Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 2.djvu/430

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

des sourires de satisfaction en les introduisant dans le salon, où les frères leur firent un accueil si cordial et si tendre, que Mme Nickleby, dans son embarras, eut à peine assez de présence d’esprit pour ne pas oublier de présenter Mlle la Creevy. Catherine fut encore plus émue de la cérémonie de la réception ; car elle savait que les frères étaient instruits de tout ce qui s’était passé entre elle et leur neveu, position embarrassante dont elle sentait toute la délicatesse. Aussi son bras tremblait-il sur celui de Nicolas, quand M. Charles lui offrit le sien pour la conduire à son fauteuil.

« Avez-vous vu Madeleine, ma chère demoiselle, dit-il, depuis qu’elle est sortie de chez vous ?

— Non, monsieur, répliqua-t-elle, pas encore.

— Et vous n’avez pas entendu parler d’elle ? Quoi ! elle ne vous a pas donné de ses nouvelles ?

— Je n’en ai reçu qu’une fois, et par lettre, répondit doucement Catherine. Je n’aurais jamais cru qu’elle dût m’oublier sitôt.

— Ah ! dit le vieux gentleman en lui serrant la main et en lui parlant avec l’affection qu’il aurait pu montrer pour une fille chérie ; pauvre petite ! Qu’est-ce que vous dites de cela, frère Ned ? Madeleine qui ne lui a écrit qu’une fois, une seule fois, Ned ; et Mlle Nickleby n’aurait jamais cru qu’elle l’oubliât sitôt.

— Ah ! c’est mal, c’est mal, très-mal ! » dit le frère.

Ils échangèrent ensemble un coup d’œil, et, regardant quelque temps Catherine sans mot dire, ils se donnèrent une poignée de main et se firent des signes de tête comme s’ils se félicitaient mutuellement de quelque particularité secrète qui leur faisait beaucoup de plaisir.

« Allons ! allons ! dit le frère Charles, passez dans cette chambre, ma petite, la porte là-bas, et voyez si vous n’y trouverez pas une lettre d’elle pour vous. Je crois qu’il y en a une sur le guéridon. Si vous en trouvez une, vous n’avez que faire de vous presser pour la lire. Prenez votre temps ; nous ne dînons pas encore. Vous avez bien le temps de revenir ici ; ne vous pressez pas. »

Catherine se retira sur cette invitation. Frère Charles suivit des yeux sa gracieuse personne et se retourna vers Mme Nickleby en lui disant :

« Nous avons pris la liberté de vous inviter une heure avant de nous mettre à table, madame, parce que nous voulions, d’ici là, vous entretenir d’une petite affaire. Ned, mon cher frère,