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DEF

☞ On le dit aussi des noms qui manquent de quelque nombre ou de quelque cas.

☞ DÉFECTION. s. f. Abandonnement d’un parti auquel on est lié, ou des intérêts d’une personne à laquelle on est attaché. Ce mot est formé du latin deficio, je manque. Défection des sujets qui abandonnent leur Souverain. Défection des soldats qui abandonnent leur Général. Défection des alliés qui abandonnent leurs alliés. Defectio. Le Roi eut la douleur d’apprendre la défection de tous ses sujets Boss.

Défection, se dit aussi en Astrologie pour éclipse. La défection de la lune, du soleil. Defectus, deliquium solis, lunæ.

Défection, se dit figurément en ce dernier sens. On répand avec affectation une prétendue prophétie du Cardinal de Cusa, qui marque la défection de l’Eglise pour les premières années du siècle où nous sommes. Mém. de Tr. La défection de l’Eglise est chimérique. Les promesses de J. C. be sauroient manquer. Les portes de l’Enfer ne prévaudront jamais contr’elle. D’où conclut-il la défection du Pape ? C’est du reniement de Saint Pierre. N’a-t-il pas vu que Saint Pierre n’étoit qu’un particulier, quand il commit ce crime ? J. C. vivant encore sur la terre gouvernoit son Eglise par lui-même. Saint Pierre n’en fut le chef qu’après la mort du Sauveur. Mais devenu un autre homme, c’est lui qui affermit la foi des Apôtres sur la résurrection du fils de Dieu. Mém. de Trev.

DÉFECTUEUSEMENT. adv. D’une manière défectueuse.

DÉFECTUEUX, euse. adj. Ce qui a quelques défauts, ce qui manque des conditions réquises. Vitiosus. Un livre défectueux : un verbe défectueux. Les définitions d’Aristote sont très-défectueuses. Marchandises défectueuses.

On le dit dans ce sens en style de Pratique. Un testament est défectueux quand si n’est pas revêtu de toutes ses solemnités. Un acte est défectueux, lorsqu’il est imparfait, ou qu’il contient des clauses vicieuses.

☞ DÉFECTUOSITÉ. s. f. Terme qui exprime quelque chose qui n’est pas mal par lui-même, mais uniquement par rapport au but de la chose ou au service qu’on s’en propose. La roture est en France une défectuosité qui prive les sujets de beaucoup de places brillantes, dont ils seroient néanmoins capables, comme la noblesse en est une en Suisse qui empêche d’avoir part au gouvernement. Voyez défaut. C’est une défectuosité dans un contrat, de n’être point paraphé en toutes ses apostilles. Un Auteur moderne se plaint des défectuosités de l’Histoire Ecclésiastique Anglo-Saxone de Bède. Larrey.

DÉFENDANT. s. m. Nom d’un Saint de France. Defendens. Voyez M. Chastelain, Martyr. au 2 de Janvier, p. 36. & 43.

DÉFENDEUR. s. m. Défenderesse. s. f. Terme de Palais. Celui qui est ajourné par devant le Juge, pour être condamné aux fins & conclusions du demandeur, lequel fournit des défenses pour être déchargé de la demande qui est intentée contre lui. Reus, rea. Le défendeur est opposé au demandeur. Souvent dans la poursuite d’une affaire le demandeur est aussi défendeur, & le défendeur devient demandeur. Défendeur en requête civile, est celui qui soutient le jugement qui a été rendu contre celui qui a obtenu des lettres pour faire remettre les choses en l’état qu’elles étoient auparavant. Défendeur en la forme, & demandeur au fond, ou bien demandeur en l’une, & défendeur en l’autre, se dit lorsqu’il s’agit non-seulement de la chose qui a donné occasion à la contestation, mais encore de la validité de la procédure. Défendeur originaire, est celui lequel après avoir été assigné, demande un délai pour appeler un garant. En matière criminelle, on dit défendeur & accusé.

