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noms qu’on donne aux vieux chiffons de toile de lin & de chanvre, qu’on emploie à la fabrique du papier. Voyez Papier.

PEILLIER, s. m. celui qui ramasse dans les rues des peilles ou chiffons : on le nomme plus ordinairement chiffonnier. Voyez Chiffonnier.

PEINA, (Géog. mod.) en latin du moyen âge Poynum casirum ; petite ville d’Allemagne, au cercle de la Basse-Saxe, dans l’évêché de Hildesheim. Il s’y donna une bataille sanglante en 1553, entre l’électeur Maurice de Saxe qui y fut tué, & le margrave de Brandebourg. Elle est sur le ruisseau de Fuse, à trois milles de Brunswig. Long. 28. 16. lat. 57. 17. (D. J.)

PEINDRE, v. act. & neut. c’est appliquer des couleurs sur une superficie plate, de façon qu’elles représentent un objet quel qu’il soit.

Peindre, signifie quelquefois simplement embellir de divers ornemens une chambre, un cabinet, une galerie, &c. J’ai fait peindre mon cabinet, ma chambre, ma galerie.

Peindre, se dit encore, mais improprement, des gros ouvrages concernant les bâtimens. Il faut peindre ce lambris, ce berceau, cette balustrade de fer, pour empêcher qu’elle ne se rouille : il faudroit dire barbouiller.

On dit je me fais peindre, pour exprimer qu’on fait faire son portrait. J’apprends à peindre ; je veux peindre cette ombre ; il a une belle tête à peindre, c’est-à-dire a un beau caractere de tête, le visage d’un beau coloris.

Voyez sur les diverses manieres de peindre, l’article Peinture.

PEINE, s. f. (Gramm.) on donne en général ce nom à toute sensation, de quelque espece qu’elle soit, qui nous rend notre existence désagréable : il y a des peines de corps & des peines d’esprit. Le dernier degré de la peine, c’est de résigner sincerement l’être souffrant à la perte de la vie, comme à un bonheur. Y a-t-il plus de peines que de plaisirs dans la vie ? C’est une question qui n’est pas encore décidée. On compte toutes les peines ; mais combien de plaisirs qu’on ne met point en calcul ?

Peine, (Droit naturel, civil & politique.) on définit la peine, un mal dont le souverain menace ceux de ses sujets qui seroient disposés à violer les lois, & qu’il leur inflige actuellement & dans une juste proportion, lorsqu’ils les violent, indépendamment de la réparation du dommage, dans la vûe de quelque bien à venir & en dernier ressort, pour la sureté & la tranquillité de la société.

Nous disons, 1°. que la peine est un mal, & ce mal peut être de différente nature, selon qu’il affecte la vie, le corps, l’estime, ou les biens : ce mal peut consister dans quelque travail pénible, ou bien à souffrir quelque chose de fâcheux.

Nous ajoutons en second lieu, que c’est le souverain qui dispense les peines ; non que toute peine en général suppose la souveraineté, mais parce que nous traitons ici du droit de punir dans la société civile, & comme étant une branche du pouvoir souverain. C’est donc le souverain seul qui peut infliger des peines dans la société civile, & les particuliers ne sauroient se faire justice à eux-mêmes, sans se rendre coupables d’un attentat contre les droits du souverain.

Nous disons en troisieme lieu, dont le souverain, &c. pour marquer les premieres intentions du souverain. Il menace d’abord, puis il punit, si la menace n’est pas suffisante pour empêcher le crime. Il paroît encore de-là que la peine suppose toujours le crime, & que par conséquent on ne doit pas mettre au rang des peines proprement ainsi nommées, tous les maux auxquels les hommes se trouvent exposés, sans avoir commis antécédemment quelque crime.

Nous ajoutons, 4°. que la peine est infligée indépendamment de la réparation du dommage, pour faire voir que ce sont deux choses très-distinctes, & qu’il ne faut pas confondre. Tout crime emporte avec soi deux obligations ; la premiere, de réparer le tort que l’on a fait ; la seconde de souffrir la peine, & le délinquant doit satisfaire à l’une & à l’autre. Il faut encore remarquer là-dessus, que le droit de punir dans la société civile, passe au magistrat, qui en conséquence peut, s’il l’estime convenable, faire grace au coupable : mais il n’en est pas de même du droit d’exiger la satisfaction ou la réparation du dommage ; le magistrat ne sauroit en dispenser l’offenseur, & la personne lésée conserve toujours son droit, en sorte qu’on lui fait tort si l’on empêche qu’elle n’obtienne la satisfaction qui lui est dûe.

5°. Enfin, en disant que la peine est infligée dans la vûe de quelque bien, nous indiquons par-là le but que le souverain doit se proposer dans l’infliction des peines ; & c’est ce que nous expliquerons plus particulierement dans la suite. Nous observerons auparavant que les peines sont ou civiles ou criminelles ; les premieres sont pécuniaires, on en est quitte en payant une certaine somme convenue ou reglée par les usages. Les criminelles sont légales ; mais avec cette différence que les unes sont capitales, & les autres ne le sont pas. On appelle peines capitales, celles qui emportent la perte de la vie, ou la privation des droits civils, qu’on appelle mort civile. Les peines qui notent d’infamie, ou qui privent d’une partie du bien que l’on a, ne sont point reputées peines capitales dans le sens propre de ce terme.

Le souverain, comme tel, est non seulement en droit, mais encore il est obligé de punir le crime. L’usage des peines, bien loin d’avoir quelque chose de contraire à l’équité, est absolument nécessaire au repos public. Le pouvoir souverain seroit inutile, s’il n’étoit revêtu du droit, & armé de forces suffisantes pour intimider les méchans par la crainte de quelque mal, & pour le leur faire souffrir actuellement, lorsqu’ils troublent la société par leurs désordres ; il falloit même que ce pouvoir pût aller jusqu’à faire souffrir le plus grand de tous les maux naturels, je veux dire la mort, pour réprimer avec efficace l’audace la plus déterminée, & balancer ainsi les différens degrés de la malice humaine par un contre-poids assez puissant.

Tel est le droit du souverain ; mais si le souverain a droit de punir, il faut que le coupable soit dans quelque obligation à cet égard ; car on ne sauroit concevoir de droit sans une obligation qui y réponde. En quoi consiste cette obligation du coupable ? Est-il obligé d’aller se dénoncer lui-même de gaieté de cœur, & s’exposer ainsi volontairement à subir la peine ? Je réponds que cela n’est pas nécessaire pour le but qu’on s’est proposé dans l’établissement des peines, & qu’on ne sauroit raisonnablement exiger de l’homme qu’il se trahisse ainsi lui-même ; cependant cela n’empêche pas qu’il n’y ait ici quelque obligation.

1°. Il est certain que lorsqu’il s’agit d’une simple peine pécuniaire, à laquelle on a été légitimement condamné, on doit la payer sans attendre que le magistrat nous y force : non seulement la prudence l’exige de nous, mais encore les regles de la justice, qui veulent que l’on répare le dommage, & qu’on obéisse à un juge légitime.

2°. Il y a plus de difficulté pour ce qui regarde les peines afflictives, & sur-tout celles qui s’étendent au dernier supplice. L’instinct naturel qui attache l’homme à la vie, & le sentiment qui le porte à fuir l’infamie, ne permettent pas que l’on mette un criminel dans l’obligation de s’accuser lui-même volontairement, & de se présenter au supplice de gaieté de