Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/79

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qu’elle. Peut-être Miss Larkins l’aînée a-t-elle déjà la trentaine : ma passion pour elle n’a pas de bornes.

Miss Larkins l’aînée connaît des officiers ; c’est une terrible chose à imaginer : je les vois qui l’arrêtent et lui parlent dans la rue ; ils l’ont reconnue de loin à son chapeau, car elle a toujours des chapeaux d’un goût parfait. Miss Larkins l’aînée se laisse arrêter par Messieurs les militaires ; elle les écoute, elle sourit à leurs compliments. Je la guette moi-même au passage et consacre toutes mes heures de loisir à cette attente ; si je puis une fois par jour rencontrer Miss Larkins et la saluer, je suis heureux : il m’est permis de la saluer, étant reçu chez son père ; je mérite de temps en temps que mon salut me soit rendu. S’il y avait une justice dans ce monde, qu’un philosophe a appelé le monde des compensations, je devrais être dédommagé des angoisses que j’endure le soir d’un bal public où je sais que Miss Larkins dansera avec les officiers.

Ma passion m’ôte l’appétit : ma passion me force de porter tous les jours ma cravate neuve et mon frac le plus habillé ; elle me fait continuellement cirer mes bottes. Je me figure ainsi être plus digne de Miss Larkins l’aînée ; tout ce