Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/4

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et il fallait alors recommencer tout. J’éprouvais une impression profonde en voyant l’espoir qui lui remettait la plume à la main, la patience avec laquelle il supportait son perpétuel désappointement, le doute qui s’emparait quelquefois de lui à propos du roi Charles Ier, les faibles efforts qu’il faisait pour l’écarter, et cet inévitable retour de l’infortuné roi décapité qui venait bouleverser toute la rédaction du pauvre M. Dick. Mais si ce Mémoire impossible avait jamais pu se compléter, qu’en aurait fait M. Dick ?… où irait-il ? que produirait-il ? Je crois vraiment qu’il n’en savait trop rien lui-même. Hélas ! à quoi bon s’inquiéter de ces questions, puisque s’il y avait une chose certaine au monde, c’était que le Mémoire ne serait jamais fini.

Quoi qu’il en soit, il me semblait tout-à-fait touchant de le voir suivre des yeux le cerf-volant lorsqu’il s’élevait à une grande hauteur dans les nues. Je me rappelais ce que M. Dick m’avait dit dans sa chambre, de la chance qu’avaient les feuillets des mémoires avortés, d’aller porter au loin les faits qu’il avait intérêt à faire connaître ; jamais son regard n’était plus serein qu’alors : on eût dit que son esprit s’élevait aussi avec ce papier confident de ses