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ACTE II



Scène Première.


Monsieur Hardouin.

J’ai beau rêver, m’agiter, me tourmenter, il ne me vient rien. Voyons encore… Cela serait assez plaisant, mais usé… Ah ! si Molière revenait, avec tout son incroyable génie, combien il aurait de peine à obtenir le suffrage des gens qu’il a rendus si difficiles !… Les autres ont tout pris… Me demander une de ces facéties telles qu’on en joue aux Palais-Royal ou Bourbon, n’est-ce pas me dire : Hardouin, ayez subito, subito, l’esprit et la facilité d’un Laujon, la verve et l’originalité d’un Collé ? Voilà ce que je me laisse ordonner, rien que cela… Je suis un sot ; tant que je vivrai je ne serai qu’un sot, et ma chaleur de tête m’empiégera comme un sot… Mais ne pourrais-je pas ?… Non, cela ne va pas à la circonstance… Et si je mettais en scène ce petit conte ? Encore moins, ils le savent tous ; et quand il serait neuf pour eux, il ne cadre guère aux personnes. Et puis je n’ai que deux ou trois jours pour faire, pour copier les rôles, pour apprendre, pour jouer sans répéter… On dirait qu’ils s’imaginent qu’une scène se souffle comme une bulle de savon… Aussi cela ira Dieu sait comme.