Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 10.djvu/776

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

transparente, plus brillante que le reste, & il crut que c’étoit la prunelle par où les rayons de lumiere passoient sur la rétine ; cette tache est environnée de trois cercles, & paroît sept fois plus petite que le diametre de toute la lentille. On voit dans chacune de ces surfaces lenticulaires extrèmement petites, autant d’exactitude pour la figure & la finesse, & autant d’invention & de beauté que dans l’œil d’une baleine & d’un éléphant. Combien donc doivent être exquis & délicats les filamens de la rétine de chacune de ces lentilles, puisque toute la peinture des objets qui y sont représentés doit être plusieurs millions de fois moindre que les images qui se peignent dans notre œil.

Mouche grue, (Science microsc.) cette mouche nommée par Aldrovandi, culex maximus, & par le vulgaire, pere à longues jambes, présente plusieurs choses dignes de remarque. Ses piés disséqués dans une goutte d’eau, sont un tissu de fibres charnues qui se resserrent & s’étendent d’une maniere surprenante, & qui continuent leur mouvement trois ou quatre minutes. Leeuwenhoek dit n’avoir vérifié cette observation que dans les piés de ce seul insecte. Ses intestins sont composés d’un nombre prodigieux de vaisseaux, qu’on peut voir aussi clairement avec le microscope, qu’on voit à la vue simple les entrailles des plus grands animaux. La queue de la mouche-grue femelle se termine par une pointe acérée, dont elle se sert pour percer la terre & déposer ses œufs sous le gason. (D. J.)

Mouche cantharide, (Hist. nat. Mat. med.) Voyez Cantharide.

Mouche, en terme de Découpeur ; c’est un morceau d’étoffe de soie, velours, satin, ou autre, taillé en rond, en cercle, ou autre figure, que les dames mettent sur leurs visages par forme de parure & d’ornement ; la mouche est gommée en dessous.

Mouche, le jeu de la mouche ; on ne peut guere savoir au juste d’où nous vient ce jeu, ni ce qui l’a fait nommer mouche. Nous ne nous arrêterons pas à donner de son origine & de son nom des raisons très-incertaines, & qui pourroient par conséquent n’être que fort peu satisfaisantes. Ce jeu tient beaucoup de la triomphe par la maniere de le jouer, & a quelque chose de l’hombre par la maniere d’écarter, qui differe cependant en ce qu’à l’hombre, ceux qui ne font pas jouer écartent après celui qui fait jouer, & qu’à la mouche tous ceux qui prennent des cartes au talon sont censés jouer.

On joue à la mouche depuis trois jusqu’à six. Dans le dernier cas un jeu de piquet ordinaire suffit. Il y a même des joueurs qui ôtent les sept ; mais dans le second, il est nécessaire qu’il y ait toutes les petites cartes pour fournir aux écarts qu’on est obligé de faire, & afin qu’il en reste au talon, outre la carte retournée, de quoi en donner aux moins trois à chaque joueur, si tous veulent aller à l’écart. On voit à qui fera ; l’on prend des jettons que les joueurs fixent tant pour le nombre que pour la valeur, & celui qui fait après avoir donné à couper, donne cinq cartes à chacun, par une, par trois, par cinq, même s’il le veut, quoique cette derniere façon soit moins honnête. Il retourne ensuite la carte qui est la premiere sur le talon, & qui reste sur le tapis pour être la triomphe pendant le coup.

Le premier après avoir vû son jeu est maître de s’y tenir, c’est-à-dire de garder les cartes qu’il a dans sa main sans aucun échange, ou de prendre une fois seulement autant de cartes qu’il lui en faut, cinq même s’il le veut ; & il peut passer s’il n’a pas beau jeu. Ainsi du second, du troisieme, &c.

Celui qui demande des cartes du talon est toujours censé jouer, & celui qui a pris des cartes, & n’a

point fait de levée, fait la mouche. Voyez Mouche. Lorsqu’il y a plusieurs mouches faites dans le même coup, ce qui arrive souvent lorsqu’on est six, elles vont toutes à la fois, à moins que l’on ne convienne de les faire aller séparément.

Il n’y a que celui qui mêle les cartes qui mette au jeu le nombre de jettons fixé ; & par conséquent celui qui fait la mouche la fait d’autant de jettons qu’il y en a au jeu.

Celui qui n’a point jeu à jouer ni à prendre des cartes, met son jeu avec les écarts, ou sous le talon. Celui qui fait jouer sans avoir recours au talon, dit seulement je m’y tiens. Les cartes se jouent comme à la bête, & chaque levée qu’on fait vaut un jetton, deux quand la mouche est double, trois quand elle est triple, ainsi du reste. Si les cinq cartes de quelque joueur sont d’une même couleur, c’est-à-dire cinq piques, cinq trefles, &c. quoique ce ne soit point de la triomphe, ce joueur a la mouche sans jouer. Si plusieurs joueurs avoient la mouche dans le même coup, la mouche de la triomphe gagneroit, & à son défaut, celle qui seroit la plus haute en point. Pour cela on compte l’as, qui va immédiatement après le valet, pour dix points, les figures pour dix, & les autres cartes pour ce qu’elles marquent. En cas d’égalité par-tout, c’est la primauté qui gagneroit.

Celui qui a la mouche n’est point obligé de le dire quand on le lui demande, mais doit accuser juste : s’il répond oui, ou non, après que celui qui a la mouche a dit je m’y tiens, les autres joueurs sans réflexion vont leur train à l’ordinaire.

Le premier qui a la mouche leve tout ce qu’il y a au jeu, & gagne même toutes les mouches qui sont dûes ; & ceux qui continuent de jouer après la mouche découverte, font une mouche sur le jeu, sans pour cela qu’il soit besoin de jouer. C’est pour quoi il est souvent de la prudence de demander à ceux qui s’y tiennent s’ils sauvent la mouche, & les observer alors ; car ils ont souvent peine à cacher leur jeu, & se font connoître par leur air satisfait.

Celui qui se tient à ses cartes doit pour son avantage particulier ne point répondre à ceux qui lui demandent s’il sauve la mouche, & de les laisser croire qu’il l’a dans son jeu, parce que nous avons dit plus haut, quand on répond, il faut accuser juste. Cependant un joueur bien assuré de son jeu, peut sauver la mouche pour engager les autres à s’en mettre, & leur faire faire la mouche à tous.

Celui qui renonce fait la mouche d’autant de jettons qu’elle est grosse, de même que celui qui pouvant prendre une carte jouée en en mettant une de la même couleur, ou en coupant, ou surcoupant.

Qui seroit surpris tricher au jeu, ou reprendre des cartes de l’écart pour s’accommoder, feroit la mouche, & ne joueroit plus. Celui qui donne mal, remêle sans autre peine ; ce qui ne se fait pas pour une simple carte retournée à cause des écarts.

Mouche, au jeu de ce nom, c’est cinq cartes de même couleur qui se trouvent dans une même main. Un joueur qui a la mouche leve tout le jeu, sans qu’il soit nécessaire de jouer.

Mouche double, au jeu de ce nom, c’est celle qu’on fait du jeu & des autres mouches qui sont avec lui, & qui doivent être gagnées dans le même coup que lui.

Mouches simples, au jeu de ce nom, ce sont celles qu’on fait sur le jeu seulement, n’y ayant avec lui aucune autre mouche.

Mouche de triomphe, au jeu de mouche, est la premiere de toutes les mouches, parce qu’elle est de la couleur de la triomphe, & qu’elle emporte toutes les autres, quand elles seroient même plus hautes en point qu’elle.