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surnommé le Docteur décisif, ou le Docteur résolu, Doctor resolutus. Ce mot appliqué aux personnes se prend rarement en bonne part.

DÉCISION. s. f. Loi d’un Supérieur qu’on doit suivre. Decisio. Les décisions de l’Eglise sont les règles de notre croyance. Les décisions du droit sont les fondemens de la Jurisprudence. Les décisions de l’Empereur Justinien sont les 50 Ordonnances qu’il fit après la publication du premier Code, pour décider les grandes contestations qu’il y avoit entre les Jurisconsultes.

Décision, se dit quelquefois des avis, des résolutions, des autorités des Savans qui aident aux Juges à décider. Les décisions de la Rote sont les arrêts de la Jurisdiction établie à Rome. Les décisions de Boëtius, & d’autres Jurisconsultes. Le Parlement a déjà fait la décision de notre affaire par un arrêt rendu sur la même espèce.

Décision, se dit aussi de certains préjugés, ou avantages qu’on tire dans quelque affaire par quelque incident qu’il y survient. Cet arrêt interlocutoire est la décision de mon procès. Ce titre, que le hasard m’a fait trouver, est la décision de notre différent. Ce coup doit faire la décision de la partie. Du succès de cette querelle dépendoit la décision de tout ce qu’il y avoit de différens à vider. Vaug.

☞ Ce mot considéré comme synonyme de résolution, désigne un acte de l’esprit qui se déclare après avoir examiné une affaire. Il est rare que les décisions aient chez les femmes d’autre fondement que l’imagination & le cœur.

Décision, résolution. La décision, dit M. l’Abbé Girard, est un acte de l’esprit, & suppose l’examen. La résolution est un acte de la volonté, & suppose la délibération. La première attaque le doute, & fait qu’on se déclare. La seconde attaque l’incertitude, & fait qu’on se détermine. Nos décisions doivent être justes, pour éviter le repentir. Nos résolutions doivent être fermes, pour éviter les variations.

☞ Il semble que la résolution emporte la décision, & que celle-ci puisse être abandonnée de l’autre ; puisqu’il arrive quelquefois qu’on n’est pas encore résolu à entreprendre une chose pour laquelle on a déjà décidé ; la crainte, la timidité, ou quelque autre motif s’opposant à l’exécution de l’arrêt prononcé.

☞ En fait de science, on dit la décision d’une question, & la résolution d’une difficulté. C’est ordinairement dans les endroits où l’on décide le plus qu’on prouve le moins. Dans les Ecoles on répond à toutes les difficultés, & on y en résout très-peu.

DÉCISIONNAIRE. s. m. Qui décide avec assurance. Je me trouvai l’autre jour dans une compagnie, où je vis un homme bien content de lui. Dans un quart-d’heure il décida trois questions de morale, quatre problêmes historiques, & cinq points de physique : je n’ai jamais vu un décisionnaire si universel : son esprit ne fut jamais suspendu par le moindre doute. Lettr. Pers.

DÉCISIVEMENT. adv. D’une manière décisive. Il n’est pas rare de trouver des ignorans qui parlent décisivement sur une affaire. Les gens de Cour prétendent juger décisivement de la délicatesse des plaisirs, S. Evr. Le Duc de Créqui eut ordre de parler décisivement au Nonce, tant sur l’affaire de Castres, que sur les autres points dont, &c. L’Abbé Regn.

DÉCISOIRE. adj. m. Se dit seulement au Palais, du serment d’une partie qui décide le différent. Decretorius. La partie s’en est rapportée au ferment dédisoire du défendeur.

DECIUS. s. m. Nom d’homme. Decius. Il faut conserver ce nom, comme nous l’avons dit, excepté pour l’Empereur Dèce. Les Decius étoient une famille plébéienne, mais considérable dans Rome, & qui donna plusieurs Consuls à la République.

