Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 1.djvu/262

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comment cela était arrivé… Il la tenait certainement dans ses bras.

— Juste ciel ! s’écria M. Pickwick, le souvenir de la scène en question se retraçant avec vivacité à son esprit. Cela est vrai ! cela est vrai ! Quelle affreuse preuve du pouvoir des circonstances !

— Et notre ami tâchait de la consoler, ajouta M. Winkle avec un grain de malice.

— Cela est vrai, dit M. Pickwick. Je ne le nierai point, cela est vrai !

— Ho ! ho ! cria M. Wardle, pour une affaire dans laquelle il n’y a rien de suspect, cela a l’air assez drôle. Eh ! Pickwick, ah ! ah ! rusé garnement ! rusé garnement ! » Et il éclata de rire avec tant de force que les verres en retentirent sur le buffet.

« Quelle épouvantable réunion d’apparences ! s’écria M. Pickwick en appuyant son menton sur ses deux mains. Winkle ! Tupman ! je vous prie de me pardonner les observations que je viens de faire à l’instant. Nous sommes tous les victimes des circonstances, et moi la plus grande des trois ! »

Ayant fait cette apologie, M. Pickwick ensevelit sa tête dans ses mains et se mit à réfléchir, tandis que M. Wardle adressait aux autres membres de la compagnie une collection de clignements d’œil et de signes de tête.

« Quoi qu’il en soit, dit M. Pickwick en relevant son front indigné, et en frappant sur la table, je veux que tout cela s’explique. Je verrai ce Dodson et ce Fogg. J’irai à Londres, demain.

— Non, pas demain, reprit M. Wardle, vous êtes trop boiteux.

— Eh bien ! alors, après-demain.

— Après-demain est le premier septembre, et vous avez promis de venir avec nous jusqu’au manoir de sir Geoffrey Manning, pour nous tenir tête au déjeuner, si vous ne nous accompagnez pas à la chasse.

— Eh bien ! alors, le jour suivant, jeudi. Sam !

— Monsieur ?

— Retenez deux places d’impériale pour Londres, pour jeudi matin.

— Très-bien, monsieur. »

Sam Weller partit donc pour exécuter sa commission. Il avait ses mains dans ses poches, ses yeux fixés sur la terre et il marchait lentement, en se parlant à lui-même.