Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/246

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mains, me regarda d’un air pensif avec ses yeux si doux :

« — Je crois, » dit-elle, « qu’il va devenir l’associé de mon père.

» — Quoi ! » m’écriai-je indigné, « Uriah, cet être vil et rampant, s’élever jusqu’au rang d’associé de votre père ? n’avez-vous fait aucune remontrance ? Réfléchissez-y bien ; vous devez parler, vous devez empêcher M. Wickfield d’accomplir un acte si peu sensé… s’il en est temps encore.

» — Vous rappelez-vous, » répondit Agnès, « notre dernière conversation sur mon père ?… Ce fut peu de jours après… deux ou trois jours, je crois, qu’il me donna le premier avis de ce que je vous dis là. Il était pénible de le voir lutter entre le désir de me représenter la chose comme tout-à-fait volontaire, et la difficulté de cacher qu’elle était forcée. J’en fus navrée.

» — Forcée ! Agnès ! qui la lui impose ?

» — Uriah, » reprit-elle après un moment d’hésitation, « s’est rendu indispensable à mon père ; il est subtil et persévérant, il a épié les faiblesses de son patron, il les a caressées, il en a tiré avantage, jusqu’à ce que… pour m’exprimer en un seul mot, Trotwood… mon père ait eu peur de lui. »