Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/746

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
738
COM

☞ Quoi qu’il en soit, Duguesclin employa ces Troupes contre Pierre le Cruel, souillé du meurtre de son frère, & de celui de Blanche de Bourbon sa femme, belle-sœur de Charles V ; le vainquit, & mit sur le trône de Henri de Transtamare. Ses Compagnies périrent presque toutes, ou se dissipèrent dans cette expédition, & l’on n’en entendit plus parler en France.

Compagnie, en termes de Chasse, se dit des bêtes qui vont en troupe, comme des sangliers qui vont ensemble. Grex. Sur-tout on appelle un sanglier d’un an jusqu’à deux, bêtes de compagnie ; & l’on dit qu’à deux ans il sort de compagnie, c’est-à-dire, qu’il commence à aller seul. Et en général on appelle Compagnie, une troupe de bêtes noires. A l’égard des bêtes fauves, on l’appelle harde. On dit aussi, une compagnie de perdrix, en parlant de celles qui vont ensemble. On appelle aussi des chevaux de louage, de Chasse-marée, de Messagers, qui sont si accoutumés d’aller ensemble, qu’on a de la peine à les séparer, des bêtes de Compagnie.

☞ On dit proverbialement, qu’il vaut mieux être seul qu’en mauvaise compagnie. On dit aussi, fausser compagnie, ou jouer à la fausse compagnie ; pour dire, quitter un parti, trahir ceux avec qui on est associé ; & quitter une compagnie où l’on étoit engagé, ou manquer de s’y trouver. On dit, en termes de raillerie, qu’un homme est bête de compagnie ; pour dire, qu’il aime la société, & qu’on n’a pas de peine à le mener où l’on veut ; ce qui se dit, par allusion à certaines bêtes qui vont en troupe, & qu’on appelle pour cet effet, en termes de Chasse, bêtes de compagnie. Voyez l’article qui précède.

Compagnie (de Navires.) Terme de Marine, se dit d’un certain nombre de vaisseaux qui s’attendent les uns les autres pour faire route ensemble, & se défendre réciproquement pendant le voyage. C’est ce qu’on appelle, sur la mer du Levant, Conserve, aller de conserve. Voyez ce mot.

De Compagnie. Sorte de phrase adverbiale. Ensemble. Simul, unà. Deux flûtes qui venoient de compagnie, ne pouvant soûtenir la furie des ondes, furent submergées l’une après l’autre. Bouh. Nous irons de compagnie, c’est-à-dire, ensemble, l’un avec l’autre.

☞ COMPAGNON se dit généralement de celui qui en accompagne un autre, soit en voyage, soit dans un travail, soit dans quelqu’action ou circonstance. Socius, comes.

☞ On appeloit autrefois compagnons d’armes les Chevaliers qui se promettoient réciproquement de se secourir, & de ne se point quitter. Commilito.

☞ COMPAGNON de fortune. Celui qui court les mêmes risques, qui est intéressé dans la même fortune. Les Aventures d’Usysse & de ses compagnons sont racontées dans l’Odyssée d’Homère.

Est-ce Apollon, & Neptune,
Qui sur ces rocs sourcilleux
Ont, compagnons de fortune,
Bâti ces murs orgueilleux ? Boil.

Les Capitaines disent à leurs Soldats, pour les exciter à les suivre en quelqu’expédition, courage, Compagnons.

COMPAGNON est un terme propre au Corps des Chevaux-légers, & à celui des Gendarmes de la Garde. Lorsque les Officiers des Chevaux-légers écrivent à un Chevau-léger, ils mettent, Monsieur, mon compagnon : ce que font aussi les Officiers des Gendarmes. Commilito.

On dit en Médecine, que le lait ne veut point de compagnon, pour dire, que quand on ordonne le lait par médecine à un malade, il ne faut point lui donner d’autre aliment. On dit aussi en Morale, que l’ambition & l’amour ne veulent point de compagnon.

Compagnon d’étude, Condiscipulus ; de débauche, compator ; de jeu, collusor.

