Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XIII.djvu/83

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enveloppé d’un linceul. En de ses bras est mollement étendu ; l’autre, ramené-par-dessus le corps, viendra se placer sur une de ses cuisses, et la presser un peu, de manière que toute la figure montre un époux qui s’est retiré le premier, et qui ménage une place à son épouse.

Les Anciens se seraient contentés de cette seule figure, sur laquelle ils se seraient épuisés ; mais nous voulons être riches, parce que nous avons encore plus d’or que de goût, et que nous ignorons que la richesse est l’ennemie mortelle du sublime.

A la tête de ce lit funéraire, j’assieds donc la Religion. Elle montre le ciel du doigt, et dit à l’épouse qui est à côté d’elle, debout, un genou posé sur le bord de la couche, et dans l’action d’une femme qui veut aller prendre place à côté de son époux : « Vous irez quand il plaira à celui qui est là-haut. »

Je place au pied du lit la Tendresse conjugale. Elle a le visage collé sur le linceul ; ses deux bras étendus au delà de sa tête sont posés sur les deux jambes du prince. La couronne de fleurs qui lui ceint le front est brisée par derrière, et l’on voit à ses pieds les deux flambeaux de l’hymen, dont l’un brûle encore, et l’autre est éteint.

SECOND PROJET.

Au pied de la couche funèbre, je place un ange qui annonce la venue du grand jour.

Les deux époux se sont réveillés. L’époux, un de ses bras jeté autour des épaules de l’épouse, la regarde avec surprise et tendresse ; il la retrouve, et c’est pour ne la quitter jamais.

Au chevet de la couche, du côté de l’épouse, on voit la Tendresse conjugale qui rallume ses flambeaux en secouant l’un sur l’autre. Du. côté de l’époux, c’est la Religion qui reçoit deux palmes et deux couronnes des mains de la Justice éternelle.

La Justice éternelle est assise sur le bord de la couche. Elle a le front ceint d’une bandelette ; le serpent qui se mord la queue est autour de ses reins ; la balance dans laquelle elle pèse les actions des hommes est sur ses genoux ; ses pieds sont posés sur les attributs de la grandeur humaine passée.