Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/443

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un abominable blasphème contre le Système, j’attendis, pour examiner de plus près les traces de cette pénitence tant vantée.

Mais ici, je fus encore assailli par de grands doutes. Je trouvai que la pénitence était à peu près taillée sur un patron uniforme, comme les habits et les gilets de confection qu’on voit aux étalages des tailleurs. Je trouvai qu’on faisait de grandes professions de foi, fort semblables quant au fond et même quant à la forme, ce qui me parut très-louche. Je trouvai une quantité de renards occupés à dire beaucoup de mal des raisins suspendus à des treilles inaccessibles ; mais, de tous ces renards, il n’y en avait pas un seul à qui j’eusse confié une grappe à la portée de ses griffes. Surtout je trouvai que ceux qui parlaient le plus étaient ceux qui excitaient le plus d’intérêt, et que leur amour-propre, leur vanité, le besoin qu’ils avaient de faire de l’effet et de tromper les gens, tous sentiments suffisamment démontrés par leurs antécédents, les portaient à faire de longues professions de foi dans lesquelles ils se complaisaient fort.

Cependant j’entendis si souvent parler, durant le cours de notre visite, d’un certain numéro Vingt-sept qui était en odeur de sainteté, que je résolus de suspendre mon jugement jusqu’à ce que j’eusse vu Vingt-sept. Vingt-huit faisait le pendant, c’était aussi, me dit-on, un astre fort éclatant, mais, par malheur pour lui, son mérite était légèrement éclipsé par le lustre extraordinaire de Vingt-sept. À force d’entendre parler de Vingt-sept, des pieuses exhortations qu’il adressait à tous ceux qui l’entouraient, des belles lettres qu’il écrivait constamment à sa mère, qu’il s’inquiétait de voir dans la mauvaise voie, je devins très-impatient de me trouver en face de ce phénomène.

J’eus à maîtriser quelque temps mon impatience, parce qu’on réservait Vingt-sept pour le bouquet. À la fin, pourtant, nous arrivâmes à la porte de sa cellule, et, là, M. Creakle appliquant son œil à un petit trou dans le mur, nous apprit, avec la plus vive admiration, qu’il était en train de lire un livre de cantiques.

Immédiatement il se précipita tant de têtes à la fois pour voir numéro Vingt-sept lire son livre de cantiques que le petit trou se trouva bloqué en moins de rien par une profondeur de six ou sept têtes ; Pour remédier à cet inconvénient et pour nous donner l’occasion de causer avec Vingt-sept dans toute sa pureté, M. Creakle donna l’ordre d’ouvrir la porte de