera de rien, je vous demanderais de bien vouloir le dire… et encore que je prie pour elle… elle qui m’était si chère. »

Je serrai encore vivement la main de Ham entre les miennes, et je lui promis de m’acquitter de mon mieux de sa commission.

« Je vous remercie, monteur, répondit-il ; vous avez été bien bon de venir me trouver ; vous avez été bien bon aussi d’accompagner mon oncle jusqu’ici, maître Davy ; je comprends bien que je ne le reverrai plus, quoique ma tante doive aller les revoir encore à Londres, et leur dire adieu avant leur départ. J’y suis bien décidé ; nous ne nous le disons pas, mais c’est sûr, et cela vaut mieux. La dernière fois que vous le verrez, au dernier moment, voulez-vous lui dire tous les remercîments, toute la respectueuse affection de l’orphelin pour lequel il a été plus qu’un père ? »

Je le lui promis.

« Merci encore, monsieur, dit-il, en me pressant cordialement la main ; je sais où vous allez. Adieu. »

Il fit un petit signe de la main, comme pour m’expliquer qu’il ne pouvait pas retourner dans ce lieu qu’il avait aimé autrefois, puis s’éloigna. Je le vis tourner les yeux vers une bande de lumière argentée, sur les flots, et passer son chemin en la regardant, jusqu’au moment où il ne fut plus qu’une ombre dans le lointain.

La porte du vieux bateau était ouverte lorsque j’en approchai ;je vis qu’il n’y avait plus de meubles, sauf un vieux coffre, sur lequel était assise mistress Gummidge, avec un panier sur les genoux. Elle regardait M. Peggotty, qui avait le coude appuyé sur la cheminée, et semblait examiner les cendres rougeâtres d’un feu à demi éteint ; mais il leva la tête d’un air serein, et me dit :

« Ah ! vous voilà, maître Davy ; vous venez dire adieu à notre vieille maison, comme vous l’aviez promis. C’est un peu nu, n’est-ce pas !

— Vous n’avez pas perdu votre temps, lui dis-je.

— Oh non, monsieur, nous avons bien travaillé ; mistress Gummidge a travaillé comme un… je ne sais vraiment pas