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CAM

La coquille des Cames est plus élevée dans son milieu, & elle est convexe dans les deux parties presqu’égales. On distingue les Cames des huîtres, en ce qu’elles sont plus unies dans leur superficie, & souvent peu exactes dans la fermeture des deux écailles, ce que les Naturalistes appellent ore patulo & hianti.

CAMÉADE. s. f. Espèce de Poivre sauvage, dont le grain est d’abord vert, puis rouge, & enfin noir, quand il est sec. On l’appelle quelquefois Bois-gentil, & Poivre des montagnes.

☞ CAMÉE. s. m. Pierre composée de différentes couches, & sculptée en relief. Un beau camée est plus rare qu’une belle pierre taillée en creux. Acad. Fr.

CAMELÉE. s. f. Terme de Botanique. Arbrisseau ligneux, de la hauteur d’une ou deux coudées, qui jette beaucoup de sarmens, & qui se divise en plusieurs branches. Chamelea. Ses feuilles sont longues, semblables à celles de l’olivier, mais plus petites & plus brunes. Ses fleurs sont petites, jaunes, d’une seule feuille coupée en trois parties. Son fruit est à trois noyaux, vert d’abord, ensuite rouge, lorsqu’il est mûr : il est couvert d’une peau qui est d’un goût amer & fort brûlant ; de même que toute la plante. On en tire un suc qu’on mêle avec quelques purgatifs, & qu’on donnoit autrefois dans les hydropisies. On ne s’en sert plus intérieurement.

CAMÉLÉON. s. m. Quelques-uns écrivent CHAMÉ-LION C’est un petit animal fait comme un lézard, excepté qu’il a la tête plus grosse & plus large. Chamæleon. Cet animal habite dans les rochers. Il a quatre pieds, trois doigts à chacun, la queue longue, avec laquelle il s’attache aux branches des arbres, aussi bien qu’avec les pieds. Il a le mouvement lent comme la tortue, mais fort grave. Il y en a en Egypte qui ont jusqu’à onze & douze pouces de long, y compris la queue. Ceux d’Arabie & du Mexique ont six pouces seulement. Sa queue est plate, le museau long. Il a le dos aigu, la peau plissée & hérissée comme une scie depuis le cou jusqu’au dernier nœud de la queue, & une forme de crête sur la tête. Il a la tête sans cou comme les poissons. Il fait des œufs comme les lézards. Son museau est fait en pointe obtuse. Il a deux petites ouvertures dans la tête qui lui servent de narines. Ses deux mâchoires sont jointes par une ligne presque imperceptible. Ses yeux sont gros, & ont plus de cinq lignes de diamètre, dont l’iris est isabelle bordé d’un cercle d’or, quoique Jonston dise qu’elle lui manque. Il n’a point d’oreilles, & ne reçoit ni ne produit aucun son. Sa langue est longue de dix lignes, & large de trois, faite de chair blanche, ronde & aplatie par le bout, où elle est creuse & ouverte, semblable en quelque façon à la trompe d’un éléphant : aussi quelques-uns l’appellent-ils trompe. Il la darde promptement sur les mouches, qui s’y trouvent attrapées comme sur la glu. Elle s’allonge & se retire comme un bas de soie sur la jambe. L’expérience n’a pas confirmé ce que plusieurs Auteurs veulent faire croire, que le Caméléon vit d’air. On a souvent vu celui qui a été apporté à Paris avaler des mouches ; on en a remarqué quantité dans ses excrémens ; & son ventre & ses intestins ont été trouvés remplis quand on l’a disséqué. Il a 18 côtes, & son épine a 74 vertèbres, y compris les 50 de sa queue. On trouve dans son ventre des pierres qu’il vide avec ses excrémens. Il devient quelquefois si maigre, qu’on lui compte les côtes, de sorte que Tertullien l’appelle une peau vivante. Elien, Gesner & Aldrovandus disent qu’il se défend du serpent par un fétu qu’il tient dans sa gueule.

