Page:Dickens - L'Ami commun, traduction Loreau, 1885, volume 1.djvu/323

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d’une voix professorale. Ce nom de Lizzie, Mary-Anne, est-il un nom chrétien ? »

Mary-Anne posa son ouvrage, quitta sa chaise, se croisa les bras derrière le dos, ainsi qu’on doit le faire quand on est interrogée, et répondit : « Non, madame ; c’est une corruption.

— Qui l’a nommée ainsi ? » demanda l’institutrice ; mais elle s’arrêta en voyant l’élève sur le point de répondre que c’était son parrain ou sa marraine, et dit en se reprenant : « De quel mot est-ce la corruption ? c’est là ce que je demandais.

— D’Élisabeth, ou d’Élisa, miss Peecher.

— Très-bien, Mary-Anne. Qu’il y ait eu des Lizzie dans l’Église primitive doit être considéré comme un point fort douteux. » En disant cela, miss Peecher faisait preuve d’une extrême sagesse. « Alors, poursuivit-elle, ne devons-nous pas dire, pour parler correctement, que la sœur d’Hexam s’appelle Lizzie ; mais que ce n’est pas son véritable nom ?

— Oui, madame.

— À présent, continua miss Peecher, qui se plaisait à prolonger cet examen fictif et à lui donner la forme officielle, comme si elle ne l’avait fait que dans l’intérêt de son élève, dites-moi, Mary-Anne, où demeure cette jeune personne que l’on appelle Lizzie, bien que ce ne soit pas son véritable nom ? Réfléchissez avant de répondre.

— Elle demeure rue de l’Église, Smith-Square, près de Mill-Bank.

— Rue de l’Église, Smith-Square, près de Mill-Bank, répéta miss Peecher comme si elle avait eu sous les yeux le livre classique où se trouvait cette adresse ; c’est bien cela. À quelle occupation cette jeune fille se livre-t-elle ? réfléchissez, ne vous pressez pas.

— Elle a un poste de confiance chez un confectionneur de la Cité.

— Oh ! fit miss Peecher d’un air pensif ; puis elle répéta d’une manière affirmative : un confectionneur de la Cité ; fort bien.

— Et Charley… »

Mary-Anne s’arrêta brusquement sous le regard étonné de miss Peecher. « Je voulais dire mister Hexam, reprit-elle.

— Je suis bien aise de vous entendre réparer cette faute. Vous disiez que mister Hexam…?

— N’est pas content de sa sœur, répondit l’élève ; elle ne veut pas accepter ses conseils, et obéit à ceux d’un autre. Il dit encore…

— Mister Headstone dans le jardin ! s’écria miss Peecher en jetant dans la glace un regard triomphant. Très-bien répondu, Mary-Anne ; vous prenez l’excellente habitude de mettre de l’ordre dans vos idées, cela ira bien. »