DÉCIZE. Ville de France, dans le Nivernois. Decetia, Dececia. Elle est située dans une île à l’embouchure de la rivière d’Atron, dans la Loire. On a trouvé dans Décize plusieurs médailles Romaines, qui font connoître qu’il est ancien. On prononce communément Dzize.

DÉCIZELER. v. a. Terme des Eaux & forêts. On fait décizeler & empiler les bois qui ont été enfoncés dans l’eau.

DECKENDORFF, ou TECKINDORFF. Ville d’Allemagne, dans la Basse-Bavière, à une bonne portée de fusil du Danube.

DÉCLAIRER. v. a. Mot de la façon de Marot. Déclarer. Declarare.

Voix argentine, haute & claire,
Ta bonne grâce me déclaire
Que tu ne chantes pas sans art. Marot.

La rime l’a porté à faire ce mot pour déclarer.

☞ DÉCLAMATEUR. s. m. Qui déclame, qui prononce un discours, un ouvrage, qui récite en public. Declamator. C’est un excellent, un mauvais déclamateur. Ce mot n’a rapport qu’au ton & aux gestes. Bon déclamateur, qui prononce avec les tons. & les gestes convenables.

☞ Chez les Romains on appeloit déclamateurs, les Rhéteurs qui faisoient des exercices d’éloquence dans leurs écoles.

☞ Nous appelons aussi déclamateur, un Orateur plus occupé du choix des paroles, du ton & des gestes, que des pensées & de la composition. Dans ce sens il se prend toujours en mauvaise part. Cet Avocat n’est qu’un déclamateur. Juvénal s’emporte fort contre les déclamateurs de son temps. Juvénal n’est lui même dans ses satyres qu’un déclamateur. God. Lucien a cela des déclamateurs, qu’il veut tout dire, & qu’il ne finit pas toujours où il faut. Ablanc. La plupart des déclamateurs se persuadent qu’il est de l’essence d’un beau discours de durer plus d’une heure, & qu’on est obligé de les écouter sans s’ennuyer. S. Evr. Les déclamateurs ont été les premiers corrupteurs de l’éloquence. Id. Un déclamateur n’est pas obligé d’alléguer un argument démonstratif, mais seulement un raisonnement vraisemblable, ou éblouissant. Jusqu’à ce qu’il revienne un homme qui prêche avec un style nourri des Saintes Ecritures, les Déclamateurs seront suivis. La Bruy. On ne sauroit assez blâmer ces Historiens qui veulent faire les Déclamateurs, & qui interrompent le cours de la narration pour faire valoir leur éloquence. Fléch.

Tous ces pompeux amas d’expressions frivoles
Sont d’un Déclamateur amoureux de paroles. Boil.

On appelle style de Déclamateur, un style plus figuré & plus ampoulé qu’il ne convient au sujet. Acad. Fr.

DÉCLAMATION. s. f. Discours fait pour être prononcé en public, & sur le ton d’Orateur. Declamatio. Les déclamations de Quintilien. Il se dit particulièrement de ces exercices & déclamations qui se font par les écoliers pour apprendre à parler en public. Une Déclamation contre Annibal, contre Pyrrhus, &c. La déclamation parmi les Grecs étoit devenue un art de parler indistinctement sur toutes sortes de matières, de faire paroître juste ce qui étoit injuste, & de triompher des meilleures raisons. Ce genre de déclamations étoit très-propre à corrompre les esprits, en les accoutumant à cultiver l’imagination, plutôt qu’à former le jugement, & à chercher plutôt des vraisemblances pour éblouir, que de solides raisons pour persuader. S. Evr. Les déclamations n’ont été introduites que pour exercer l’esprit des jeunes gens sur des sujets qui puissent tomber dans l’usage ordinaire. S. Evr.

Déclamation. Dans quelques Collèges signifie une petite pièce de Théâtre, composée ordinairement de quelques scènes seulement, sans distinction ni pluralité d’actes, qui se fait pour exercer les écoliers, & les former à parler en public. Declamatio.