Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, III.djvu/223

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
215
DEM

Demoiselle, Espèce de jambier qui soutient le cheval dont se servent les Scieurs de long.

Demoiselle, en termes de Monnoies, espèce de verge fer ou espadon, qui sert à empêcher que les charbons ne coulent, avec la matière, de la cuillier dans les moules. Encyc.

DEMOISELLE DE NUMIDIE. ou POULE DE NUMIDIE. C’est un oiseau rare d’un plumage gris plombé, qui a des plumes élevées en forme de crête, longues d’un pouce & demi ; mais les côtés de cette crête & le derrière sont garnis de plumes noires & plus courtes. Au coin de chaque œil elle a un trait de plumes blanches qui passant sous l’appendice, lui forme de grandes oreilles de plumes, faites de fibres longues & déliées, comme celle que les aigrettes ont sur le dos. Le devant de son cou a des plumes noires encore plus déliées que celles de l’aigrette, qui lui pendent sur l’estomac. Ses jambes sont couvertes de grandes écailles par devant & de petites par derrière. Ses ongles sont noirs & médiocrement crochus. La plante du pied est grenée comme du chagrin. On croit que c’est le même oiseau que les Anciens ont nommé scops, & les Grecs ὠτίς, qu’Aristote a nommé bateleur, danseur & comédien, & Pline parasite, & baladin ; & on l’a appelé en François demoiselle, parce qu’il semble qu’il imite les gestes d’une femme qui affecte d’avoir de la grace dans son marcher, dans ses révérences & dans sa danse. Athénée le nommoit anthropoeide ; c’est-à-dire, ayant forme humaine, à cause qu’il imite ce qu’il voit faire aux hommes, & il rapporte la manière dont Xénophon dit que les Chasseurs prennent ces sortes d’oiseaux. Ils font semblant en leur présence de se laver les yeux, & au lieu de bassins pleins d’eau, ils en laissent qui sont pleins de glu. Les demoiselles s’approchent de ces bassins, & se collent es pieds & les yeux avec la glu, en imitant les gestes qu’elles ont vu faire aux hommes. On en a nourri dans la Ménagerie de Versailles.

DEMOISELLE. s. f. Espèce de petit insecte. C’est un ver, en forme de nymphe, qui a deux yeux si gros, qu’ils font presque toute sa tête & quatre ailes admirables qui le font tourner avec une grande vîtesse ; parce qu’il prend sa proie en l’air. Il a deux dents renfermées en dedans avec lesquelles il pince très-fort. L’accouplement de ces insectes, se fait, d’une façon bien singulière, en l’air en volant, & en faisant des cabrioles, l’extrémité de la queue de la femelle se courbant vers le milieu du corps du mâle où sa verge est située, & la recevant ensuite dans l’extrémité de sa queue. Cet insecte a aussi deux cornes, & il jette dans l’eau ses œufs, qui ressemblent à ceux des poissons d’où l’on voit sortir une infinité de vers à six pieds. Il s’en forme ensuite un ver volant, qui étoit auparavant rampant & nageant. Chacune de ses six jambes est composée de six parties velues par-tout, dont l’extrémité est armée de deux ongles ou serres. Le ventre se divise en dix anneaux. Du lieu où la poitrine s’unit avec le ventre, sortent quatre boutons qui s’enflent, & renferment ses ailes comme les boutons des plantes contiennent les fleurs. Les Latins l’appellent libella, ou perla. Swammerdam en distingue de dix-sept sortes, & dit que Rondelet mal-à propos l’a nommée cigale d’eau ou cicada aquatica ; au lieu d’une sauterelle d’eau, locusta aquatica, dont parle Moufet. Jonston l’appelle forficula aquatica, qui est ce que Moufet appelle puce d’eau, ou pulex marinus. C’est aussi ce que M. Rédi appelle scorpion aquatique. M. Hombery, pensionnaire de l’Académie Royale des Sciences, a donné des observations sur cette sorte d’insecte, dans l’Histoire de l’Académie de l’Année 1699. On trouve dans le Mercure de Juin 1735. 2e. vol. que suivant l’opinion des Naturalistes, cet animal prend naissance dans le fonds des eaux, enveloppé d’une seule membrane ; qu’il dilate son ventre pour faire entrer l’eau dans l’intestin par l’anus ; qu’ensuite il comprime son ventre pour en chasser l’eau assez loin, aussi par l’anus, qu’il fait rentrer l’eau dans son intestin pour la rejeter comme la première fois, recommençant & continuant si long-temps ce petit jeu qu’il fait circuler l’eau dans un bassin avec assez de vîtesse.

