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BAF

quité. Tertullien dit, de Pallio cap. 3, qu’elles étoient naturellement colorées, parce qu’elles étoient noires.

Ce nom vient de Bætis, nom ancien d’un fleuve qui arrose ce pays, & qu’on appelle aujourd’hui Guadalquivir. Quelques-uns dérivent le nom Bætis, de בת, bath, mot punique ou carthaginois, qui signifie pernoctare, comme en chaldéen. Bochart, dans son Chanaan, Liv. I, chap. 34, prétend qu’il vient de ביצי, autre mot punique, qui signifie marécageux, de בץ, boue, limon, bourbe ; qu’il fut ainsi nommé parce qu’il forme trois lacs, le premier à la source, le second proche de Cordoue, & le troisième vers son embouchure ; que c’est encore pour cela que les habitans, au rapport d’Etienne de Byzance, le nommoient Perca, c’est-à-dire, ברכה qui signifie étang. Le fleuve Bétis coule dans un pays fertile, & sous un ciel doux, qui est toujours serein. Le pays a pris le nom du fleuve, qui se jette dans le grand Océan, assez près des colonnes d’Hercule. Fenel. Telem.

BÆTYLE. s. m. Terme de Mythologie. Batylus. Selon Priscien, c’est le nom que les Grecs donnoient à la pierre que les Latins nomment Abadis, & que Saturne dévora au lieu de Jupiter. Hésychius & l’Etymologiste Grec sont de même sentiment. L’Etymologiste, en un autre endroit qui est corrompu, & qu’il faut corriger par Phavorinus, dit que Bætyle étoit une pierre qui s’étoit formée proche du Liban, montagne de la ville d’Ilion, Ἰλίου, ou plutôt, comme les savans ont corrigé, Ἡλίου, c’est-à dire, de la ville du Soleil. Sanchoniaton, dans Eusèbe, Præp. L. I, dit que le Dieu Uranus inventa les bætyles, fabricant, dit-il, des pierres animées. Philon de Bibles dit la même chose. Photius rapporte, pag. 1062 & 1063, que Damascius, Auteur païen, fort superstitieux, qui vivoit sous Justinien, racontoit qu’il avoit vu la pierre bætyle qui se mouvoit en l’air ; & que le Philosophe Isidore disoit que c’étoit un Démon qui lui donnoit ce mouvement. Le même Damascius disoit qu’il y avoit des bætyles consacrés à plusieurs Dieux différens, à Saturne, à Jupiter, au Soleil, &c. Lampridius parle de pierres semblables, qui étoient dans le Temple de Diane, à Laodicée, in Anton. hel. cap. 7. Voilà à peu près tout ce que l’antiquité nous enseigne des bætyles. Sur cela quelques-uns jugent que ce n’étoient que les pierres informes, dont les Idolâtres représentoient leurs Dieux avant l’invention de l’art de la Sculpture. Bochart, Chanaan, Liv. II, chap. 2, croit que les Phéniciens imitèrent ce que Jacob avoit fait, lorsqu’après la vision de l’échelle mystérieuse, il éleva une pierre au même lieu ; qu’il nomma béthel, versant de l’huile dessus ; & que c’est de-là que vint cette coutume, & le nom bætyle, qui fut donné à ces pierres. Il croit, conformément à cette conjecture, que Sanchoniaton n’avoit point dit que ces pierres étoient animées, mais qu’elles étoient ointes ; que le texte de cet Auteur s’étoit ensuite altéré, ou qu’on avoit mal lu, & que de נשפים, Naschphim, on avoit fait נפשים, Napschim. Les Juifs ont une tradition qui confirme ceci, & qui dit que cette pierre de Jacob fut d’abord agréable à Dieu ; mais qu’ensuite il l’eut en horreur, parce que les Chananéens transporterent cet usage dans leur idolâtrie. Voyez Scaliger sur Eusèbe, p. 198. Saumaise sur Lampridius cité, Bochart à l’endroit cité ; le Chevalier Marsham, Can. Chron. Sect. IV. Voss. De idol. Lib. VI, c. 39, & ci-dessus le mot Abadir.

BAF.

☞ BAFFA. Quelques-uns écrivent BAFFO, & d’autres BAFFE, avec une terminaison françoise. Bourg de l’Île de Chypre, au bord de la mer. C’est, selon quelques-uns, le lieu où fut l’ancienne Paphos.

BAFFETAS. s. m. Toile toute de fil de coton blanc, très-grosse, qui vient des Indes orientales. Les meilleures sont celles de Surate.

Baffetas, est aussi une étoffe des mêmes Indes, qu’on nomme autrement Shaub.

