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tom. II. liv. IV. c. iij. Calmet, Dictionn. de la Bible, tom. III. lettre F, pag. 137.

Patriarche, terme d’hiérarchie ecclésiastique. C’est un évêque qui a le gouvernement immédiat d’un diocèse particulier, & qui étend son pouvoir sur un département de plusieurs provinces ecclésiastiques. Voy. Diocese.

Les patriarches sont par rapport aux métropolitains, ce que les métropolitains sont par rapport aux évêques. Voyez Evêque & Métropolitain.

Les critiques ne sont pas d’accord sur le tems auquel on doit rapporter l’institution des patriarches. Le pere Morin & M. de Marca, soutiennent qu’ils sont de droit divin & d’institution apostolique ; mais ce sentiment n’est pas fondé. Il paroît au contraire, que l’autorité patriarchale n’est que d’institution ecclésiastique ; elle a été inconnue dans le tems des apôtres & dans les trois premiers siecles ; on n’en trouve aucune trace dans les anciens monumens. S. Justin, S. Irenée, Tertullien, Eusebe n’en parlent point. D’ailleurs, la supériorité des patriarches sur les autres évêques & même sur les métropolitains, est trop éclatante pour avoir demeuré si long-tems ignorée, si elle eût existé. Enfin, quand le concile de Nicée, can. 6. accorde la dignité de patriarche à l’évêque d’Aléxandrie, il ne dit pas qu’elle doive sa naissance à l’autorité apostolique ; il ne l’établit que sur l’usage & la coutume.

D’autres disent que les Montanistes furent les premiers qui décorerent de ce titre les chefs de leur église : que les Catholiques le donnerent ensuite à tous les évêques, & qu’ensuite on le réserva aux seuls cvêques des grands siéges. Socrate & le concile de Chalcédoine le donnent à tous les évêques des villes capitales des cinq diocèses d’Orient. Il fut aussi donné à S. Léon dans le concile de Chalcédoine ; enfin, on l’a restraint aux évêques des cinq principaux siéges de l’Église : Rome, Constantinople, Aléxandrie, Antioche & Jérusalem. Ce nom a été peu usité en Occident, & donné quelquefois à des métropolitains & à de simples évêques, comme les rois Goths & Lombards le donnerent à l’évêque d’Aquilée, & comme on le donna vers le tems de Charlemagne à l’archevêque de Bourges, qui n’a rien conservé des droits de cette dignité que celui d’avoir un official primatial auquel on appelle des sentences rendues par l’official métropolitain. Les Maronites, les Jacobites, les Nestoriens, les Arméniens & les Moscovites ont aussi des patriarches, ainsi que les Grecs schismatiques.

Voici quels étoient autrefois les principaux droits des patriarches ; aussi-tôt après leur promotion ils s’écrivoient réciproquement des lettres, qui contenoient une espece de profession de foi, afin d’unir toutes les Églises par l’union des grands siéges. C’est dans le même esprit qu’on récitoit leurs noms dans les diptiques sacres, & qu’on prioit pour eux au milieu du sacrifice ; on ne terminoit les affaires importantes que par leur avis. Dans les conciles écuméniques, ils avoient un rang distingué, & quand ils ne pouvoient y assister en personne, ils y envoyoient leurs légats ; c’étoit à eux qu’il appartenoit de sacrer tous les métropolitains qui relevoient de leur siége. Le concile de Nicée donne même à l’évêque d’Aléxandrie le droit ce consacrer tous les évêques de son ressort, suivant l’usage de l’Église romaine : on appelloit des jugemens des métropolitains au patriarche ; mais il ne prononçoit sur ces appellations, quand les causes étoient importantes, que dans le concile avec les prélats de son ressort. Les canons de ces conciles devoient être observés dans toute l’étendue du patriarchat. Le huitieme concile général, can. 17. confirme deux droits des plus considérables attachés à la dignité des patriarches, l’un de donner la plénitude

