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BAT

c’est partant de son jeu, tomber par le nombre du dé que l’on a amené, sur une dame découverte dans le jeu de celui contre qui l’on joue, c’est-à-dire, sur une dame qui est seule. On bat passage ouvert, ou par passage fermé. Battre par passage ouvert, c’est lorsque par le nombre de l’un de vos dés au moins, vous tombez sur une lame, sur laquelle il n’y a point de dames, ou sur laquelle il n’y en a qu’une. Battre par passage fermé, c’est lorsque les cases sur lesquelles l’un & l’autre nombre de vos dés tombent sont faites, qu’il y a deux dames sur ces lames. On gagne des points au premier cas, & on en perd au second. Voyez le Traité du jeu de Trictrac.

Battre tout d’une, c’est par les deux points des deux dés mis ensemble. L. S. Battre des deux, c’est battre par chacun des deux points en particulier. On peut tout à la fois & d’un même coup battre des deux & battre tout d’une ; par exemple, battre par cinq, battre par quatre, & battre par cinq & quatre.

Battre à faux, ou Jan qui ne peut, se dit d’une dame qui en bat une autre tout d’une par un passage qui n’est pas libre. Je m’explique. Toutes les fois que vos deux points réunis ensemble portent sur une demi-case, & que pour y arriver, chacun de ces deux points porte sur une case complète de votre adversaire, vous battez à faux.

Battre le coin. Pour battre le coin de son adversaire, il faut 1.o Avoir le sien garni : 2.o Que celui de l’adversaire soit vide : 3.o Faire un coup de dés qui porte tout à la fois deux dames dans le coin vide de l’adversaire, sans dégarnir le vôtre. L. S. Le coin battu par simple vaut quatre points ; par doublet il en vaut six. Le même coin peut être battu plusieurs fois. Il n’est pas nécessaire, pour battre le coin, que les deux dames partent d’une même case. Elles peuvent partir de deux indifféremment ; mais quand c’est par doublet, elles partent toujours de la même case. L. S.

Battre, s’emploie aussi figurément en ces autres phrases ; battre froid à quelqu’un, c’est lui faire mauvais accueil, lui témoigner qu’on est mal satisfait de sa visite, de ses discours. Frigidè aliquem excipere. On dit aussi, il l’a battu de cette raison, de cet argument ; pour dire, il lui a fait une telle objection, il l’a convaincu par cette raison. Oppugnare. On dit aussi qu’un homme se bat en retraite ; pour dire, qu’il se retire des affaires, du commerce du monde. Cedere, recedere, valedicere.

Battre, s’emploie proverbialement en ces phrases : ils se battent comme chiens & chats. Cet homme a été battu comme un chien, a été battu comme plâtre, a été battu dos & ventre. On dit, qu’il fait bon battre l’orgueilleux, il ne s’en vante pas. On dit qu’il vaut autant battre sa tête contre un mur ; pour dire, que toute la peine qu’on prendroit à faire quelque chose seroit inutile. On dit aussi en même sens, que c’est battre l’eau, quand on s’amuse à quelque travail où il n’y a rien à profiter. On dit, qu’il faut battre le fer tandis qu’il est chaud ; pour dire, qu’il ne faut pas perdre l’occasion de faire réussir une affaire, quand on la trouve. On dit aussi, à battre faut l’amour ; pour dire, qu’on n’aime jamais les gens qui nous ont battus. On dit aussi, battre le chien devant le lion, ou devant le loup ; pour dire, corriger un Grand, en châtiant un petit devant lui. On dit aussi, c’est la coutume de Lorris, où le battu paye l’amende, quand un homme qui a reçu quelque injure ou dommage d’un autre, est encore réprimandé ou condamné par ses supérieurs. Voy. l’origine de ce proverbe à Coutume. On dit aussi ironiquement à ceux qui disent qu’ils n’ont rien à faire, qu’ils aillent battre le Prevôt, qu’ils gagneront double amende. On dit aussi qu’un homme est battu de l’oiseau ; pour dire, qu’il est rebuté des traverses, des persécutions qu’on lui a faites en une affaire. On dit aussi, se battre à la perche ; pour dire, qu’un homme se met fort en peine d’une chose dont il ne lui revient aucun profit. Je n’ai vu que dans le Dictionnaire comique le proverbe s’en battre les fesses, pour dire, se soucier peu d’une chose, s’en moquer, n’en faire aucun cas.

