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humeurs ; au-moins les Pavavas qui en mangent ne trouvent aucune différence entre ceux qui ont des perles & ceux qui n’en ont pas.

Après avoir nettoyé les fosses des saletés les plus grossieres, on crible le sable plusieurs fois, afin d’on séparer les perles. Mais quelque attention que l’on y ait, on en perd toujours un grand nombre. Quand les perles sont nettoyées & séchées, on les fait passer par une espece de crible proportionné à leur grosseur. Les plus petites sont vendues pour de la semence de perles, les autres le sont au plus offrant.

Maniere de pêcher les perles dans les Indes occidentales. La saison pour cette pêche est ordinairement depuis le mois d’Octobre jusqu’au mois de Mars. Il sort alors de Carthagene dix ou douze barques sous l’escorte d’un vaisseau de guerre, appellé Larmadille. Chaque barque a deux ou trois esclaves qui lui servent de plongeurs.

Parmi les barques il y en a une appellée la Capitane, à laquelle toutes les autres sont obligées d’apporter la nuit ce qu’elles ont pris pendant le jour, afin de prévenir les fraudes. Les plongeurs ne subsistent pas long-tems, à cause du travail excessif qu’on leur fait supporter ; ils restent quelquefois sous l’eau plus d’un quart-d’heure : tout le reste s’y fait de même que dans les pêches des Indes orientales.

Les Indiens connoissoient le prix de leurs perles avant la découverte de l’Amérique ; & quand les Espagnols y arriverent, ils en trouverent une grande quantité qui étoit en réserve, & que les Americains mettoient à un haut prix ; mais elles étoient presque toutes imparfaites d’une eau jaune & enfumée, parce qu’ils avoient coutume de se servir de feu pour ouvrir les poissons où elles se forment. Dans le dictionnaire de commerce il y a une table de la valeur des perles ; elle a été communiquée à l’auteur par une personne très-capable. Comme les perles sont un article fort curieux dans le commerce, & qu’il y a des endroits où leur valeur est peu connue, comme en Angleterre, on va en donner ici un abrégé réduit à la monnoie d’Angleterre. Pour la France, il est évident que l’on doit copier ce qu’en dit le dictionnaire de commerce. Sur le pié de 15. 6 d. sterling la livre de France, ou de 45. 6 d. l’écu de France.

Valeur de toutes sortes de perles par rapport à leurs différens poids.
Semences de perles.
liv. sols. den.
Les semences de perles non-percées propres à être broyées, valent 00. 09.
La belle semence de perles percées pour de petits colliers, ou pour la broderie, 01. 014
De la même espece un peu plus grandes, 01. 16.
Perles irrégulieres.
liv. sols. den.
De 500 à l’once, valent 03. 00.
De 300 06. 00.
De 150 11. 02.
De 100 18. 00.
De 60 33. 15.
De 30 75. 00.
Perles rondes régulieres.
liv. sols. den.
Une perle d’un demi-grain vaut, 00. 00. .
Uned’un grain, 00. 00. .
Uned’un grain & demi, 00. 01. 0.
Unede deux grains, 00. 02. 0.
Unede deux grains & demi, 00. 04. 6.
Unede 3 grains, 00. 07. 6.
Unede 4 grains ou un carat, 00. 18. 0.
Unede 5 grains, 01. 10. 0.
Unede 6 grains, 02. 05. 0.
Unede 7 grains, 03. 01. 0.
Unede 8 grains ou 2 carats, 04. 10. 0.
Unede 9 grains, 06. 00. 0.
Unede 10 grains, 08. 05. 0.
Unede 11 grains, 09. 15. 0.
Unede 13 grains, 13. 05. 0.
Unede 15 grains, 21. 00. 0.
Unede 17 grains, 27. 10. 0.
Unede 20 grains ou 5 carats, 37. 10. 0.
Unede 22 grains, 52. 10. 0.
Unede 24 grains ou 6 carats, 82. 10. 0.
Unede 26 grains, 99. 00. 0.
Unede 28 grains ou 7 carats, 150. 00. 0.
Unede 32 grains ou 8 carats, 225. 00. 0.
Unede 36 grains ou 9 carats, 262. 10. 0.
Unede 40 grains ou 10 carats, 300. 00. 0.

Quant aux perles qui ont une forme de poires, quoiqu’elles soient également parfaites & d’un poids égal à celui des rondes, leur valeur est fort inférieure ; néanmoins quand on en trouve deux qui s’assortissent, se rapportent, ou qui se marient bien ensemble, leur prix n’est qu’à un tiers moindre que celui des perles rondes.

Fausses perles. Ce sont des perles contrefaites ou factices, qui ressemblent aux véritables perles par leur eau ou par leur couleur ; on les appelle vulgairement des grains de collier ou de chapelet.

Autrefois elles n’étoient faites que de verre, avec une teinture de vif-argent en-dessus. Par la suite on se servit de cire, que l’on recouvroit d’une colle de poisson fine & brillante.

On a inventé depuis en France une autre maniere de faire ces sortes de perles ; on les rend si semblables aux naturelles par le lustre & par l’eau, qu’on sait leur donner, que de bons yeux peuvent s’y méprendre : ce sont de celles-là que les femmes en général portent à présent au défaut de vraies perles ; les petits colliers de celles-ci n’étant plus de leur goût, & les grands étant généralement trop chers.

Méthode de faire de fausses perles. On est redevable de cette curieuse invention au sieur Janin : ce qui en releve le prix n’est pas seulement sa simplicité, mais c’est qu’elle n’est point sujette aux mauvais effets de ces fausses perles que l’on fait avec du vif-argent ou avec de la colle de poisson.

Cet ingénieux artiste ayant remarqué que les écailles d’un petit poisson, que l’on appelle albe & que l’on trouve abondamment dans la riviere de Marne, avoient non-seulement tout le lustre de la perle réelle, mais qu’après les avoir réduites en poudre dans l’eau ou bien dans le talcocolle de poisson ; elles reprenoient leur premier lustre, en redevenant seches, il s’avisa d’en mettre un peu dans la cavité d’un grain de collier ou d’un grain de girasole, qui est une espece d’opale ou de verre, tirant beaucoup sur la couleur de perle. La difficulté fut d’y en faire entrer, &, après y être parvenu, de l’étendre également par toute la cavité du grain.

Un petit tube de verre long de 6 ou 7 pouces, d’une ligne & demie de diametre, très-aigu à une extrémité & un peu recourbé, servit à l’introduction de la matiere en la soufflant avec la bouche, après en avoir pris ou enleve une goute avec l’extrémité pointue du tube ; & pour l’étendre par toute la circonférence intérieure, il se contenta de la remuer doucement pendant fort long-tems dans un petit panier d’osier revêtu de papier.

Les écailles étant pulverisées & attachées par ce mouvement à la surface intérieure du grain, reprennent leur lustre à mesure qu’elles deviennent seches. Pour augmenter ce lustre, on met les grains pendant l’hiver dans un crible fait de poil, ou dans une toile