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On trouve dans les Auteurs Ecclésiastiques beaucoup de cérémonies qui ne sont plus en usage, comme de donner à ceux qui étoient baptisés, du lait & du miel, ce qui se faisoit en Orient ; ou du vin & du lait, comme en Occident ; de leur laver les pieds, de leur donner la Sainte Eucharistie. Voyez Durand. On donnoit, dit Tertullien, du lait & du miel au baptême, pour apprendre aux Néophytes, que le Christianisme étoit une loi de douceur & de concorde.

Quelques Auteurs ont cru que dans les premiers temps on ne baptisoit que les seuls adultes. Walafride Strabon dans son Livre {{lang|la|de rebus ecclesiasticis, ch. 26, a prétendu que c’étoit l’usage de la primitive Eglise. Louis Vivès, dans ses notres sur le i. liv de la Cité de Dieu, de S. Augustin, appuie ce sentiment. Mais le baptême des enfans est autorisé par toute l’ancinne tradition de l’Eglise depuis les Apôtre. Voyez ce que S. Cyprien dit sur cela d’un Concile d’Afrique, dans son épître ad Fidum. Le premier Concile de Milève, Can. 2 ; le second, Can. 3 ; le Concile d’Auxerre, Can. 18 ; celui de Girone tenu sous Hormisdas l’année 4e du roi Théodoric ; le Concile Général de vienne, sous Clément V ; le Concile de Trente, Sess. VII, Can. 13 ; l’Epitre de Siricus ad Himer. Tarrac ; celle d’Innocent I, au Concile de Milève ; Clementin. de summâ Trinitate, & fide Cath. Innocent III. Extra C. Majores de Baptismo ; S. Irénée, Liv. II, ch. 8. Origène, L. V, in cap. IV, epist. ad Roman. Le Livre de cœlesti hierarch. attribué à S. Denys, au dernier chapitre ; S. Grégoire de Nazianze, orat. in S. baptisma ; S. Jean Chrysostôme, ad Neophyt. S. Cyprien, ep. ad Fium ; S. Augustin, ep. ad Hieronymum, serm. 10, de verb. Dom. l. III, de peccatorum meritis, c. 1 & 26, L. IV. de bapt. c. 23 ; S. Jérôme, Dialog. III. contra Pelag. S. Ambroise, L. de Myst. Pasch. c. 5. L. I. de Vocat. Gent. c. 6. S. Grégoire le Grand, L. I. ép. 17.

La coutume d’imposer un nom au Baptême, & un nom de Saint, est très-ancienne. Grégoire de Tours rapporte que S. Herménégilde fut nommé Jean à son Baptême. Voyez Denys d’Alexandrie, L. VIII. c. 20. S. Jean Chrysostôme, hom. 12. sur la Ie ep. aux Corinth. Vicecomes de bapt. L. II, c. 15. de Hautessere sur Grég. de Tours, L. V, p. 201.

Le Baptême signifie en un sens figuré de grandes afflictions, comme quand Jésus-Christ dit aux fils de Zébédée, au ch. 10 de S. Marc, v. 38. Pouvez-vous boire le Calice que je dois boire, ou être baptisés du Baptême dont je dois être baptisé ? Jésus-Christ dit encore au chap. 12 de S. Luc. v. 50. Je doit être baptisé d’un Baptême, & combien me sens-je pressé jusqu’à ce qu’il s’accomplisse ? Il marque par cette expression métaphorique ses souffrances & sa mort. C’est aussi dans ce sens, qu’il faut entendre ces paroles du ch. XV. de la I. épitre aux Corith. Que feront ceux qui sont baptisés pour les morts, s’il est vrai que les morts ne ressuscitent point ?

Pour ce qui est de la forme du Baptême, ce sont les paroles que l’on prononce en appliquant l’eau au corps du baptisé. Jésus-Christ a prescrit cette forme en S. Math. chap. XXVIII. v. 19. Allez, enseignez toutes les nations, & baptisez-les au nom du Pere, & du Fils, & du S. Esprit. Elle est la même dans toutes les Eglises, soit d’Orient, soit d’Occident ; car ces paroles dont on se sert dans l’Eglise Romaine, Je te baptise au nom du Pere, &c. sont entièrement les mêmes que celles-ci, qui sont en usage chez les Grecs : N. serviteur de Dieu est baptisé au nom du Pere, &c. Les Grecs se servent de cette expression, parce qu’ils croient qu’il est plus modeste de s’exprimer en troisième personne. Plusieurs Théologiens ont prétendu que les Grecs ne disent pas baptisatur, c’est-à-dire, est baptisé, mais baptisetur, soit baptisé, en quoi ils se sont trompés.

