Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/280

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peu ce collier étincelant que j’ai là-haut, pour que je le lui donne le jour de ses noces. Quel bonheur de l’arrondir moi-même autour de son charmant petit cou ! Mais, par exemple, je le lui reprendrai le lendemain. Hé ! hé ! hé ! Je le mets sous clef, et puis ni vu ni connu : qui est-ce qui sera attrapé de nous deux, elle ou moi, je vous le demande, Peg ? »

Ce plan ingénieux parut tout à fait du goût de Mme Sliderskew, et elle en exprima sa satisfaction par une suite de contorsions et de tortillements de corps et de tête qui n’étaient pas pour ajouter à ses charmes naturels, et qu’elle continua jusqu’à ce qu’elle eut passé le pas de la porte. Là, sa physionomie changea en un tour de main pour prendre une expression aigre et méchante, et, entre ses mâchoires de travers, elle murmura de tout son cœur des malédictions contre la future Mme Gride, tout en remontant l’escalier presque à quatre pattes et en s’arrêtant à chaque marche pour reprendre sa respiration.

« La vieille sorcière ! dit Arthur Gride quand il se vit seul ; heureusement qu’elle est très-sobre et très-sourde ; sa nourriture ne me coûte presque rien ; quant à écouter aux portes, il n’y a pas de danger, elle n’entendrait rien. C’est une femme charmante… pour ce que j’en veux faire ; c’est une vieille gouvernante de maison très-discrète et qui vaut son pesant de… cuivre. »

Après avoir ainsi chanté les mérites de sa domestique, le vieil Arthur retourna au refrain de sa chansonnette, puis, ayant mis de côté l’habit décidément destiné à faire valoir ses formes gracieuses, le jour prochain des noces, il replaça les autres avec le même soin qu’il avait mis à les prendre, dans les coins humides où ils reposaient en silence depuis bien des années.

En entendant sonner à la porte, il se dépêcha de terminer cette opération et de fermer l’armoire. Quoiqu’il n’y eût pas besoin de se presser beaucoup, car la discrète Marguerite entendait rarement la sonnette et ne reconnaissait qu’il y avait quelqu’un à la porte que lorsque, par hasard, elle jetait un coup d’œil égaré au plafond de la cuisine, et qu’elle voyait branler le battant, cependant, quelques moments après, Marguerite entra en boitillant suivie de Newman Noggs.

« Ah ! monsieur Noggs, cria Arthur Gride en se frottant les mains ; mon bon ami monsieur Noggs, quelle nouvelle m’apportez-vous ? »

Newman, la figure immobile et impassible, l’œil fixe, puisqu’il ne pouvait pas bouger, lui répondit en lui mettant un billet dans la main :