Mais à ces discours d’ivrognesses,
Le Roi dit : je m’en bats les fesses.

Scarron, Virgile travesti, Liv. 7, pag. 257.

On dit proverbialement encore : il ne fait pas bon battre un homme la veille de sa mort.

BATTU, UE. part. & adj. Il a presque toutes les significations de son verbe battre, en françois & en latin. Ainsi battu signifie ordinairement, frappé, maltraité, outragé, terrassé, défait, vaincu, mis en déroute ; quelquefois aussi frayé, foulé : un Chemin battu ; quelquefois baigné. Une ville battue des flots de la mer. Vaug. Quelquefois secoué, agité :

De cet arbre battu des vents & de l’orage,
Vois le sommet penchant d’un & d’autre côté.

L’Abbé Tétu.

Battu, terme de Marine, se dit d’un vaisseau désemparé & dégréé dans un combat, & qui n’est plus en état de se défendre, quoiqu’il ne soit pas encore rendu.

Battu. Argent battu, ou simplement du battu : c’est en termes de Tireur d’or, ce qu’on appelle autrement des lames, c’est-à-dire, du fil d’argent écrasé & aplati entre deux roues d’acier.

Mais outre tout cela, on dit encore, qu’une personne a les yeux battus, quand ils n’ont plus ni éclat ni vivacité, à cause de quelque indisposition, maladie, manque de sommeil, &c. Liventes, lividi.

Vous me reprochez de tout temps
Que j’ai les yeux battus, & d’une étrange sorte.
Si j’ai les yeux battus, Phylis, que vous importe ?
Ah ! ce n’est pas à vos dépens.

Montreuil.

On dit encore qu’un homme a eu long-temps les oreilles battues d’un tel discours ; pour dire, qu’il a été souvent importuné du même récit.

Battu, en termes de Science hermétique, se dit des esprits, & signifie élevé, fortement poussé par le feu : en ce sens on dit que des esprits battus s’évanouissent facilement.

Battu, est aussi un terme de danse : pas battu dessus & dessous. Voyez Pas.

Battu, se dit aussi des draps, des tapisseries où il y a beaucoup d’or mêlé, & qui sont battues d’or & d’argent. Intextus auro.

On dit proverbialement, autant vaut bien battu que mal battu ; pour dire, que souvent on n’est pas plus puni en Justice, pour avoir donné plusieurs coups, que pour en avoir donné un seul.

☞ BATTUE. s. f. terme de chasse. Assemblée de gens qui battent les bois & les taillis avec grand bruit pour en faire sortir le gibier, les loups, les renards & autres bêtes. Magno strepitu prædam elicere, exigere. Faire une battue.

☞ Faire la Battue, dans les manufactures de soie, c’est fouetter avec un balai dans la bassine pleine d’eau chaude, les cocons afin d’en démêler les brins, & d’en faire le tirage.

BATTURE. s. f. L’action de battre le blé dans l’aire. Tritura. M. Bossuet Evêque de Meaux, dans son Livre de la Politique tirée de l’Ecriture, dit, en parlant de Joachaz : Dieu l’abandonna. Or le Roi de Syrie fit de lui & de son peuple, comme on fait de la poudre que l’on secoue dans la batture. Ce mot n’est pas en usage dans ce sens.

Batture. s. f. Ictus. Coup. Ayant soutenu leurs feux, leurs battures. Montagne. Edit. de Rouen 1742, p. 693. Ce mot n’est plus d’usage en ce sens.

Batture. Terme de Doreur en détrempe. C’est une espèce de dorure qui se fait avec du miel détrempé dans de l’eau de colle & du vinaigre. On ne s’en sert guère que pour faire des réchaux, aux tableaux, & autres ouvrages en détrempe & à fresque, où elle tient lieu de ce qu’on appelle or-couleur dans les peintures à l’huile. On l’appelle autrement dorure à miel, & quelquefois colle à miel.

BATTURES. s. f. pl. Terme de Marine. Ce sont les