Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/372

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tail, moi, je vais faire l’inventaire des papiers, pour vous dire ce que c’est. »

Peg ayant accepté cet arrangement, M. Squeers retourna la boîte sens dessus dessous, en renversa le contenu sur le carreau et la lui passa. Il comptait sur l’attention de la vieille occupée à la faire brûler, dans le cas où il serait bon de la distraire, pour lui dissimuler la soustraction de quelque pièce à sa convenance.

« Là ! dit Squeers, vous poussez les morceaux avec les pincettes entre les barreaux de la grille, vous en faites flamber le feu, et moi, pendant ce temps-là, je vais lire. Voyons ! » En parlant ainsi, il posa à terre la chandelle auprès de lui vivement avec une grimace satanique, et procéda à l’examen.

Si la bonne femme n’avait pas été sourde comme un pot, elle n’aurait pas manqué d’entendre, quand elle était allée à la porte, la respiration haletante de deux personnes cachées derrière ; et, à moins d’être bien renseignées sur son infirmité, ces deux personnes n’auraient rien eu alors de plus pressé que d’entrer sur-le-champ ou de détaler au plus vite. Mais, comme elles savaient à qui elles avaient affaire, elles restèrent coites à la porte, sans qu’on s’en aperçût ; puis, trouvant que le verrou n’était pas fermé, parce qu’il n’avait pas de gâche, elles entrèrent avec précaution et s’avancèrent à pas de loup dans la chambre.

Pendant qu’elles se glissaient petit à petit sur la pointe du pied, en retenant leur respiration, Squeers et la vieille sorcière, qui ne s’attendaient pas qu’ils eussent quelqu’un sur leurs talons, s’occupaient tranquillement de leur petit affaire : la vieille, tournant sa face ridée tout près des barreaux de la grille dans l’âtre, et gonflant ses joues pour souffler dans les cendres et faire prendre le feu ; Squeers se baissant pour lire à la chandelle, qui mettait en relief toute son horrible figure, comme la lueur du feu faisait valoir celle de sa compagne ; tous deux, absorbés dans leur emploi, et rayonnant d’une joie qui contrastait singulièrement avec l’air d’anxiété des nouveaux venus, qui profitaient par derrière du plus léger bruit fait par les autres pour avancer un pas, et s’arrêtaient tout court, quand le bruit avait cessé ; ajoutez à cela la grande chambre nue et sombre, les murs humides, la lueur douteuse et vacillante de la chandelle, et vous aurez une scène capable d’intéresser le spectateur le plus froid et le plus indifférent, une scène à rester longtemps gravée dans la mémoire.

Ces visiteurs clandestins, c’était M. Frank Cheeryble d’une part, et Newman Noggs de l’autre. Newman avait empoigné par son bout rouillé un vieux soufflet, et lui faisait décrire au-des-