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aux articles Cœliaque, Hypocondriaque, Hystérique, Iliaque, &c.

Passion, en Blason, croix de passion, est un croix à laquelle on donne ce nom, parce qu’à l’imitation de celle sur laquelle notre Sauveur est mort, elle n’est point croisée dans le milieu, mais vers le haut, avec les bras courts en proportion de la longueur du côté d’en-haut. Voyez Croix.

Passion de Jesus-Christ, ordre de la, (Histoire mod.) ordre de chevalerie fondé vers l’an 1380, en Angleterre par le roi Richard II. & en France par Charles VI. lorsque ces princes eurent formé le dessein de reconquérir la Terre-sainte. Leur but étoit qu’en se rappellant les circonstances & la fin de la passion de Jesus-Christ, les croisés vécussent avec plus de piété & de régularité que n’avoient fait la plûpart de ceux qui les avoient précédés dans de semblables entreprises. Il y eut plus de onze cens chevaliers qui firent les trois vœux, & l’on accorda au grand-maitre une autorité qu’un prince auroit enviée. Dans les solemnités ils devoient porter un habit de pourpre qui descendoit jusqu’aux genoux, avec une ceinture de soie, & sur la tête une capuche ou chaperon rouge. Leur habit ordinaire étoit couvert d’un surtout de laine blanche, sur le devant duquel étoit une croix de laine rouge, large de trois doigts. On recevoit aussi dans cet ordre des veuves qui devoient soigner les malades, mais il ne subsista pas ; il y a même des auteurs qui disent qu’on en demeura au simple projet. Supplém. de Moréry, tom. II.

Passion, cloux de la, (Blason.) on appelle ainsi une figure particuliere de cloux qu’on suppose faits comme ceux dont on crucifia Notre Seigneur, pour les différencier des autres cloux ordinaires. Les Machiavelli de Florence, portent d’argent à la croix d’azur, onglée de quatre cloux de la passion. Ménétrier. (D. J.)

Passions, terme de Peintres-Doreurs, on nomme ainsi dans le commerce des peintres & doreurs de Paris, certaines bordures ordinairement de bois uni, qui servent à enquadrer des estampes d’une grandeur déterminée. Ces bordures portent 6 pouces 7 lignes de haut, sur 5 pouces 6 lignes de large ; elles s’appellent passions, parce que les premieres estampes pour lesquelles on en fit, représentoient la passion de Notre Seigneur. (D. J.)

PASSIONNER, PASSIONNÉ, (Gram.) le verbe est peu d’usage à l’actif, & l’on ne dit guere passionner son chant, passionner sa déclamation, passioner une affaire. Se passionner, c’est se préoccuper fortement & aveuglément : les gens à imagination se passionnent facilement. Il est difficile de ne pas se passionner pour la chose, lorsqu’on y prend un grand intérêt. Il ne me déplait pas dans le sens que lui a donné un auteur lorsqu’il a dit, j’ai su jouer une de ces langueurs qui touchent, & j’ai vû quelquefois qu’on se passionnoit à mon rôle. On dit un amant passionné, un style passionné, un regard passionné, un ton passionné. Les femmes du monde sont libertines & froides ; les femmes recluses & dévotes sont sages & passionnées. Je suis passionné pour la musique, pour la danse, pour la peinture. Il est passionné des richesses ; il est passionné de cette femme.

PASSOIRE, s. f. (Ustencile de Cuisine.) sorte de vaisseau rond ou oval, fait de métal ou de terre, qui est percé de plusieurs trous, & qui a d’ordinaire un manche : on s’en sert pour passer des bouillons, & toute autre liqueur qu’on veut avoir pure. (D. J.)

Passoire, (Blanchiss. de cire.) elle est longue & étroite ; elle leur sert lorsqu’ils grêlonent la cire à mettre sur la grélouoire, pour empêcher que les ordures de la cire fondue n’y tombent, elle est de cuivre, longue de plus d’un pié, large de sept à huit pouces ; & profonde d’autant. (D. J.)

