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objet, c’est la discipline & l’ordre des facultés de Droit des universités du ressort, qui sont Paris, Reims, Orléans, Bourges, Angers & Poitiers, objet que les ordonnances ont remis spécialement au premier avocat général ; ces facultés sont obligées de lui envoyer tous les trois mois le double du registre de leurs inscriptions & les lieutenans généraux des siéges, le procès-verbal de leurs descentes aux écoles de Droit, pour constater les noms & la résidence des étudians sur ces registres & procès-verbaux.

Le premier avocat général vérifie le tems d’étude des licentiés qui viennent se présenter pour être avocats ; il leur en délivre son certificat, s’ils le réquierent, pour se faire recevoir en un autre parlement ; ou s’ils veulent être reçus auparlement de Paris, ils se font présenter à l’audience par un ancien avocat un jour de grand rôle, & le premier avocat général se leve & atteste que le licentié qui se présente a satisfait aux ordonnances, qu’ainsi il n’empêche qu’il plaise à la cour le recevoir au serment d’avocat, & il signe au dos des lettres de licence un vû qui contient le détail des inscriptions, interstices, actes & tems d’étude de Droit françois.

Outre toutes ces fonctions il y a plusieurs objets sur lesquels les gens du roi ont un droit, inspection ou autorité spéciale en vertu de titres particuliers, comme la bibliotheque de saint Victor, celle de l’école de Medecine, le college Mazarin ; ils ont part aussi, avec les trois premiers présidens du parlement, de la chambre des comptes & de la cour des aides, à la fondation des ducs de Nevers pour marier des filles des terres qui appartenoient à la maison de Gonzague, & trois des gens du roi assistent tous les ans, le jour de la S. Louis, au compte qui se rend de l’exécution de cette fondation aux grands Augustins, & y reçoivent chacun cinquante jetons d’argent, & quelques livres de bougie ; le quatrieme n’y assiste pas, parce que la troisieme charge d’avocat général n’a été créée que depuis la fondation.

Les avocats généraux du parlement de Paris ont encore d’autres prérogatives, telles que le titre & les appointemens de conseillers d’état ; ils jouissoient même autrefois de la séance au conseil, & Denis Talon, lorsqu’il quitta sa charge & fut fait conseiller d’état, prit séance au conseil du jour de sa réception d’avocat général ; cependant cela ne se pratique plus, Mrs d’Aguesseau & Gilbert s’étant mis à la queue du conseil.

Cependant les avocats généraux prétendent, à raison de ce titre de conseiller d’état, avoir hors de leurs fonctions, rang de conseillers d’honneur, & passer avant tous conseillers au parlement, & maîtres des requêtes, hors les marches & séances de la compagnie, ce qui fait qu’ils ne se trouvent ni au repas de la saint Martin chez le premier président, ni aux processions & cérémonies de leurs paroisses, ou autres où il y auroit des conseillers au parlement, maîtres des requêtes, ou même des conseillers d’état.

Lorsqu’ils sont dans leur hôtel ou qu’ils vont ailleurs qu’au palais ou en cour, ils sont toujours en simarre, comme le chancelier & le premier président.

Procureur général du roi au parlement. En parlant des avocats généraux, nous avons déja touché quelque chose de certaines fonctions & prérogatives qui sont communes au procureur général ; c’est pourquoi l’on n’ajoutera ici que ce qui lui est de propre.

L’office de ce magistrat a été établi à l’instar du procureur des empereurs romains, appellé procurator Cæsaris, qui étoit chargé de veiller aux intérêts du prince & à ceux du public.

Dans les premiers tems de la monarchie, c’étoit quelqu’un des grands du royaume, qui étoit commis pour faire cette fonction quand l’occasion s’en présentoit.

C’est ainsi que, suivant Gregoire de Tours sous Childebert, un évêque étant accusé d’un crime d’état, on convoqua un parlement auquel assisterent tous les évêques, le roi y présidoit, un ancien duc y faisoit la fonction de promoteur ou accusateur, ce qui revient à la fonction de procureur général.

Il est souvent parlé dans les olim de gentes regis.... gentibus domini regis multa proponentibus, mais on n’entendoit pas toujours par-là un procureur & des avocats du roi qui fussent attachés au parlement. Lorsqu’il étoit question de s’opposer ou de plaider pour le roi, c’étoit le plus souvent le prevôt de Paris ou les baillifs royaux qui portoient la parole, chacun dans les affaires de son territoire où le roi le trouvoit intéressé ; on en trouve la preuve dans des arrêts de 1262, 1270, 1282 & 1295, où il est dit : senescallo nostro pro nobis hoc negante ballivo nostro ex unâ parte.

Dans le second registre olim, fol. 40. sous la date de 1277, il est fait mention du procureur du roi : quin procurator domini regis in causa quam dominus rex liabet contrà decanum & capitulum montis Falconis ; mais rien ne dénote que ce procureur du roi fût attaché au parlement, & il y a tout lieu de croire que c’étoit le procureur du roi de quelque bailliage ou sénéchaussée ; & en effet, dans un autre arrêt de 1299, on voit que le procureur du roi de Normandie parla pour le roi : audito procuratore nostro Normanniæ. Il y avoit donc dès-lors des procureurs du roi dans les bailliages & sénéchaussées, & ces procureurs du roi venoient au parlement pour y défendre, conjointement avec les bailli ou sénéchal du lieu, les droits que le roi avoit dans les affaires de leur territoire. Philippe le Long supprima en 1319 les procureurs du roi, mais pour les pays de droit écrit seulement ; & l’usage de faire parler les baillifs ou les procureurs du roi des bailliages au parlement, subsistoit encore en 1345.

Il paroîtra sans doute assez extraordinaire que le roi n’eût pas dès le treizieme siecle des officiers attachés au parlement, chargés singulierement d’y défendre ses droits & intérêts, puisque le roi d’Angleterre y en avoit comme duc de Guienne, le comte de Flandres en avoit aussi. Un arrêt de 1283 fait mention du procureur du roi de Sicile, procurator regis Siciliæ ; mais pour le roi Philippe le Bel, on ne qualifie celui qui par la sinon en ces termes : verùm parte Philippi regis adjiciens pars regis, &c.

Il y a lieu de croire que le roi avoit son procureur au parlement pour les affaires qui ne regardoient pas les bailliages, telles que celles des pairs & des pairies, de baronage, de régale, &c. & que le procureur du roi au parlement employoit aussi son ministere dans les cas auxquels les baillifs ou procureurs du roi des bailliages ne défendoient pas suffisamment le roi.

En 1312, Simon de Bucy étoit procureur général, procuratore nostro, dit le registre ; c’est le même qui fut depuis premier président, & que l’on regarde comme le premier des premiers présidens.

Aux parlemens de 1312, 1313, 1314, 1317, 1318, & en 1333, le procureur du roi est toujours qualifié procurator regis ou procurator noster, lorsque la cour parle au nom du roi.

Mais dans des arrêts de 1325, 1338, 1344, 1352, 1356, 1377, 1386 & 1403, il est qualifié de procureur général ; & dans le quatrieme registre du dépôt, on trouve une commission du 7 Décembre 1338 où il est dit, a procuratore nostro generali in hac parte : voilà la premiere occasion où les procureurs du roi sont qualifiés de substituts du procureur général.

Il paroît donc certain qu’il y avoit un procureur du roi au parlement, depuis que ses séances eurent été réglées par l’ordonnance de 1302, car il y en avoit un en 1309, en 1311, & en 1312 : on ne sait si ce ne seroit point le procureur du roi au parlement dont parlent les olim sous l’année 1314 ; il y est dit que pour