☞ COMPAGNONS, en parlant des Religieux. Ceux qui habitent ou qui marchent ensemble. Contubernalis, socius. Un moine dans certains Ordres ne doit point sortir de son Couvent sans que son Supérieur lui donne un compagnon. Quand on nomme un Prieur Régulier à un Bénéfice dépendant d’un Ordre, on lui donne quelquefois un ou plusieurs compagnons pour habiter avec lui.

Compagnon, signifie aussi celui qui est dans une même charge, & sur-tout quand il n’y en a que deux. Dioclétien avoit Maximien pour son compagnon, son associé à l’Empire. Collègue vaut mieux. Collega. On dit des Consuls, Jurats, Présidens en même Chambre, que ce sont des compagnons d’Office. On le dit aussi des Offices de nouvelle création, de même nature. On a donné des compagnons à ces Officiers, on a créé des alternatifs & triennaux.

☞ On dit qu’un homme ne peut souffrir ni compagnon ni maître. On dit de même, traiter de pair à compagnon. Dans ces phrases, compagnon signifie égal.

Compagnon signifie, particulièrement dans les Arts, celui qui a fait son apprentissage en quelque métier, & qui n’ayant pas moyen de se faire passer Maître, va travailler chez les autres, soit à la journée, soit à ses pièces. Operarius, mercenarius, conductitius. C’est un compagnon Tailleur, Maréchal, Charpentier, &c.

On appelle compagnons de rivière, ceux qui travaillent sur les ports à charger, décharger & à serrer les marchandises. On appelle sur Mer compagnons de Marine, les Matelots de l’Equipage. Convictores.

Compagnon est aussi une épithète ou qualité qu’on donne sur tout aux jeunes gens en différentes occasions. Ce soldat est un brave, un hardi compagnon. Ce Financier étoit, il y a dix ans, un pauvre gueux, un fort petit compagnon. Vous avez été autrefois un bon compagnon. Mol. On dit aussi, qu’un homme fait le compagnon, lorsqu’il est glorieux, insolent, qu’il parle ou agit autrement, que ne souffre sa condition. Qui a compagnon, a maître ; c’est-à-dire, que quand on est associé avec quelqu’un, on ne peut rien faire sans son consentement. On dit aussi qu’un homme se bat en duel à dépêche compagnon ; pour dire, à outrance, & à qui aura plutôt tué son homme.

On dit, travailler à dépêche-compagnon ; pour dire, travailler vîte & diligemment, ne chercher qu’à finir, sans se mettre en peine de la perfection de l’ouvrage. Acad. Fr.

Ce mot, à ce que dit Henri Etienne, vient d’un vieux mot gaulois, benna, qui étoit une espèce de charriot dont parle Festus. Ceux qui étoient ensemble dans ce même charriot, s’appeloient, combennons, quasi in eâdem bennâ sedentes, & depuis, par le changement assez ordinaire du b en p, on a dit compennon ; ensuite on a dit compaignons, & à la fin compagnons. Nicod & Ménage, après Pasquier, le dérivent de compain ; comme qui diroit, qui mange de même pain, qui se dit encore en langage Picard. Quelques-uns l’ont dérivé de compagnus. Il y a plus d’apparence qu’il vient de compagnun, vieux mot celtique ou bas-breton, qui signifie la même chose.

Compagnons. Ce mot au pluriel signifie une sorte de fleur qui ressemble à l’œillet, si ce n’est qu’elle est beaucoup plus petite, & que sa tige est beaucoup plus basse. On les appelle compagnons, parce qu’ils viennent par touffe, en sorte que plusieurs ne semblent composer qu’un seul bouquet.

COMPAGNONAGE. s. m. Ce terme est en usage dans quelques Communautés des arts & métiers, pour signifier le temps que les Apprentis sont obligés de servir les Maîtres en qualité de compagnons, avant que de pouvoir aspirer à la maîtrise.

Compagnonage. Assemblée que font entr’eux des compagnons de métier. Sodalitas. Il y avoit autrefois à Paris parmi les compagnons de chaque métier, certaines maximes exécrables & sacrilèges, qu’on appeloit vulgairement compagnonage, d’autant plus dangereuses, qu’elles étoient cachée sous le voile