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retenues des conseillers & autres officiers des grands jours, faites à d’autres qu’à ceux qui furent pour lors commis.

Depuis voyant le bien & utilité qui étoit avenu de la tenue de ces grands jours ou parlement, il ordonna successivement que ces grands jours seroient tenus ès mois de Septembre 1494 & 1495 ; ce qui fut ainsi exécuté.

Enfin ayant reconnu qu’il seroit avantageux pour ce pays que l’on y tînt les grands jours une fois l’an à un terme nommé & préfix, & que ce seroit occasionner de grands frais s’il falloit chaque année obtenir des lettres du roi pour faire tenir les grands jours, il ordonna par un édit du 27 Novembre 1495, qui fut publié dans l’assemblée des états de la province, que ces grands jours ou parlement se tiendroient une fois chaque année, depuis le premier Septembre jusqu’au 5 Octobre suivant, par les mêmes présidens, conseillers, & autres officiers qui avoient d’abord été commis, lesquels sont dénommés dans cet édit, sans qu’il fût besoin dorénavant d’obtenir d’autres lettres de provision pour la tenue de ces grands jours ou parlement.

La jurisdiction de ces grands jours ou parlement, n’étoit pas souveraine ; il y avoit appel au parlement de Paris ; cependant les exemples en sont rares. Les ducs de Bretagne empêchoient autant qu’il leur étoit possible, que l’on ne prît cette voie ; il y en a pourtant un exemple dans les rouleaux du parlement de Paris en 1461.

Le second mariage d’Anne de Bretagne avec Louis XII. ni celui de François I. avec Claude de France, fille de Louis XII. & d’Anne de Bretagne, ni la réunion même qui fut faite de la Bretagne à la couronne en 1532, n’apporterent encore aucun changement à l’état du parlement de Bretagne. Il arriva seulement que le roi François I. ayant cédé à Henri II. son fils, alors dauphin de France, la jouissance du duché de Bretagne, il ordonna à la priere de ce prince, par des lettres en forme d’édit, que dans les matieres où il seroit question de 1000 livres de rente & au-dessous, ou de 10000 liv. une fois payés, il n’y auroit aucun ressort par appel des grands jours, ou parlement de Bretagne, au parlement de Paris, comme cela avoit lieu auparavant ; mais que les jugemens donnés sur ces matieres sortiroient nature d’arrêt.

Ces lettres ayant été présentées au parlement de Paris pour y être enrégistrées, le procureur général y forma opposition.

Mais François I. étant décédé en 1547, cela leva les obstacles. Henri II. par un édit du mois de Septembre 1551, ordonna l’exécution de celui du roi son pere, & néanmoins ayant aucunement égard aux motifs allégués par le procureur dans son opposition, il modifia cet édit, & ordonna que dans les matieres où il seroit question de 150 liv. tournois de rente, & de 3000 liv. tournois à une fois payer, il n’y auroit aucun ressort par appel des jugemens, soit interlocutoires ou définitifs, sur ce donnés par les grands jours ou parlement de Bretagne, au parlement de Paris ; mais qu’ils sortiroient nature d’arrêt exécutoire nonobstant ledit appel.

Cet édit fut enregistré au parlement de Bretagne le 17 Septembre 1551, & dans celui de Paris le premier Octobre 1552.

Mais les grands jours ou parlement de Bretagne, ne furent érigés en cour absolument souveraine, & sous le titre de parlement, que par l’édit du roi Henri II. du mois de Mars 1553. Les motifs exposés dans cet édit sont que la séance des grands jours étoit si breve, qu’elle ne suffisoit pas pour expédier toutes les affaires ; que d’ailleurs ces grands jours n’étant pas souverains, c’étoit un degré de jurisdiction qui

ne servoit qu’à fatiguer les parties & éterniser les procès.

Par cet édit Henri II. établit un parlement & siége ordinaire de justice souveraine audit pays & duché de Bretagne, lequel devoit être composé de deux chambres pour être exercé & tenu par quatre présidens & trente-deux conseillers, qui serviroient alternativement, savoir seize non originaires du pays, lesquels ensemble les quatre présidens seroient pris & choisis dans les autres pays de l’obéissance du roi, soit présidens, maîtres des requêtes ordinaires de l’hôtel du roi, ou conseillers des autres cours souveraines, ou autres, & que les seize autres conseillers seroient pris des originaires du pays.

Il créa par le même édit deux avocats pour lui, dont il ne pourroit y en avoir qu’un originaire du pays ; un procureur général, deux greffiers, l’un civil, l’autre criminel ; six huissiers, un receveur & payeur des gages, un receveur des amendes, un garde & concierge pour administrer les menues nécessités.

Chaque chambre devoit être composée de deux présidens, seize conseillers, un des deux avocats du Roi.

Il fut aussi ordonné que ce parlement seroit tenu & exercé en deux séances & ouvertures ; l’une en la ville de Rennes durant trois mois, savoir Août, Septembre & Ocvtobre, & que durant les mois de Novembre, Décembre & Janvier, il y auroit vacations ; que l’autre séance & ouverture se tiendroit en la ville de Nantes, qu’elle seroit de service pendant les mois de Février, Mars & Avril, & les mois de Mai, Juin & Juillet pour les vacations.

La premiere séance pour laquelle furent députés les premier & troisieme présidens, commença au mois d’Août, & la seconde où furent députés les second & quatrieme présidens, commença au premier Février, suivant l’édit.

Et au cas que durant ces deux séances, ou l’une d’icelles, les procès par écrit, appellations verbales, ou autres matieres civiles qui seroient instruites & en état d’être jugées, ne fussent pas décidées durant les trois mois ordonnés pour chacune desdites ouvertures & séances, il est ordonné que les présidens & conseillers procéderont au jugement desdits procès & matieres instruites, avant que de desemparer chacune desdites séances, dont le roi charge leur honneur & conscience, sans néanmoins que lesdits présidens, conseillers & autres officiers, fussent tenus en chacune desdites séances, de vaquer en tout plus de quatre mois.

Il est encore dit que les conseillers & présidens de chacune desdites chambres, moyennant ladite érection, connoîtront & jugeront en dernier & souverain ressort, de tous différends & matieres survenant audit pays, civiles, criminelles, mixtes, leurs circonstances, sequelles & dépendances d’icelles, entre quelques personnes, & pour quelque cause & valeur que ce soit, au nombre des présidens ou conseillers requis par les ordonnances ; comme aussi des matieres de régale, & jurisdictions temporelles des évêques dudit pays, prééminence d’église, contention des ressorts différens des siéges présidiaux, malversation d’iceux, & d’autres juges inférieurs, appellation des jugemens donnés par le grand maître des eaux & forêts, ou ses lieutenans, sans qu’elles puissent ressortir ailleurs par appel ni autrement, pour quelque somme & considération que ce soit, & des autres, selon l’édit de la création des présidiaux qui excéderont 10 liv. de rente, ou 250 liv. une fois payées ; le roi révoquant à cette fin le pouvoir qu’il avoit donné aux présidiaux pour connoître en souveraineté des matieres criminelles par la suppression du conseil, ou grands jours dudit pays ; en-