DÉFENDRE, v. a. Je défens, je défendis, j’ai défendu, je défendrai, que je défende. Mettre quelqu’un ou quelque chose à couvert du mal qu’on veut lui faire, en répoussant les attaques, en s’opposant à ce qu’on fait, à ce qu’on dit. Ce terme ne dit point précisément la même chose que protéger & soutenir. On est protégé par les autres, par ceux qui ont de la puissance. On peut être défendu par ses égaux, par ses inférieurs : on se défend soi-même. Défendre annonce une action plus marquée que soutenir. Voy. ces mots. Il est du droit naturel de défendre la personne, son honneur & les biens, contre toutes sortes d’agresseurs. Ce Cavalier s’est bien défendu, il a vendu bien cher sa vie. Celui qui tue par la nécessité de se défendre n’est point punissable, il y a une entière impunité pour les homicides involontaires. S. Evr.

Défendre, se dit, dans le même sens à la guerre, quand on est commis pour garder, pour conserver un poste, une place pour répousser les attaques, s’opposer à ceux qui veulent s’en rendre maîtres. Ce Gouverneur a acquis beaucoup de gloire à défendre cette ville. Cette garnison s’est mal défendue, a capitulé trop tôt. Après avoir chassé les ennemis de la contrescarpe, qui ne la défendirent qu’à coups de mousquet. Bussi Rab.

Défendre, signifie aussi Flanquer. Le flanc défend la courtine, & la face du bastion opposé. Cette demi-lune flanque, défend cet ouvrage à cornes, à couronne. Les fortifications anciennes sont aisées à enlever, elles ne sont défendues de rien, il n’y a rien qui les flanque. Défendre a aussi sa signification propre en ces occasions, & quand on dit que le flanc défend la courtine, on entend que non seulement il est à côté, mais aussi qu’il en empêche les approches ; c’est-à-dire que ceux qui sont placés sur le flanc d’un bastion découvrent ceux qui attaquent la courtine, peuvent les tuer, les empêcher d’en approcher.

Défendre, avec le datif du nom de la chose, se dit, en style barbare du Palais, pour signifier, Fournit des défenses, donner des réponses aux demandes, aux productions de sa partie. Respondere, confutare. Il n’a pu se dispenser de procéder avec lui seul, & de défendre aux demandes qui avoient trait à cette succession. Brousse. Il a été condamné faute de défendre. Voyez défaut.

Défendre, se dit aussi en toutes sortes d’autres contestations. Propugnare. Socrate prend tous les partis que l’on veut, soit pour défendre, soit pour attaquer. S. Evr. Ce Bachelier a bien défendu ses thèses, & repondu à toutes les objections qu’on lui a faites. Il ne s’est pas trop défendu de cette galanterie, il en demeure tacitement d’accord. J’ai fait ce que j’ai pu pour me défendre de cette commission, pour m’en exempter. Cette marchandise est bonne, il n’y a qu’à se défendre du prix, disputer sur le prix. De pretio pugnare.

Défendre, signifie encore employer son crédit, son autorité, son éloquence, pour soutenir les droits ou l’innocence de quelqu’un. Tueri, defendere, tutari. Vous avez bien défendu mes intérêts. César opprima la liberté publique que défendoit Pompée. Bouh. La colère est comme une tutrice que la nature a donnée à l’homme pour la conservation de ses droits : elle lui donne le désir & la force de les défendre. M. Esp. Cicéron défendit Milon, qu’il ne put justifier. Défendre suppose seulement le désir de réussir.

Défendre, signifie encore, se parer, se garantir. Tutari, defendere, tueri ab aliquâ re. Il faut bien se vêtir en hiver pour se défendre du froid. Les femmes portent des masques pour se défendre du hâle. Les chevaux ont bien du mal à se défendre des mouches en automne. On met des rideaux aux fenêtres pour se défendre du grand jour. Cette colline défend ma maison du mauvais vent.

On dit, sur la mer, défend du Sud, défend du Nord, lorsqu’on commande au Timonier de ne pas gouverner de côté-là.