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fonde, obscure ; on néglige cependant de donner issue au pus, dans la nuit le malade tombe dans un délire violent, il meurt le matin, on l’ouvre, on trouve le cerveau inondé de pus ; on disseque le bras où l’on avoit apperçu l’abscès, on n’y voit qu’un vuide assez considérable entre les muscles & l’os du bras. Il paroît par-là qu’il y a eu un transport réel de matiere, mais rien n’empêche que les nerfs n’y aient concouru ; la maniere dont ils l’ont fait est fort difficile à déterminer. On voit aussi quelque chose de fort analogue dans les vomiques qui se vuident entierement par les urines ; mais ce qui favorise encore l’idée que nous venons d’exposer, c’est une espece d’uniformité qu’on observe dans quelques métastases, qui a donné naissance aux mots vagues de sympathie, si souvent employés, rarement définis, & jamais expliqués : ainsi des douleurs néphrétiques se changent communément en goutte, des dartres repercutées portent sur la poitrine, une gale rentrée donne lieu à des hydropisies, un abscès à la poitrine se vuide par les jambes, une tumeur aux testicules survenant à la toux la dissipe & disparoît à son tour quand la toux survient. Il y a bien d’autres exemples semblables qui mériteroient d’être examinés ; & ce seroit un point d’une grande importance en Médecine que de bien constater & classer la correspondance mutuelle des parties. Les métastases qui se font du dedans au dehors sont des especes de crises ouvrages de la nature ; les causes qui les déterminent & leur maniere d’agir sont tout-à-fait inconnues. On voit un peu plus clair sur les métastases qui se font des parties externes à l’intérieur ; on sait qu’elles sont souvent la suite de l’application imprudente des repercussifs, du froid, des remedes qui empêchent l’écoulement d’un ulcere, la formation des exanthemes ; elles sont aussi quelquefois excitées par des cardialgies, foiblesses, défaillances, par des passions d’ame, par des remedes internes qui changent la direction du spasme, qui entretient ces affections extérieures, par un excès dans le manger qui, en augmentant le ton de l’estomac, produit le même effet, &c.

On peut déduire de-là quelques canons pratiques sur les métastases : 1°. qu’il faut seconder autant qu’il est possible celles qui se font au dehors, il est même des occasions où il faut tâcher de les déterminer ; pour en venir sûrement à bout, il faudroit connoître la maniere de faire changer de direction aux forces phréniques, & les détourner vers l’organe extérieur ou vers quelque couloir approprié ; au défaut de cette connoissance, nous sommes obligés d’aller à tâtons, guidés par un empirisme aveugle, souvent insuffisant. Dans les maladies de la tête, la métastase la plus heureuse est celle qui se fait par les selles ; les purgatifs sont les plus propres à remplir cet objet : dans celles qui attaquent la poitrine, surtout les chroniques, la voie des urines & les abscès aux jambes sont les plus salutaires ; on peut par les diurétiques, & sur-tout par les vésicatoires, remplir la premiere vûe, & imiter par l’application des cauteres les abscès aux jambes. Dans les affections du bas-ventre, le flux hémorrhoïdal est le plus avantageux ; on peut le procurer par les fondans hémorrhoïdaux, aloétiques : dans quelques cas les maladies éruptives ont été une heureuse métastase, ici le hasard ou la nature peuvent plus que les remedes. 2°. Dans toutes les affections extérieures qui dépendent d’une cause interne, il faut éviter les remedes repercussifs, ou autres qui puissent empêcher la formation & l’étendue de la maladie ; & si, par quelque cause imprévue, la maladie souffre une métastase toûjours dangereuse, il faut tout aussi-tôt tâcher de la rappeller, 1°. en attaquant, s’il y a lieu, la cause qui l’a excitée, la foiblesse par des cordiaux, les ex-