BAFFRAI. s. m. Vieux terme de fortification. Château, tour. Castellum, turris. S. Louis fit faire deux baffrais, qu’on appelle Chas-chateils. Car il y avoit deux chateils devant le chas, & deux maisons derrière, pour recevoir les coups que les Sarazins jetoient à engins. Joinville. C’est de-là que vient beffroi, qui se dit aujourd’hui. Voyez ce mot.

BAFOUER. v. a. Traiter indignement & avec mépris. Contumelis vexare, illudere. Une des plus grandes souffrances de Notre Seigneur, c’est d’avoir été bafoué & indignement traité par les Juifs. Il vient de l’italien Beffare, moquer. Men.

BAFOUÉ, ÉE part. Irrisus, contumeliâ affectus.

BÂFRE. s. f. ☞ Terme populaire, qui signifie repas copieux, abondant, epulum, epulæ ; & l’action de manger avec excès : epulatio, helluatio. Dans la première acception, on dit qu’il y a bâfre en tel endroit, chez un tel. Dans la seconde, on dit aimer la bâfre, plonger à la bâfre.

BÂFRER. v. n. Terme populaire, qui signifie manger goulûment, manger avec avidité, avec excès. Gulosè & voraciter convivari, epulari indecoré, helluari. Ces deux Procureurs bâfrent tous les jours ensemble. A voir bâfrer cet homme, il donne de l’appétit.

BÂFREUR. s. m. Gourmand, grand mangeur. Helluo. Entre les différens Gilles des Tabarins & autres Pantomimes, il y en a un qui s’appelle Gilles le bâfreur.

BAG.

BAGACE. s. f. On nomme ainsi dans les Sucreries des Îles Antilles les cannes de sucre, lorsqu’elles ont passé par le moulin pour les briser & en tirer le sucre. Les bagaces servent à faire cuire le sucre dans les chaudières, & à faire des flambeaux pour éclairer la nuit. Pour faire ces flambeaux, on fait sécher les bagaces au soleil, puis on en prend trois ou quatre, suivant la grosseur qu’on veut donner au flambeau, qu’on lie d’espace en espace avec des aiguillettes de Mahot, de mibi, ou autre espèce de lianne. Il faut enter plusieurs bagaces les unes sur les autres, afin de faire un flambeau de sept ou huit pieds de hauteur, parce que la matière qui est très-combustible va fort vite. Le P. Labat, Voyage de l’Amérique.

BAGAGE. s. m. Hardes, meubles, ustensiles, équipage de guerre, ou de voyage. Impedimenta, farcina.

Bagage, se dit aussi en nom collectif de tout l’équipage d’une armée, même de l’artillerie. On a défait les ennemis, pillé & enlevé tout le bagage. Les valets gardent le bagage. Jean le Breton, Seigneur de Villandry, s’entretenant un jour avec Claude de Lorraine, premier Duc de Guise, d’une bataille du roi François I, contre l’Empereur Charles V, jura qu’il s’y étoit trouvé, & même en un lieu où le Duc n’auroit jamais osé paroître. Celui-ci témoignant être choqué de ce discours, le Breton l’apaisa aussi-tôt, en disant : J’étois avec le bagage.

☞ On appelle gros bagage, celui qui ne sauroit être voituré que par charrois ; & menu bagage, celui qui peut être porté sur des bêtes de somme.

On dit figurément & proverbialement, qu’il faut plier, trousser bagage ; pour dire, qu’il faut s’enfuir, qu’il faut déménager, qu’il faut mourir. Et on dit d’un homme mort, qu’il a plié bagage. On dit d’un homme fort stupide, que c’est un vrai cheval de bagage. On dit aussi qu’on a du bagage logé chez soi, quand on y a logé des filous, ou gens de mauvaise vie, qui à tous momens sont contraints de déménager, d’emporter leur bagage, leurs meubles.

Il vient du mot de bagues, quand il signifie hardes. Ils s’en sont allés bagues fauves, c’est-à-dire, ils ont emporté leur bagage. Et l’un & l’autre, c’est-à-dire, bague & bagage, selon Etienne Guichard, peuvent être pris de l’hébreu בגד beghed, qui signifie habit, harde. D’autres disent qu’il vient de baga, mot de la basse latinité, qui signifie coffre, parce qu’on met le bagage dans des coffres.

☞ BAGAMEDRI. Voyez Bagemder, qui est le vrai nom de ce Royaume.

BAGANS. s. m. C’est un mot gascon, qui signifie Pâtres, ou paysans, qui gardent le bétail dans les Landes de Bor-