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DEP

ou expensæ. La condamnation d’amende emporte celle des dépens. On obtient un exécutoire suivant la taxe & la liquidation des dépens, sur une déclaration de dépens réglée entre les Procureurs. On prononce quelquefois dépens compensés, sans dépens. Régulièrement celui qui perd la cause ou son procès, doit être condamné aux dépens ; mais, pour des raisons particulières, les Juges prononcent quelquefois dépens compensés ; par exemple, dans les contestations entre parens, quand il y a, entre autres personnes qui ne sont point parentes, des demandes respectives dans lesquelles elles succombent de part & d’autre, &c. Des dépens croisés, ce sont ceux dont on a interjeté appel. Il faut réfondre les dépens des défauts & contumaces. Les dépens de contumace sont ceux qu’on a été obligé de faire pour obliger une partie de comparoître, ou de défendre, & que le demandeur peut répéter préalablement, & avant que de continuer aucunes poursuites. C’est la raison pour laquelle ils sont appelés préjudicieux, parce qu’ils doivent être payés avant que la partie qui les doit puisse être reçue à procéder en la cause.

On conclud toutes les requêtes par une demande de dépens, dommages & intérêts.

Dépens réservés. Les Juges prononcent dépens réservés quand ils rendent quelque jugement qui ordonne un interlocutoire pour éclaircir la contestation principale qui est à juger.

Dépens provisionels, sont ceux des demandes afin de provision, ou de défenses, ou de main levée de défenses portées par un jugement.

DÉPENSE. s. f. Emploi de son bien, argent que l’on emploie à quelque chose que ce puisse être. Sumtus expensum, impensa. On ne doit faire de dépense qu’à proportion de son revenu. N’insultez point ceux qui sont au dessous de vous par l’éclat de votre dépense, & n’irritez point l’envie, M. Esp. Dans les gens de Cour la modestie de la dépense n’est le plus ordinairement qu’une vertu politique. Id. S. Evremont dit à une belle personne, laissez les autres se ruiner en habits & pierreries ; la nature a fait pour vous toutes les dépenses. La dépense de la Maison de Louis XI qui n’étoit au commencement de son règne que de 28 à 50 mille livres, monta sur la fin du même jusqu’à 80603 livres, suivant la supputation qu’en fait Matthieu. Mascur.

Dépense ordinaire & extraordinaire. Terme de Finance, sont différentes dépenses qu’on fait pour la régie d’une affaire. Les dépenses ordinaires comprennent tous les appointemens, loyers de Bureaux, & autres frais qu’on a coutume de faire & qu’on envisage comme fixes. Les dépenses extraordinaires sont celles qui sont regardées comme casuelles, & qui ne peuvent point être fixées. Les appointemens sont des dépenses ordinaires, parce qu’ils sont fixes. Les gratifications sont des dépenses extraordinaires, parce qu’elles sont casuelles.

Dépenses secrètes. On appelle dépenses secrètes, celles qu’un Souverain permet de faire à un Général d’Armée, & qu’il lui permet de porter à tel point qu’il veut, sans exiger de lui qu’il en rende aucun compte.

On dit faire de la dépense, pour dire, faire beaucoup de dépense. Et faire une dépense sourde, pour dire, faire une dépense secrète qui ne paroît point. Acad. Fr.

Dépense, en termes de Pratique, c’est le chapitre d’un compte qui se met après la recette, dans lequel on fait voir l’emploi de ce qu’on a reçu. Expensum. On ne doit point allouer la dépense d’un compte, si elle n’est justifiée par quittances valables.

Dépense, en Architecture, est un lieu proche de la cuisine, où l’on serre les provisions de la table, & ce qui y sert ordinairement. Cella penaria. Chez les grands Seigneurs on l’appelle office. La dépense est une pièce du département de la bouche.

