Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, II.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on n’a rien découvert ; on a tout au plus confirmé une découverte. Il y a peu de gros livres de physique expérimentale que cette règle si simple ne réduisît à un petit nombre de pages ; et il est un grand nombre de petits livres qu’elle réduirait à rien.


XLV.


De même qu’en mathématiques, en examinant toutes les propriétés d’une courbe on trouve que ce n’est que la même propriété présentée sous des faces différentes ; dans la nature, on reconnaîtra, lorsque la physique expérimentale sera plus avancée, que tous les phénomènes, ou de la pesanteur, ou de l’élasticité, ou de l’attraction, ou du magnétisme, ou de l’électricité, ne sont que des faces différentes de la même affection. Mais, entre les phénomènes connus que l’on rapporte à l’une de ces causes, combien y a-t-il de phénomènes intermédiaires à trouver pour former les liaisons, remplir les vides et démontrer l’identité ? c’est ce qui ne peut se déterminer. Il y a peut-être un phénomène central qui jetterait des rayons, non-seulement à ceux qu’on a, mais encore à tous ceux que le temps ferait découvrir, qui les unirait et qui en formerait un système. Mais au défaut de ce centre de correspondance commune, ils demeureront isolés ; toutes les découvertes de la physique expérimentale ne feront que les rapprocher en s’interposant, sans jamais les réunir, et quand elles parviendraient à les réunir, elles en formeraient un cercle continu de phénomènes où l’on ne pourrait discerner quel serait le premier et quel serait le dernier. Ce cas singulier, où la physique expérimentale, à force de travail, aurait formé un labyrinthe dans lequel la physique rationnelle, égarée et perdue, tournerait sans cesse, n’est pas impossible dans la nature, comme il l’est en mathématiques. On trouve toujours en mathématiques, ou par la synthèse ou par l’analyse, les propositions intermédiaires qui séparent la propriété fondamentale d’une courbe de sa propriété la plus éloignée.


XLVI.


Il y a des phénomènes trompeurs qui semblent, au premier coup d’œil, renverser un système, et qui, mieux connus, achè-