Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XX.djvu/15

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c’en est un que celui-ci. Quoi ! des méchants, des hommes injustes, me forceront à des fautes inconsidérées et ils se serviront ensuite de ces fautes pour me ruiner et me déshonorer ! Cela est bien dur.

Voilà, monsieur, les réflexions que je me suis permises depuis ma première lettre et à laquelle je joins celle-ci.

Je suis, avec respect, etc., etc.


XLV


AU MÊME.
Paris, ce 28 août 1768.
Monsieur,

J’ai l’honneur de vous réitérer que dans l’affaire de la demoiselle Desgrey et de ses frères, je suis de la plus rigoureuse impartialité ; mais comme cette qualité ne suffit pas pour être juste et que je ne me consolerais pas d’avoir induit un juge en erreur, quand même j’aurais été de la meilleure foi du monde, pour plus de sûreté je me suis adressé aux hommes de ma ville les plus honnêtes, les plus éclairés, et j’ai eu la satisfaction de voir que leur récit s’accordait exactement avec ce que j’avais pris la liberté de vous écrire. En voici le résumé. Il n’y a jamais eu de domestique dans la maison des père et mère. C’est cette fille qui en a fait les fonctions pénibles depuis qu’elle est au monde, et tant qu’ils ont vécu, leur équité l’en avait indemnisée par un petit commerce qu’ils autorisaient ; voilà l’origine de ce misérable pécule si envié par les frères ; voilà la cause de ces dépôts chez différents particuliers, dépôts qui ont changé autant de fois qu’ils ont été ou soupçonnés ou découverts par les frères dont on redoutait les violences et le ressentiment. Tandis que la fille passait sa vie et épuisait sa santé à seconder les efforts des père et mère pour faire le bien de la maison, elle était ruinée par la débauche, la dissipation et les extravagances des frères ; ils étaient sans mœurs ; ils se faisaient des affaires fâcheuses ; ils s’enrôlèrent ; et c’était toujours aux dépens de la maison qu’ils se tiraient d’affaire. Pour les encourager à leur