Le ministre du Baptême, c’est celui qui donne, qui confère le Baptême, c’est-à-dire, qui fait l’application de l’eau au corps de celui qui est baptisé, en prononçant la forme. Les anciens Canons de l’Eglise ne donnent le droit de baptiser qu’aux Evêques seuls, puis aux Prêtres & aux Diacres par la permission des Evêques. C’est ce que nous apprenons aussi de Tertullien dans son Traité du Baptêle, & de S. Jérôme qui, dans son Dialogue contre les Lucifériens, dit que ni les Prêtres ni les Diacres n’ont le droit de baptiser que par l’ordre de l’Evêque. Inde venit ut fine Espicopijissione, neque Presbyter neque Diaconus jus habeant baptisandi. Le Diacre n’avoit ce pouvoir qu’en l’absence du Prêtre, & en cas de nécessité. Les Laïques même pouvoient baptiser dans le cas de nécessité, comme l’assurent Tertullien & S. Jérôme aux mêmes endroits. Si necessitas cogit, scimus etiam licere Laïcis baptisare. Tertullien ajoute même que le Laïque qui manque d’administrer ce Sacrement dans ce cas, est coupable de la perte d’un homme.

Il y a eu autrefois de grandes disputes sur le Baptême administré par les Hérétiques, savoir qu’il étoit valide. La tradition constante a toujours été, que le Baptême administré par les Hérétiques au nom de la Trinité étoit bon & valide, lorsqu’il est conféré par un Chrétie, quoiqu’il soit en péché mortel & lié par des censures. Les femmes même le peuvent conférer en cas de nécessité ; mais hors le cas de nécessité ce doit être un Prêtre. On se plaignit au Concile de Limoges en 1031, que l’on baptisoit dans le Monastère de S. Martial, à Paques & à la Pentecôte, ce que les Clercs de la Cathédrale soutenoient ne se devoir faire que chez eux. Mais on représenta que c’étoit un ancien privilége de S. Martial, & de quelques autres Monastères ; à la charge que ceux qui auroient été baptisés, seroient présentés le même jour devant l’Evêque pour la Confirmation. Fleury.

Le Concile de Rouen en 1072 ordonne au Prêtre de conférer le Baptême à jeu, revêtu d’une aube & d’une étole, hors les cas de nécessité.

Le Baptême a succédé à la Circoncision, en ce que le Baptême fait enfans de l’Eglise ceux qui le reçoivent, comme la Circoncision rendoit sujets de la Synagogue, ceux qui étoient circoncis ; & le Baptême depuis Jésus-Christ distingue les Chrétiens des Infidelles, comme la Circoncision distinguoit les enfans mâles descendus d’Abraham des autres hommes.

On distingue trois sortes de Baptême. Le Baptême d’eau, dont nous avons parlé ; le Baptême de sang & le Baptême de feu. Baptismus fluminis, Baptismus sanguinis, Baptismus flaminis.

Baptême de feu. C’est un acte de parfait amour de Dieu, lequel joint à un désir véritable de recevoir le Baptême, & une résolution de le recevoir en effet quand on le pourra, supplée au Baptême d’eau, & a les mêmes effets. On appelle ces actes Baptême de feu, Baptismus flaminis, c’est-à-dire, Baptême du S. Esprit, ou Baptême de charité, d’amour de Dieu, parce que le feu est le symbole de la charité, & qu’en cas de nécessité, cet acte d’amour parfait supplée au Baptême ; ensorte qu’un infidelle adulte qui étant dans ces dispositions seroit surpris de la mort, sans pouvoir recevoir le Baptême, seroit néanmoins justifié & sauvé. Mais ce qu’a dit Cajetan, qu’un pareil souhait dans les parens, (car on l’appelle aussi votum Baptismi, vœu, sougait du Baptême, résolution de le recevoir) que ce vœu, dis-je, avec quelque bénédiction ou oblation de l’enfant à Dieu, jointe à l’invocation de la Sainte Trinité, peut suffire dans le danger pour un enfant encore dans le sein de sa mere, est une erreur réfutée entre autres par Alphonse de Castro adv. hær. L. III, au mot Baptismus hær, 9. On appelle aussi ce Baptême de feu, Baptême de désir, baptismus in voto ; parce que la charité parfaite emporte toujours la résolution de garder tous les Commandemens & par conséquent celui qui oblige de recevoir le Baptême.

Baptême du Martyre, ou le Baptême de Sang. On appeloit ainsi le martyre des Catéchumènes, qui mouroient pour la cause de l’Evangile avant que d’être baptisés. On croyoit que le martyre leur tenoit lieu de Baptême. Les premiers Chrétiens faisoient profession de désirer avec ardeur le Baptême de sang.

Le Baptême est absolument nécessaire pour le salut ;