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BRE

la côte méridionale qui regarde la France. Tite-Live & Fabius Rusticus lui donnent la figure d’une hache. Quelques Anciens ont cru que cette Île avoit été autrefois jointe à notre continent. Ils prétendent que c’est le sens de ce vers de Virgile,

Et penitus toto divisos orbe Britannos. Ecl. 1, v. 67.

Et Servius l’assure positivement, en expliquant ce vers de Claudien. In Consim. Manlii.v. 51.

Et nostro diducta Britannia mundo.

Et peut-être pourroit-on trouver dans le nom de cette Île de quoi appuyer ce sentiment, comme on le verra ci-après. Quoi qu’il en soit les premiers habitans de la Grande Bretagne furent des Gaulois qui y passerent, ou qui y furent jetés des côtes de Picardie & de Flandres. On ne peut en douter, quand on fait réflexion. 1°. Qu’ils sont appelée Cumeri, & Kombri, & leur langue Kimry, de même que les Gaulois ont été appelés Cimbri, selon la remarque de Cambden. 2°. Que la religion étoit la même dans la Gaule & dans la Grande Bretagne, comme l’a remarqué Tacite ; que l’une & l’autre nation avoit ses Druïdes & ses Bardes, &c. 3°. Que l’ancienne langue des Bretons étoit la même que les langue des Gaulois, comme on peut s’en convaincre dans l’Archæologie Britannique de Lhuyd, a dans Cambden, Britan. p. 12, & suiv. Ce sont apparemment ces premiers habitans de l’Île qui lui donnerent son nom. On dit qu’ils la nommoient Pridain, ou Phridain, & que c’est de-là que s’est fait le mot de Bretagne & de Breton.

Au reste, ce n’est pas la seule Île que nous appelons aujourd’hui Grande Bretagne que l’antiquité a donné ce nom ; toutes les Îles de la mer, qui sont aux environs de la Grande Bretagne, furent appelées îLes Britanniques, comme il paroît par Denys le Géographe, l’Auteur du livre du monde attribué à Aristote, &c. Celle-ci fut cependant appelée par excellence Britannique, Βριταννικής ; Britannia, ou Bretannia, Βρέτανις, Βρετάνια. Elle se nomma aussi Albion. Quelques anciens Auteurs fabuleux prétendent qu’elle fut nommée d’abord Samothée, puis Albion, & enfin Bretagne. Elle avoit ce nom du temps de César, ou Anglois-Saxons, qui donnerent le leur à la partie qu’ils occupèrent, & la firent nomme Engelland, c’est-à-dire, Angleterre, tandis que la partie septentrionale, s’qppeloit Ecosse, du nom d’un peuple Irlandois qui s’y étoit établi. On a repris ce nom de Bretagne dans ces derniers siècles. Jacques I, qui avoit réuni les deux couronnes d’Angleterre & d’Ecosse en sa personne, projettoit aussi la réunion des deux Royaumes, & fit même battre des médailles à ce sujet, dont les Légendes étoient : Quæ Deus conjunxit, nemo separet : Et, Faciam eos in Gentem unam : &, Tueatur unita Deus ; &, Henricus rosas, regna Jacobus, par allusion à Henri VII, qui avoit réuni les deux factions de la rose blanche & de la rose rouge, en réunissant par son mariage avec Elizabeth fille d’Edouard IV, les droits des maisons de Lancastre & d’Yorck. Cependant Jacques ne put venir à bout de son dessin, auquel les Parlemens d’Angleterre & d’Ecosse s’opposerent également. Enfin, la Reine Anne l’a exécuté, en ne faisant qu’un Royaume des deux, & ordonnant qu’on l’appelât Grande Bretagne. Ainsi l’on a rappelé l’ancien nom, de l’étymologie & de la signification duquel on ne convient pas.

