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le hareng, le celant ou seclant, ou celerin, ou fausse sardine, & la sardine.

Le hareng gai ou qui n’a ni laitance ni œufs, est le meilleur d’entre les poissons qu’on peut saler, surtout après qu’il a frayé.

La pêche avec le poisson salé est communément ingrate : on arme le corps de l’hameçon de poisson salé, & la pointe d’un peu de bœuf frais.

On emprunte encore des appâts du bœuf, de la vache, du cheval, de l’âne, du chien, & d’autres animaux frais ou salés. On emploie à cet usage le foie, les poumons & les entrailles.

On ne fait avec le chien que la pêche du crabe, & cet appât encore ne sert-il qu’à l’entrée des ports & aux petites baies. C’est un amusement d’enfans & de desœuvrés.

Les navigateurs amorcent en pleine mer pour les requins & autres poissons voraces, de morceaux de lard blanc.

Les faux appâts se font avec des morceaux de liege taillés de la figure d’un poisson, & recouverts de la peau d’un petit poisson écorché, ou d’une toile blanche rayée de bleu sur le dos, ou d’une pierre blanche, ou d’une pelotte de marne, &c.

On fait usage de ces appâts pour la pêche des oiseaux marins.

Le pêcheur basque prend le thon à la ligne avec le liege recouvert de la toile rayée de bleu. Cette pêche se fait à la côte lorsque la mer est agitée.

Ceux qui pêchent la crabe & le homar avec des paniers, des casieres, des bouraques & autres instrumens, y pendent des petits morceaux de pierre blanche.

Les appâts & instrumens défendus sont ceux qui tendent à détruire le poisson, comme les sacs de toile & de serpilliere, avec les chevrettes & autres poissons corrompus. Le sac détruisoit le frai, & l’appât infectoit le poisson.

Les appâts empoisonnés, sont la chaux vive, la noix vomique, la noix de cypres, la coque de levant la momie, musc, & autres drogues qui enivrent & étourdissent le poisson.

Il faut y joindre l’herbe qu’on appelle l’alrese.

La pêche de riviere se fait à-peu-près avec les mêmes instrumens, la ligne, le verveux, le filet, l’epervier, &c.

Ce sont aussi les mêmes appâts, le ver, les entrailles des animaux, les morceaux de viande, &c.

Voyez toutes ces différentes pêches, tant de mer que de riviere, à leurs articles particuliers.

Pêche des coquillages, (Conchyliol.) il y a cinq manieres de pêcher les coquillages ; savoir à la main, au rateau, à la drague, au filet, & en plongeant.

Quand la mer se retire, on marche à pié sur la grève, & l’on prend les huitres & les moules à la main, rien n’est plus ordinaire au Havre, à Dieppe, & en Angleterre : quand les huitrieres & les moulieres ne découvrent point, on prend des bateaux, & l’on se sert de la drague ; il y en a qui foulent le sable avec les piés, pour faire sortir les coquillages qui s’ensablent après le reflux.

Pietro della Valle, fameux voyageur, rapporte qu’en pêchant lui-même dans la mer Rouge, il prit une si grande quantité d’huitres, de limaçons, & d’autres coquillages, qu’il en remplit quatre à cinq caisses. Il dit que ces coquilles naissent dans les fonds & dans les cavités, qui sont en grand nombre dans le golfe Arabique, & que les pêcheurs descendent dans l’eau avec leur chemise, qui ne leur vient qu’au bas de l’estomac, & les prennent à la main, l’eau étant si claire que l’on découvre tout ce qui est au fond.

Le rateau est un instrument de fer garni de dents longues & creuses, emmanché de perches propor-

tionnées à la profondeur du fond où l’on pêche ; c’est

ainsi que l’on prend les moules.

La drague est un autre instrument de fer, qui a ordinairement quatre piés de long sur dix-huit pouces de large, avec deux traverses. Celle d’en bas est faite en biseau, pour mordre sur le fond, & enlever l’huitre attachée au rocher : elle porte ou traîne avec soi un sac dont le dessus est ordinairement un réseau de cordage ; & par-dessous on substitue un cuir, ou bien on fait les mailles du dessous du sac de lanieres de cuir, qui étant gluant de sa nature, glisse mieux au fond de l’eau. On descend la drague avec un cordage proportionné à la profondeur où sont les coquillages. En Amérique la drague a six piés en quarré, & on y attache des cordages suivant la profondeur de l’eau ; c’est par leur moyen qu’on tire la drague à bord, & c’est la meilleure maniere de pêcher les coquillages, & la plus usitée.

On se sert de différentes especes de filets dans les ports de mer, pour pêcher le poisson. Parmi les ordures qu’amenent les filets des pêcheurs, il se rencontre des coquillages & des productions marines, qu’ils rejettent ordinairement dans la mer. On a trouvé de cette maniere à Marseille & à Toulon, des coquillages & des mousses de mer très-curieuses.

On pêche à Toulon, à vingt ou trente piés de bas, avec des crocs de fer, les pinnes marines toutes grises, & qui n’ont pas les belles couleurs de celles de Messine, de Corse, & de Majorque. Les manches de couteau se prennent dans le golfe de Tarente, & autres ports de mer, dans les trous qu’ils font dans le sable, où l’on jette du sel pour les faire sortir ; mais le meilleur moyen d’avoir de beaux coquillages, est d’employer les plongeurs, comme on fait dans les Indes. (D. J.)

Pêche, (Jurisprud.) la pêche & la chasse sont les deux manieres d’acquérir que les hommes aient eu, l’une & l’autre furent le premier art que la nature enseigna aux hommes pour se nourrir.

La pêche continua d’être permise à tout le monde par le droit des gens, non-seulement dans la mer, mais aussi dans les fleuves, rivieres, étangs, & autres amas d’eau.

Le droit civil ayant distingué ce que chacun possedoit en propriété, il ne fut plus permis de pêcher dans les étangs & viviers d’autrui, mais seulement dans la mer & dans les fleuves & rivieres dont l’usage appartenoit au public.

La pêche qui se fait, tant en pleine mer que sur les grèves, est toujours demeurée libre à tout le monde, suivant le droit des gens ; mais nos rois ne la permettent à leurs sujets dans les mers qui avoisinent leur domination, qu’avec les filets permis ; & il est défendu aux pêcheurs qui arrivent à la mer, de se mettre & jetter leurs filets en lieux où ils puissent nuire à ceux qui se seront trouvés les premiers sur le lieu de la pêche, ou qui l’auront déjà commencée, à peine de tous dépens, dommages & intérêts, & de cinquante livres d’amende. Ordonnance de la Marine, liv. V. tit. 1. & 2. article 9.

Pour ce qui est des fleuves ou rivieres navigables, comme en France la propriété en appartient au roi, c’est à lui seul aussi qu’appartient le droit de pêche.

Les anciennes ordonnances permettoient à chacun de pêcher à la ligne dans les fleuves & rivieres navigables, parce que cela n’étoit regardé que comme un amusement ; mais comme insensiblement on abuse des choses les plus innocentes, & qu’il y auroit une infinité de gens oisifs qui pêcheroient continuellement & dépeupleroient les rivieres, il n’est plus permis de pêcher, même à la ligne, dans les fleuves & rivieres navigables & autres eaux qui appartiennent au roi, à-moins d’être fondé en titre spécial, ou d’être reçu maître pêcheur au siége de la