Il y a une espèce de poires qu’on appelle poire de Demoiselle ; ou autrement poire de vigne ; & que mal-à-propos on nomme en quelques endroits Petit-vin. La Quint. Voyez au mot Vigne.

DÉMOLIR. v. a. Abattre, détruire, quelque ouvrage d’Architecture ou de maçonnerie. Demoliri, destruere, diruere. Il a été accordé qu’une telle place, qu’un tel château seroient démolis. Le temps détruit, démolit les édifices les plus solides. Le canon vient à bout de démolir les plus fortes murailles. Lorsque Montgommeri eut blessé Henri II. Catherine de Médicis fit démolir les Tournelles, au lieu desquelles on a bâti la Place Royale. Colon.

Démolir, ne se dit que des bâtimens, & des ouvrages de fortification. Ce mot ne présente que l’idée générale de destruction. Raser, démanteler, faire sauter y ajoutent des idées particulières. Voyez ces mots.

Démoli, ie. part. Destructus, eversus. On a pour les grands hommes après leur chûte les mêmes égards que pour les temples démolis, dont on révère jusqu’aux ruines. Bouh.

DÉMOLITION. s. f. Ruine, destruction d’un bâtiment. Demolitio, eversio. Quand on a bâti contre les réglemens, le Maître des œuvres ordonne la démolition de l’ouvrage. On travaille à la démolition de cette citadelle, de ce temple d’Hérétiques.

Démolition, se dit aussi des matériaux qui restent quand on a abattu quelque maison, comme plâtras, bois, plomb, fer, &c. Rudera, ruinæ. On a tant vendu les démolitions de cette tour. Il faut enlever les démolitions, les décombres de ce bâtiment. Les démolitions ont comblé le fossé de cette place. Cette maison qui paroît neuve n’est bâtie que de démolitions. Il avoit ordonné aux Babyloniens d’emporter les démolitions du temple. Ab.

DÉMON. s. m. Les Anciens ont appelé ainsi certains Esprits ou Génies, qui apparoissent aux hommes, tantôt pour leur servir, tantôt pour nuire. Dæmon, malus dæmon. On prétend que Socrate avoit un Démon familier, un Génie particulier. Le Spectre qui apparut à Brutus étoit un mauvais Démon qui l’épouvanta. Cardan se vantoit d’avoir commerce avec des Démons, au rapport de Jérôme Cardan son fils. La première idée des Démons est venue de Chaldée. De-là elle s’est répandue chez les Perses, les Egyptiens & les Grecs. Pythagore & Thalès de Milet sont les premiers qui ont apporté la connoissance des Démons dans la Grèce. Platon s’en est expliqué plus distinctement que les autres Philosophes. Il entendoit par-là des esprits inférieurs aux Dieux ; mais supérieurs aux hommes. Platon appeloit Démons, des Esprits familiers qui habitoient la moyenne région de l’air, & entretenoient la communication entre les Dieux & les hommes, en portant aux Dieux les offrandes des hommes, & en annonçant aux hommes la volonté des Dieux. Il n’en admettoit que de bons & de bienfaisans : mais ses disciples ne pouvant rendre raison du mal, adoptèrent des Démons ennemis & destructeurs des hommes. Il n’y a rien de plus commun dans la Théologie Payenne que ces bons & ces mauvais Génies. Cette opinion superstitieuse passa chez les Israëlites par le commerce qu’ils eurent avec les Chaldéens. Mais, par les Démons, ils n’entendoient point le Diable, ou un Esprit malin ; ils ne prenoient point dans ce sens le terme de Démon, & il n’a été employé dans cette signification que par les Evangélistes, & par quelques Juifs modernes. Van. Dan.

Ce mot vient du Grec Δαίμων.

Dans le sens des Anciens, les Poëtes ont dit, le Démon de la Guerre ; pour dire, le Dieu Mars : le Δαίμων qui les inspire, pour dire, Apollon. Pindare paroît plutôt entraîné du démon de la Poësie, que guidé par la raison. Boil.