Un certain Galfredus Aturius, qui sous Henri II, donna une Histoire Britannique qu’il avoit tirée, disoit-il, des anciens Auteurs Bretons, prétendit que Brutus Troien, fils de Sylvius, petit-fils d’Ascanius, & arrière petit-fils d’Enée, après bien des avantures romanesques, étoit passé dans l’Île dont nous parlons, habitée pour-lors par des géans, & lui avoit donné son nom. Le Chevalier Thomas Eliot le titre du nom grec πρυτάνια, qui signifioit chez les Atheniens, les revenus publics de la République. Humfroy Lhuyd veut que ce mot soit formé de Pridcain, qui signifie fort blanche. Cela reviendroit au nom Albion que les Grecs lui donnerent. Ainsi ce n’auroit été qu’une interprétation du nom propre ; & ce qui pourroit appuyer ce sentiment, c’est qu’on en a usé de même en d’autres noms semblables, comme en celui d’Aquitaine, appelée par les Gaulois Armorique, ainsi qu’on le peut voir au mot Aquitaine. Mais Cabden prétend que cette étymologie est dure, & que cain, blanc, a passé, du latin candidus, dans l’anglois, & qu’il ne vient pas de plus loin. Pomponius Gallus dit que ce sont les Bretons de Gaule, ou les Armoriques, qui ont porté ce nom en Angleterre ; Goropius Becanus, que les Danois qui s’y établirent lui donnerent le nom Bridanium, qui signifie Libera Dania, & que de-là s’est fait Britania. D’autres tirent ce nom de Prutenia, la Prusse ; Bodin de Bretta, espagnol, quisignifie terre ; d’autres de Britin ; qui dans l’Athénée s’est dit pour signifier un port ; d’autres des Brutiens, peuples d’Italie, & quelques-uns du mot latin brutus, brutal, à cause des mœurs sauvages & barbares des habitans de cette Île. Cambden réfute toutes ces opinions. Bochart, qui rapporte tout aux Phéniciens, prétend que ce nom est phénicien, formé de ברת, terre, & אנה, étain, dont les mines qui sont en Angleterre donnèrent le nom à toute l’Île ; que les Bretons sont des colonies de Phéniciens, ou de Chananéens, que Josué chassa de leur pays, & qui se répandirent en Espagne, en Gaule, & en Angleterre plus de 300 ans avant le temps où l’on place le Brutus dont nous avons parlé. On pourroit dire que ce nom, pridain, venoit de פרד, separavit, disjunxit, pour marquer que cette terre a été séparée de notre continent. Cambden croit que Britannia vient de Brit, qui signifie peint, parce que ces peuples avoient coutume de se peindre le corps, pour se rendre, disent quelques-uns, plus effroyables dans les combats.

On ne sut que l’Angleterre étoit une Île que sous Domitien, & sur la fin du gouvernement d’Agricola, par une aventure que Tacite & Dion racontent. M. Jhuyd a fait un recueil de toutes les Grammaires & Dictionnaires de l’ancien breton , ou du bas-breton, qui ont rapport à l’ancien-breton, qu’il a intitulé Archæologia Britannica. On trouve beaucoup de choses curieuses & savantes sur l’ancienne Bretagne dans la Britannia de Cambden ; cet ouvrage a été traduit en anglois, & augmenté par Edmond Gibson, & cette traduction fut imprimée à Londres en 1695. Les Reliquiæ Cambdenianæ est aussi un bon livre, imprimé à Londres en 1637, dans lequel il y a des remarques curieuses touchant le langage des anciens Bretons. Pitsæus, Balæus, Wood, & en dernier lieu Nicholson, ont donné des listes & bibliothéques des Ecrivains de leur nation, tant anciens que modernes. M. Blair, Médecin Ecossois, a fait un ouvrage intitulé, Pharmaco Botanologia, ou Histoire complette des plantes médecinales de la Grande Bretagne.

Les Îles de la Grande Bretagne. Insulæ Britannicæ. Ce sont des Îles d’Europe, situées entre le 50, & le 61, ou 62° degré de latitude septentrionale, & entre le 9e & le 23e degré de longitude. On les divise en cinq parties 1°. La Grande Bretagne, dont nous avons parlé. 2°. L’Irlande. 3°. Les Sorlingues. 4°. Les Hébudes, ou Inch Galles, ou Westernes. 5°. les Orcades, auxquelles on joint les Schetlandiques. Toutes ces Îles dépendent aujourd’hui du Roi de la Grande Bretagne. Maty.

La nouvelle Bretagne. Grand pays de l’Amérique septentrionale au nord du Canade. Nova Bri-.

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