Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/458

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sant sa moue et ses menaces enfantines, posa sa petite main tremblante sur mon épaule, et, après m’avoir regardé avec effroi, commença à pleurer. Ce fut une scène déchirante pour moi ; je tombai à genoux, la caressant, la suppliant de ne pas se désoler ; mais la pauvre enfant ne faisait que s’écrier : « Ô mon Dieu ! mon Dieu !… où est Julia Mills ? Conduisez-moi où est Julia Mills ! Mon Dieu ! mon Dieu ! »

Après une véritable agonie de supplications et de protestations, Dora, un peu revenue de son horreur, se laissa presser dans mes bras ; je lui parlai de mon éternelle tendresse, de mon dévouement à toute épreuve ; mais peu à peu je dus revenir encore à la terrible vérité, je dus lui dire que je la relevais de son engagement, puisque j’étais réellement pauvre à présent ; que ce n’était pas la pauvreté qui me faisait peur à moi ; que je ne la redoutais que pour elle ; car j’avais du courage pour travailler, ce courage qu’inspire un sincère amour ; que j’avais déjà essayé du travail ; que déjà je savais que le pain sec bien gagné avait un goût plus doux au palais que le festin le plus somptueux, etc., etc. Toutes ces paroles et d’autres encore furent débitées avec une éloquence passionnée qui m’étonnait moi-même,