de puissance aux métropolitains en leur envoyant le pallium ; l’autre de les convoquer au concile universel du patriarchat, afin d’examiner leur conduite & de leur faire leur procès. Mais le quatrieme concile de Latran sous le pape Innocent III. diminua les droits des patriarches, en les obligeant à recevoir le pallium du saint siége, & à lui prêter en même-tems serment de fidélité, à ne donner le pallium à un métropolitain de leur dependance, qu’après avoir reçu leur serment d’obéissance au pape ; & enfin en ne leur permettant de juger des appellations des métropolitains, qu’à la charge de l’appel au saint siége. Thomassin, Discipl. de l’Église, part. II. liv. I. c. iv. Dupin, des antiq. ecclés. discipl.

PATRIARCHIES est le nom qu’on donne à Rome aux cinq Églises principales, qui représentent les cinq anciens patriarchats ; savoir, S. Jean de Latran qui représente le patriarchat de Rome ; S. Pierre, celui de Constantinople ; S. Paul, celui d’Aléxandrie ; Ste Marie-Majeure, celui d’Antioche ; & S. Laurent bors des murs, celui de Jérusalem. Les évêques pourvûs des titres de ces églises, marchent dans les cérémonies publiques après le pape & les cardinaux, & précedent le gouverneur de Rome & les autres prélats. Il n’est pas permis même aux cardinaux de celébrer la messe au grand autel de ces églises sans une dispense du pape, portée dans une bulle que l’on attache au coin de l’autel. Dupin, des antiq. ecclés. discipl.

PATRICE, Patriciat, Patricien, s. m. (Jurisprud.) sont des titres d’honneur & de dignité qui ont été la source de la noblesse chez plusieurs peuples.

L’institution du titre de patrice vient des Athéniens, chez lesquels au rapport de Denis d’Halicarnasse, le peuple fut séparé en deux classes, l’une qu’il appelle εὐπατρίδας, patricios ; l’autre δημοτικούς, c’est-à-dire populaires, le menu peuple.

On composa la classe des patriciens de ceux qui étoient distingués par la bonté de leur race, c’est-à-dire dont la famille n’avoit aucune tache de servitude ni autre, & qui étoient les plus considérables d’entre les citoyens, soit par leur nombreuse famille ou par leurs emplois, & par leurs richesses. Thésée leur attribua la charge de connoître des choses appartenantes au fait de la religion & au service de Dieu, d’enseigner les choses saintes ; il leur accorda aussi le privilege de pouvoir être élûs aux offices de la république, & d’interpréter les lois.

Solon ayant été élû pour réformer l’état qui étoit tombé dans la confusion, voulut que les offices & magistratures demeurassent entre les mains des riches citoyens ; il donna pourtant quelque part au menu peuple dans le gouvernement, & distingua les citoyens en quatre classes. La premiere composée de ceux qui avoient 500 minots de revenu, tant en grains que fruits liquides. La seconde, de ceux qui en avoient 300, & qui pouvoient entretenir un cheval de service, c’est pourquoi on les appella chevaliers ; ceux qui avoient 200 minots formoient la troisieme classe, & tout le reste étoit dans la quatrieme.

Romulus, à l’imitation des Athéniens, distingua ses sujets en patriciens & plébéïens ; après avoir créé des magistrats, il établit au-dessus d’eux le sénat auquel il donna l’inspection des affaires publiques ; il composa cette compagnie de cent des plus distingués & des plus nobles d’entre les citoyens. Chacune des trois tribus eut la faculté de nommer trois sénateurs, & chacune des 30 curies qui formoit chaque tribu fournit aussi trois personnes habiles & expérimentées ; Romulus se reserva seulement le droit de nommer un sénateur qui eût la premiere place dans le sénat.

Les membres de cette auguste compagnie furent appellés senatores à senectute, parce que l’on avoit