Sa couleur ordinaire, quand il est en repos & à l’ombre, est d’un gris bleuâtre. Aristote dit que sa couleur naturelle est le noir. Il y en a aussi de jaunes, & d’autres verts, qui sont plus petits. Quand il est exposé au soleil, ce gris se change en un gris plus brun tirant sur le minime, & ses parties moins éclairées prennent diverses couleurs qui forment des taches de la grandeur de la moitié du doigt, dont il y en a quelques-unes de couleur isabelle. Les grains de sa peau non-éclairés ressemblent aux draps mêlés de plusieurs couleurs. Quelquefois quand on le manie, il paroît marqueté de taches brunes qui tirent sur le vert. Si on l’enveloppe dans du linge, après y avoir été deux ou trois minutes, on l’en retire blanchâtre ; mais cela ne lui arrive pas toujours : il ne prend point la couleur des autres étoffes dans lesquelles on l’enveloppe ; & sa couleur ne change seulement qu’en quelques parties de son corps. Ainsi ce que Théophraste & Plutarque ont dit, qu’il prend toutes les couleurs dont on l’approche, hormis le blanc, ne s’accorde pas avec l’expérience. Monconys dit avoir observé que le Caméléon étant au soleil, paroît vert, quoiqu’il soit en un lieu où il n’y a point d’herbe ; qu’à la chandelle il paroît noir, quoiqu’on le mette sur du papier blanc ; & qu’étant enfermé dans une boîte, il devient jaune & vert : & il soutient qu’il ne prend jamais que ces quatre couleurs. Les uns disent que ce changement de couleur se fait par suffusion, comme Sénèque, d’autres par réflexion, comme Solin ; d’autres par la disposition des particules qui composent sa peau, comme les Cartésiens. Ce que l’on vient de dire est tiré presque entièrement des Mémoires de M. Perrault, qui en a fait des dissections.

Mlle Scudery, dans une Relation qu’elle a publiée de deux Caméléons qui lui furent apportés d’Afrique, assure qu’elle les conserva dix mois, & que pendant tout ce temps-là ils ne prirent rien du tout. On les mettoit au soleil, & à l’air, qui paroît être leur unique aliment : ils changeoient souvent de couleur, sans prendre celle des choses sur lesquelles on les mettoit. On remarquoit seulement quand ils étoient variés, que la couleur sur laquelle ils étoient se mêloit avec les autres, qui par leurs fréquens changemens faisoient un effet agréable. Elle ajoute que c’est un petit animal paresseux, triste & muet, & qui de ses yeux en tient l’un immobile, ou vers le ciel, & l’autre vers la terre.

Ce que la plupart des Auteurs ont dit du Caméléon n’est pas véritable. Pline le fait de la grandeur d’un Crocodile : Panarolus lui arme le dos de pointes pour se défendre de ses ennemis ; & Solin, comme pour le rendre plus effroyable & plus terrible, dit qu’il a toujours la gueule ouverte. Cependant un Caméléon qu’on a disséqué à Paris n’étoit pas en tout plus long d’un pied, quoiqu’il fût des plus grands ; il n’avoit sur le dos aucune apparence de pointes, les apophyses épineuses de ses vertèbres étant même carrées ; & bien loin d’avoir incessamment la gueule ouverte, il l’avoit toujours si bien fermée, pendant qu’il a été vivant, qu’on avoit de la peine à remarquer la séparation de ses lèvres. Marmol, qui dit qu’il en a vu plusieurs, assure que leur queue ressemble à celle d’une taupe ; mais elle n’est pas moins grande que celle d’un rat ou d’une vipère, & elle égale en grandeur presque tout le reste du corps.

Pour ce qui est des parties intérieures de cet animal, Gesner dit qu’il n’y a que les poumons qui soient visibles ; mais il faut qu’il les ait considérées avec bien peu de soin ; car dans le Caméléon qui fut disséqué à Paris, on remarqua distinctement le foie, le cœur, le ventricule, les intestins, qui avoient plus de sept pouces de longueur. Aristote, qui a pris plaisir à décrire le Caméléon, assure qu’il n’a de la chair qu’aux mâchoires & au commencement de la queue ; néanmoins on en remarque encore sur l’épine du dos, sur les jambes de devant, & sur celles de derrière. Il prétend aussi qu’il n’a de sang qu’autour du cœur & des yeux, & cependant on en trouva