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BAR

tige est haute de trois à quatre pieds, quelquefois plus branchue, épaisse, moelleuse, velue, lavée d’un peu de pourpre, & garnie par intervalles de feuilles semblables à celles du bas, mais beaucoup plus petites. Les extrémités des tiges & des branches sont terminées par des têtes écailleuses, dont chaque écaille est courbée en crochet ; elles renferment des fleurons de couleur de pourpre, soutenus par des embryons qui deviennent des semences brunes, oblongues, garnies d’une aigrette qui tombe aisément. Les têtes sont fort grosses dans quelques espèces, dans d’autres plus menues, & dans une troisième les écailles des têtes sont entrelacées d’un coton blanchâtre. On appelle petit Gloutteron, Xanthium, une plante qui diffère du grand gloutteron par ses fleurs & par ses fruits. La bardane croît communément le long des chemins, & ses têtes s’accrochent aisément aux habits ; & c’est d’où lui vient le nom de lappa, du grec λαμϐάνειν, prendre ; celui de personata lui a été donné, parce qu’on se couvroit autrefois le visage avec ses feuilles lorsqu’on montoit sur le théâtre, & qu’on ne vouloit point être connu. Sa racine est d’usage en Médecine. Elle est sudorifique, diurétique, bonne pour les maladies de la poitrine. Sa semence est recommandée pour la néphrétique. Henri III, roi de France, fut guéri d’une fièvre quarte avec la décoction de bardane. Son eau distillée entre dans les potions sudorifiques.

BARDARIOTE. s. m. Bardariota. Les bardariotes étoient des soldats de la garde de l’Empereur de Constantinople ; ils étoient armés de bâtons & de baguettes, pour écarter le peuple quand l’Empereur passoit, ils portoient à leur ceinture des fouets pour punir ceux qui étoient condamnés. Ils étoient gardes des portes du Palais. Dans les cavalcades que faisoit l’Empereur, ils marchoient devant lui, le bâton haut, pour faire ranger le peuple & le tenir dans l’ordre. Ils étoient originairement Persans. Un Empereur, que Codin ne nomme point, les avoit transportés de Perse sur le fleuve Bardarius, d’où ils avoient pris leur nom de bardariotes. Nicétas les nomme aussi βαρδουχους, Porte-verges, ou porte-bâtons, & Μαγκλάϐιτας, Manclavites, du nom grec de leurs verges ou bâtons, μαγκλάϐια. A l’armée ils avoient leur poste au septentrion de la tente impériale, auprès de laquelle ils faisoient garde. Je ne sais où un Auteur moderne a pris ce qu’il dit, que leur Commandant s’appeloit Primivergius. Codin dit seulement qu’ils ont un Primicerius ; qu’ils obéissent au Primicerius de la Cour. Cedrenus l’appelle χόρτου Κόμητα, le Comte de la Cour ; & Μαγκλαϐίτην, Manclabite. Je ne lui trouve point jusqu’ici d’autre nom. Il n’est pas même sûr que ce soit lui que Cedrenus désigne par le premier, quoique le P. Goar le croie. Les bardariotes étoient vêtus de rouge, & portoient un bonnet à la persanne nommé augurot, qui au lieu de rebord, ou du retroussé, étoit bordé d’un drap de couleur de citron. Voyez Codinus de Off. Const. C. 5, n. 51, 53, 54, & Boulanger. Charles Macri croit que les bardariotes sont les mêmes que les barbutes.

☞ BARDASHIR. Ville de Perse, dans la Cormanie.

BARDE. s. m. Vieux mot qui signifioit autrefois l’armure d’un cheval de gens d’armes, ou armés de toutes pièces.

☞ Elle étoit faite de lames de fer pour couvrir le poitrail & les flancs du cheval. Laterarium ac pectorale equi tegmen, equi armatura. Il n’est plus en usage. La Crusca dit que barda è armatura di cuoio cotto, ò di ferro, con laquale s’armava la groppa, il colto, el petto di cavalli.

Barde, est aussi une longue selle qui n’a ni fer, ni bois, ni arçons, qui est faite de grosse toile piquée & de bourre. Ephippium. On l’appelle en quelques endroits panneau.

Barde, se dit aussi d’une tranche de lard qu’on met sur les volailles, au lieu de les larder pour les rôtir. Lardum in osellas fectum.