Dépense, sur mer, c’est le lieu où le maître valet tient les vivres qu’il distribue. Dans les navires de guerre, on place ordinairement la dépense au fond de cale, proche la cuisine, & il y a une ouverture par laquelle on donne les vivres. Mais, dans les Vaisseaux marchands, la dépense est plus souvent placée à la même hauteur que la cuisine. Dans un vaisseau de cent trente-quatre pieds de long de l’étrave à l’étambord, la dépense doit avoir cinq pieds & demi de long, & cinq de large. Dépensier d’un vaisseau, c’est proprement le maître valet.

Dépense, est aussi un terme de Religieux & de Religieuses. C’est le lieu où sont les pots, les tasses, le pain & le vin. Penarium, cellaria. &c.

Dépense, se dit aussi du petit vin qu’on donne à boire aux valets, qu’on fait avec de l’eau qu’on fait cuver sur le marc pressuré, en quelques lieux, boire ou beuvande. voyez Petit-vin.

Dépense, en Hydraulique, la dépense des eaux est leur écoulement ou leur débit en un certain temps. On mesure cette dépense par le moyen d’une jauge percée de plusieurs trous, depuis un pouce jusqu’à deux lignes circulaires. Encyc.

La dépense naturelle est celle que feroient les eaux jaillissantes si leurs conduites & éjutages n’étoient pas sujets à des frottemens.

La dépense effective est celle que l’on conhoît par l’expérience, toujours moindre que celle donnée par le calcul.

DÉPENSER. v. a. Employer son bien à acheter, donner, ou faire autres choses qui ne se font qu’avec de l’argent. Sumtum, impensam facere, dispendere, erogare. On a tort de dépenser son argent à acheter cent vaines curiosités. C’est dépenser son bien à propos que d’en faire part aux pauvres. Ceux qui aiment à dépenser sont bien-tôt ruinés. Pétrone dépensoit son bien, non pas dans la débauche, mais dans un luxe poli & curieux. S. Evr. On disoit autrefois dépendre, mais il est vieux & hors d’usage.

☞ On dit absolument qu’un homme aime à dépenser, qu’il dépense en chevaux, en habits, &c.

On dit en proverbe, Il y a plus de moyens de dépenser que d’acquérir. On dit aussi, qu’un homme ne dépense guère en espions, quand il ne sait pas les choses qui lui sont le plus importantes à découvrir.

Dépensé, ée. part.

On dit proverbialement, journée gagnée, journée dépensée, en parlant de ceux qui n’épargnent rien, qui dépensent l’argent à mesure qu’ils le gagnent.

☞ DÉPENSIER. iere. adj. Qui fait, qui aime à faire des dépenses excessives. Sumtuosus, qui effusè vivere amat. C’est un homme fort dépensier, une femme fort dépensière : & substantivement, c’est un grand dépensier. Il n’est que du langage commun, bourgeois.

C’est aussi dans quelques familles, l’économe, ou celui qui a soin de faire la dépense d’un ménage, d’une communauté. Promus, Promus condus, procurator peni, cellarius, œconomus. Il se dit sur-tout parmi les Religieux & Religieuses, pour signifier celui ou celle qui a soin de la cave & du reste de la dépense. Il y en a qui écrivent dépencier avec un c ; ce mot, & tous les autres qui ont la même origine, s’écrivent aujourd’hui sans s dans la première syllabe.

Dépensier d’un vaisseau. Voyez Dépense en Marine.

☞ DÉPERDITION. s. f. Terme didactique, qui signifie une perte qui cause dépérissement. Il n’est guère usité que dans cette phrase, déperdition de substance. Il se fait chez nous une continuelle déperdition de substance. Cette déperdition est beaucoup plus considérable dans ceux qui s’occupent à des travaux pénibles, fatiguans. C’est pour réparer ces pertes continuelles que nous sommes obligés de prendre des alimens.

On appeloit autrefois suture conservative, une suture par laquelle on empêchoit que dans les grandes plaies où il avait déperdition de substance, les bords ne s’éloignassent trop l’un de l’autre. Dionis.

En Chimie, lorsqu’après avoir fait dissoudre l’or & l’argent, &c. on ne retire pas toute la matière