PASSUM, s. m. (Diette.) vin de raisins secs, c’est-à-dire fait de raisins secs, ou de raisins que l’on laisse sur la vigne jusqu’à ce que la chaleur du soleil les ait extrèmement flétris : les anciens se servoient beaucoup de ce vin dans les maladies, mais nous ne le connonions pas aujourd’hui.

PASTA, (Lexicog. médic.) παστὰ, espece de gruau fait avec des légumes & de la farine, ou-bien un potage épaissi avec de la fleur de farine. (D. J.)

PASTEL, s. m. (Hist. nat. Bot.) isatis, genre de plante à fleur en forme de croix, composée de quatre pétales. Le pistil sort du calice & devient dans la suite un fruit en languette applatie sur les bords ; ce fruit s’ouvre en deux parties : il n’a qu’une capsule, & il renferme une semence ordinairement oblongue. Tournefort. Inst. rei herb. Voyez Plante.

Le pastel & le voüede ne sont qu’une seule & même plante, nommée pastel en Languedoc, & vouede en Normandie. Tournefort compte trois especes de ce genre de plante, dont nous décrirons la commune à larges feuilles, isatis sativa, vel latifolia, S. R. H. en anglois, the broad leaved woed.

Elle pousse des tiges à la hauteur de trois piés, grosses comme le petit doigt, rondes, roides, lisses, rougeâtres, se divisant vers leurs sommités en beaucoup de rameaux revêtus d’un grand nombre de feuilles rangées sans ordre, oblongues, larges comme celles de la langue de chien, sans poil, de couleur verte foncée, & quelquefois tirant sur le verd de mer. Ses rameaux sont chargés de beaucoup de petites fleurs à quatre pétales jaunes, disposées en croix, attachées à des pédicules menus. Quand ces fleurs sont passées, il naît en leur place des petits fils coupés en languettes, & applatis sur les bords, de couleur noirâtre, contenant chacun une ou deux semences oblongues ; sa racine est longue d’un pié & demi ou de deux piés, grosse en haut comme le pouce, & diminuant peu-à-peu, ligneuse, blanche ; on cultive le pastel particulierement en Languedoc & en Normandie : son goût est amer & astringent ; on fait avec le suc des feuilles de cette plante précieuse, une pâte seche qu’on appelle aussi pastel, & dont les Teinturiers font un grand usage. Voyez Pastel, Teinture.

Je me rappelle à l’occasion du pastel, que Cambden, le chevalier Temple, & plusieurs autres, prétendent que la Grande-Bretagne tire son nom du mot brith, qui en langage breton signifie du pastel, parce que les anciens Bretons avoient coûtume de se peindre le corps avec le suc de cette plante, qui leur rendoit la peau bleue. Je ne crois pas que cette étymologie soit la véritable quoique le fait soit certain. Ces anciens peuples se faisoient dans la peau, comme font aujourd’hui les sauvages, des incisions qui représentoient des fleurs, des arbres, des animaux, ensuite en y faisant couler du jus de pastel, ils donnoient à ces figures une couleur bleue qui ne s’effaçoit jamais ; c’est ce qui leur tenoit lieu de parure, & que Tertullien appelloit Britannorum stigmata. Leurs successeurs sont bien differens : ils ne se peignent point le corps, mais ils cultivent soigneusement la plante du pastel à cause de son profit, car un arpent de terre où l’on a semé sa graine, rapporte depuis dix jusqu’à trente livres sterling par an. (D. J.)

Pastel, peinture au, (Peinture mod.) c’est une peinture où les crayons font l’office des pinceaux ; or le mot de pastel qu’on a donné à cette sorte de peinture, vient de ce que les crayons dont on se sert sont faits avec des pâtes de différentes couleurs. L’on donne à ces especes de crayons, pendant que la pâte est molle, la forme de petits rouleaux aisés à manier ; c’est de toutes les manieres de peindre celle qui passe pour la plus facile & la plus commode, en