BARDEAU. s. m. Petit ais dont on se sert au lieu de tuiles pour couvrir les maisons. Scandulæ. On en fait souvent des douves, ou d’autres ais aussi minces. On les appelle autrement aissis en plusieurs endroits, comme qui diroit des ais sciés. Les Romains pendant 470 ans n’eurent leurs maisons couvertes que de chaume, ou bardeau. Vigen.

BARDÉES d’eau. s. f. pl. Terme de Salpêtrier. Ce sont trois demi muids d’eau que l’on jette dans les cuviers pour faire le salpêtre, ou pour le raffiner. On en jette jusqu’à quatre pour le raffinage en plusieurs fois.

BARDELLE. s. f. Selle en ferme de selle a piquer. Ephippium. Elle n’est faite que de toile & de paille & il n’y entre ni cuir, ni fer, ni bois. Le vieux Grison, & plusieurs Auteurs italiens, veulent qu’au manége on se serve pour les poulains d’une bardelle, qui est une selle de paille à mettre sur leur dos, & d’un cavesson de corde sur leur nez, qui est une invention qui ne sert qu’à perdre le temps. Newc.

BARDENOCHE. s. f. Espèce d’étoffe, dont il est parlé dans le tarif de la Douane de Lyon. Les Marchands de Paris ne la connoissent pas.

☞ BARDENWIK. Voyez Bardewick.

BARDER, v. a. Mettre une barde à un cheval. Equum tegere, armare, munire. Les anciens Chevaliers faisoient barder leurs chevaux. Voyez Barde.

Barder, signifie aussi, mettre une barde, ou une tranche de lard sur un chapon, ou autre volaille. Lardo in osellas secto altilia tunicare. Il y a des gens qui aiment mieux les viandes bardées que lardées.

Barder, signifie aussi l’action de charger des pierres sur un charriot, sur un bar. Voyez Bar.

BARDÉ, ÉE. part. pass. & adjectif. Armé de bardes. Cataphractus, armatus, tectus, a, um. Cheval bardé. Equus tectus, munitus, armatus.

Dix Pages les suivoient sur des chevaux bardés. P. le M.

On appelle, en termes de Blason, un cheval bardé, lorsqu’il est paré.

BARDES. s. m. pl. Parmi les anciens Gaulois, c’étoient les Chantres, ou Musiciens & Poètes, ou faiseurs de romans, qui chantoient les louanges des Héros. Bardi. Leurs poësies servoient ou à enseigner la vertu, ou quelquefois à encourager, & quelquefois aussi à terminer le différent des armées au moment qu’elles alloient combattre. D’autres Savans qu’on appeloit Vates, nom que les Latins semblent avoir emprunté des Gaulois, étoient occupés des auspices des augures, & des autres espèces de divination. De Remy, Hist. litt. de la France. On a conservé dans la Bretagne beaucoup de mots anciens gaulois. On y appelle encore aujourd’hui Bardes, les joueurs de vièle & de violon, qui vont chanter par les villages. Merc. Dec. 1735. Barde, selon Festus, Hesychius & Strabon, est un chanteur en gaulois. Ils chantoient, dit Feftus, les louanges des grands hommes. M. le Gendre ajoute qu’ils les chantoient au son des musettes ; Strabon, qu’ils étoient aussi poëtes, Βάρδοι μὲν ὑμνηταὶ καὶ ποιηταὶ ; & Lucain dit que leurs vers transmettent la mémoire des grands hommes à la postérité.

Ces divins enchanteurs, de qui les puissans charmes
font revivre un héros abattu sous les armes,
Qui transmettent sa gloire à la postérité,
Et trouvent dans sa mort son immortalité :
Les Bardes entonnant leurs cantiques célèbres,
Rappellent leurs guerriers du milieu des ténèbres.

Brebeuf.

C’est de-là, dit M. le Gendre, dans les Mœurs & Cout. des Fr. p. 262, que venoit la Coutume, qui étoit encore en usage au commencement de la troisième race, de ne point donner de combat que dix ou douze grosses voix n’eussent chanté de toutes leurs forces la chanson dite de Rolland, afin d’animer les troupes par le récit des hauts faits d’armes de ce Héros. Chorier prétend que c’est la terre des Allobroges qui leur a été ouverte presque la première ; que c’est là où ils ont commencé à s’établir, et d’où enfin ils se sont répandus dans toutes les Gaules. Il le prouve, parce qu’encore aujourd’hui les peuples qui habitent à l’occident du Rhône, nomment Bardouz ceux qui habitent au-delà, le long de son rivage oriental qui leur est opposé. C’est croire bien légèrement, que de se rendre à cette preuve. Bardouz n’auroit-il point une