crétions opposées par les astringens appropriés, le

poids des alimens dans l’estomac par l’émétique, &c. 2°. par des remedes topiques qui puissent renouveller l’affection locale ; ainsi on rappelle la goutte par des incessus chauds, par des épispastiques & les vésicatoires ; si un ulcere fermé a donné lieu à la métastase, il ne faut que le rouvrir par un cautere mélé avec du suppuratif ; l’application des ventouses peut faire revenir une tumeur, un abscès repercuté ; les bains & les sudorifiques conviennent dans les maladies exanthématiques rentrées ; pour ce qui regarde la gale, l’expérience m’a appris qu’il n’y avoit pas de meilleur remede que de la faire reprendre : une jeune fille qui à la suite d’une gale rentrée étoit devenue hydropique, fut par ce moyen guérie en peu de jours ; il est très-facile de reprendre la gale en couchant avec une personne qui en soit attaquée : le même expédient pourroit, j’imagine, réussir dans les cas semblables de dartres qui, étant repercutées, font à l’intérieur beaucoup de ravages ; personne n’ignore avec quelle facilité elles se communiquent en couchant ensemble. (m)

MÉTASYNCRISE, s. f. (Med.) selon Thessalus, est un changement dans tout le corps, ou seulement dans quelques-unes de ses parties. Ce terme est relatif au sentiment d’Asclépiade touchant les corps des animaux, qu’il disoit avoir été formés par le concours des atomes de même que le reste de l’univers.

MÉTATARSE, s. m. en Anatomie, est la partie moyenne du pié, située entre le tarse & les orteils. Voyez nos Planches d’Anatomie, & leur explication. Voyez aussi Pied. Le mot vient du grec μετα, au-delà, & de ταρσος, tarse. Voyez Tarse.

Le métatarse est composé de cinq os. Celui qui soutient le gros orteil, est le plus gros de tous ; & celui qui soutient le second orteil, est le plus long. Les autres deviennent plus courts les uns que les autres. Les os du metatarse sont plus longs que ceux du métacarpe ; mais ils leur ressemblent dans le reste, & sont articules avec les orteils, comme les os du métacarpe le sont avec les doigts. Voyez Métacarpe.

MÉTATEURS, s. m. pl. (Hist. anc.) c’étoient quelques centurions commandés par un tribun ; ils précédoient l’armée, & ils en marquoient le camp. On entendoit encore par ce mot des officiers subalternes qui partoient avant l’empereur, & qui alloient marquer son logis & celui de sa maison.

MÉTATHÈSE, s. f. (Gram.) transpositio ; de μετὰ, trans, & τίθημι, pono. C’est un métaplasme par lequel les lettres dont un mot est composé sont mises dans un ordre différent de l’arrangement primitif. C’est par métathèse que les Latins ont formé anas du grec νήσσω, caro de κρέας, forma de μορφὴ ; l’ancien verbe specio, qui n’est plus usité que dans les composés aspicio, conspicio, despicio, exspicio, inspicio, perspicio, prospicio, respicio, suspicio, &c. vient par la même voie, du grec σκέπω. C’est de même par métathèse que les Espagnols disent milagro au lieu de miraglo, du latin miraculum ; que les Allemands disent operment au lieu d’orpement, comme nous disons orpiment d’auripigmentum ; & que nous-mêmes nous disons troubler pour tourbler de turbare, &c.

La principale cause de la métathèse, ainsi que des autres métaplasmes, c’est l’euphonie qui, dépendant immédiatement de l’organisation de chaque peuple, varie nécessairement comme les causes qui modifient l’organisation même. Je dis que c’est la principale cause ; car quand Virgile a dit (Æn. X. 394.) : Nam tibi, Tymbre, caput evandrius abstulit ensis ; il a mis Tymbre pour Tymber qui est trois vers plus haut : & ce n’est, selon la remarque de Servius sur ce vers, que pour la mesure de son vers, metri causa, qu’il s’est permis cette métathèse.

Métathese, (Médec.) transport ou change-