Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VIII.djvu/167

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compagnie la plus triste, un souper maussade et qui ne finissait point, et un brelan cher, où j’ai perdu la possibilité et essuyé la mauvaise humeur des gagnants dépités, à chaque coup, de n’avoir pas gagné davantage.

Madame de Chepy.

C’est bien fait ; que ne veniez-vous ici ?

Monsieur Hardouin.

M’y voilà ; et toutes mes disgrâces seront bientôt oubliées, si je puis vous être de quelque utilité. De quoi s’agit-il ?

Madame de Chepy.

De me rendre le plus important service. Vous connaissez madame de Malves ?

Monsieur Hardouin.

Non pas personnellement ; mais on lui accorde, d’une voix assez unanime, de la finesse dans l’esprit, de la gaieté douce, du goût, de la connaissance dans les beaux-arts, un grand usage du monde, et un jugement sûr et exquis.

Madame de Chepy.

Voilà les qualités qu’elle a pour tous et dont je fais cas assurément, mais je prise encore davantage celles qu’elle tient en réserve pour ses amis.

Monsieur Hardouin.

Je vis avec quelques-uns qui la disent mère indulgente, bonne épouse et excellente amie.

Madame de Chepy.

Il y a six à sept ans que nous sommes liées, et je lui dois la meilleure partie du bonheur de ma vie. C’est auprès d’elle que je vais chercher et que je trouve un sage conseil quand j’en ai besoin ; la consolation dans mes peines qui lui font quelquefois oublier les siennes, et cette satisfaction si douce, qu’on éprouve à confier ses instants de plaisir à quelqu’un qui sait les écouter avec intérêt. Eh bien, c’est incessamment le jour de sa fête.

Monsieur Hardouin.

Et il vous faudrait un divertissement, un proverbe, une petite comédie ?

Madame de Chepy.

C’est cela, mon cher Hardouin.