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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 10.djvu/182

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On vend chez les droguistes sous le nom de mastic en sorte, quelques masses résineuses, seches, grossieres, faites de mastic commun & d’autres résines, mais elles sont entierement rejettées pour la Medecine. Quelques ouvriers en emploient, & nomment mastic leur ciment ou composition faite de méchant mastic, de poudre de briques, de cire & de résine, dont les Lapidaires se servent pour tenir les pierres quand ils les taillent, les Sculpteurs pour rejoindre les pieces d’une statue, & les Vitriers pour coller leurs carreaux de verre ou leurs glaces aux croisées.

Il y a encore un mastic noir qu’on apporte d’Egypte, dont on prétend qu’on peut se servir pour sophistiquer le camphre.

On présuppose, par l’analyse du mastic, qu’il est composé de beaucoup d’huile épaisse, de sel acide, de très-peu de sel alkali & de terre, & qu’il contient fort peu de parties subtiles & volatiles.

Les anciens medecins le recommandent pour beaucoup de maux ; c’est pourquoi il entre dans une infinité de compositions galéniques, d’onguens & d’emplâtres. Les Allemands en tirent une eau, une huile simple, une huile distillée, un esprit, avec l’esprit-de-vin, & en font aussi des pilules. On juge bien qu’ils donnent de grandes vertus à toutes ces préparations.

Quelques-uns de nos modernes ne sont pas plus sages que les anciens, dans les propriétés vagues qu’ils attribuent au mastic, pour guérir les diarrhées, la colique, le vomissement, le flux de sang. Comme ces maladies dépendent d’une infinité de causes différentes, il faudroit du-moins spécifier les occasions où le mastic est recommandable dans ces maladies.

On doit reconnoître en général qu’il est légerement aromatique & astringent, & qu’il peut convenir lorsqu’il faut dessécher, affermir & fortifier les fibres des visceres qui sont trop humides, trop lâches & trop foibles : il peut encore quelquefois adoucir l’acrimonie des humeurs, soit en enveloppant les pointes des sels, soit en humectant les membranes. Etant mâché, il resserre & affermit les gencives, parce qu’il est astringent ; si on le mâche long-tems, il excite la salive, propriété qu’il partage avec tout ce qui se mâche long-tems. Il se dissout également dans les liquides aqueux & huileux.

On dit qu’appliqué sur la région ombilicale, il arrête les diarrhées, & qu’il guérit le mal de dents étant mis sur les tempes ; mais on répete si souvent ces sortes d’expériences sans succès, qu’on devroit bien en être détrompé.

On l’emploie dans les poudres dentifrices, & il y convient, comme aussi dans quelques emplâtres, céras ou onguens astringens.

Cependant le principal usage qu’on en fait est dans les Arts. Les Orfévres en mêlent avec de la térébenthine & du noir d’ivoire, qu’ils mettent sous les diamans pour leur donner de l’éclat. On s’en sert aussi beaucoup dans la composition des vernis, cet art moderne industrieusement inventé pour lustrer, colorer, conserver le papier, les tableaux, & tant d’ouvrages différens de sculpture ou de menuiserie. Peut-être que le vernis si précieux de la Chine n’est autre chose qu’une espece de résine qui, comme le mastic, dégoutte de quelqu’arbre naturellement ou par incision. (D. J.)

MASTIC, terre, (Hist. nat.) espece de terre bolaire qui se trouve dans l’île de Chio. Ce nom singulier lui a, dit-on, été donné, parce que cette terre se trouve dans un pays où se trouve aussi le mastic.

Mastic, s. m. (Hydr.) est une composition chaude de poudre de brique, de poix résine & de cire, avec laquelle on attache un corps avec un autre. Ce mastic est fort en usage dans les conduites

de grès. Il y en a qu’on n’emploie que froid, ce qui l’a fait nommer mastic à froid.

MASTICATION, s. f. (Physiolog.) la mastication ou l’action par laquelle on mâche, est une atténuation des alimens dans la bouche qui se fait & par le broyement des dents & par le détrempement de la salive. Le principal objet de cette opération sont les alimens solides qui doivent être atténués, afin que l’augmentation de leurs surfaces donne plus de prise aux forces digérantes. Ce qu’on mâche plus pour le plaisir que pour se nourrir, comme par exemple les aromates, n’est que le second objet de la mastication.

Pour atténuer les alimens solides & les diviser en-plusieurs particules, il faut les mordre. Voyez Mordre.

L’action de mordre consiste à écarter la mâchoire inférieure, & à la presser ensuite fortement contre la mâchoire supérieure, afin que les alimens solides puissent être coupés par les huit dents incisives des deux mâchoires entre lesquels ils sont pris.

Les alimens mordus & divisés sont réservés entre les surfaces larges & pierreuses des dents molaires pour y recevoir l’action du broyement. Ce resserrement se fait 1° par la contraction principalement du muscle buccinateur, qui applique les joues aux dents molaires & à leur siege externe, par l’action de l’orbiculaire des levres dont l’usage est de rider, retrécir, fermer la bouche ; par l’action du zigomatique qui tirant les levres obliquement en-haut, presse fortement la partie supérieure de la joue voisine du buccinateur contre les gencives des dents molaires supérieures & contre ces dents mêmes ; par l’action du releveur commun des levres qui les tirant en-haut, les applique ainsi qu’une partie des joues aux dents & aux gencives qui sont en cet endroit ; par l’action des deux releveurs propres de la levre supérieure qui agissant ensemble, resserrent ladite levre contre les gencives & contre les dents antérieures supérieures, quand la bouche est fermée par son sphincter ; par l’action de l’abaisseur & du releveur propre des deux levres ; enfin par l’action du peaucier qui meut & ride les tégumens, & qui applique les joues & les muscles placés sous lui aux mâchoires & aux dents molaires.

Si ces muscles agissent tous ensemble, les joues & les levres sont tellement appliquées contre les gencives & les dents, qu’il ne tombe aucune partie de ce qu’on mange & de ce qu’on boit entre les joues, entre la surface extérieure des dents & des parties antérieures des gencives, au lieu que les alimens sont poussés en divers lieux, lorsque ces muscles n’agissent que tour-à-tour.

Les alimens sont donc alors resserrés ou comprimés au même endroit par la langue, qui est un muscle d’une extrème volubilité en tout sens, & qui se meut avec une facilité prodigieuse vers tous les points du dedans de la bouche. C’est par le moyen de ces muscles qu’elle détermine les alimens solides entre les molaires, & ce qu’on mange & ce qu’on boit vers le gosier.

Pour peu que l’on fasse attention au mouvement successif des muscles moteurs de la mâchoire, à leur façon d’ouvrir & de comprimer en-devant latéralement & en arriere, on sera convaincu sans peine que les muscles des joues, des levres, de la langue peuvent broyer les alimens dans l’écartement qui se trouve entre les dents, & dans celui que laissent les dents qu’on a perdues. Par tous ces mouvemens, les alimens sont brisés, atténués, mêlés, délayés, lubrifiés, & deviennent fluides par le mélange de la salive, de la liqueur de la bouche, & de la mucosité du palais & du gosier.

Les alimens étant donc atténués par le mouve-