Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 12.djvu/5

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

couronne, par la reserve des cas royaux, par l’utilité que l’on trouva dans l’administration ordinaire de la justice, les séances du parlement devinrent plus longues.

Sous Louis VIII. en 1226, on en trouve jusqu’à six, tant pour affaires publiques que pour les affaires des particuliers. Sous saint Louis il y en avoit presque toujours quatre par an, mais il y en avoit deux qui étoient comme de regle dès le tems des olim, savoir à la Pentecôte & aux octaves de la Toussaint. Les olim remarquent en 1262, comme une singularité qu’il n’y en eût point à la Pentecôte à cause des noces de Philippe, fils du roi, lesquelles furent célébrées à Clermont ; les autres séances se tenoient aussi vers le tems des grandes fêtes, telles que l’Ascension, à Noel, à la Chandeleur ; on disoit le parlement de la Chandeleur, & ainsi des autres.

En 1302 on ne trouve que deux jugemens en la chambre du plaidoyer, & douze ou quinze sur enquêtes.

Les deux séances ordinaires fixées à Paris par l’ordonnance du 23 Mars 1302 se tenoient, l’une à l’octave de Pâques, l’autre après l’octave de la Toussaint ; chaque séance ne devoit durer que deux mois. Le rôle de Philippe-le-Bel pour l’année 1306 regle encore de même chaque séance, mais cela ne s’observoit pas toujours régulierement, car il ne tint qu’une fois en 1304 ; & depuis 1308 jusqu’en 1319, où finissent les olim, il n’y eut de même qu’un seul parlement par an.

Aussi l’ordonnance du 17 Novembre 1318 porte-t-elle qu’après toutes les causes délivrées le parlement finira, & que l’on publiera le nouveau parlement ; la séance d’hiver commençoit au mois de Novembre, elle se prolongeoit quelquefois jusqu’au mois d’Avril & même jusqu’au mois d’Août, suivant l’abondance des affaires, de sorte qu’au lieu de quatre, six séances on n’en distingua plus que deux, celle de la Toussaint ou de la saint Martin, & celle de Pâques ou Pentecôte, lesquelles furent aussi bien-tôt confondues, l’on tient même communément que depuis 1291 les deux parlemens s’étoient réunis en un seul, & continué pendant toute l’année ; que par cette raison les lettres de chancellerie qui devoient être renouvellées à chaque tenue de parlement, selon la regle ancienne, ne se renouvelloient plus qu’après l’an & jour.

Il y eut pourtant encore un réglement en 1314, pour le cas où le parlement tiendroit deux fois par an ; mais l’ordonnance du mois de Décembre 1320. suppose que le parlement duroit toute l’année, & celle de 1344 parle de la tenue de deux parlemens par an, comme d’une chose cessée depuis longues années, cum à magnis retroactis temporibus quibus parlamentum bis in anno quolibet teneri solebat.

Aussi voit-on dans les registres du xiv. & xv. siecles, que la rentrée de Pâques se faisoit sans cérémonie le mercredi, lendemain des trois fêtes de Pâques.

Depuis que le parlement eut été rendu sédentaire à Paris, il ne laissoit pas d’être quelquefois long-tems sans s’assembler ; il n’y en eut point en 1303 ni en 1305, il ne se tint qu’une fois en 1304 ; il n’y en eut point en 1315 ; il y a des intervalles de six ou sept mois, propter guerram, sur-tout sous Philippe de Valois.

La police féodale qui s’établit vers la fin de la seconde race, changea la forme du parlement ; on y admettoit bien toujours les barons, mais on ne donnoit plus ce titre qu’aux vassaux immédiats de la couronne, soit laïcs ou ecclésiastiques, lesquels depuis ce tems furent considérés comme les seuls grands du royaume.

Mais au lieu que l’on donnoit anciennement le titre de pair à tous les barons indifféremment, la pairie

étant devenue réelle, on ne donna plus le titre de pair qu’à six des plus grands seigneurs laïques & à six évêques.

Les simples nobles n’entroient pas au parlement, à moins que ce ne fût comme ecclésiastiques, ou qu’ils n’eussent la qualité de maîtres du parlement, titre que l’on donna à certaines personnes choisies pour tenir le parlement avec les barons & prélats.

Les évêques & abbés, qu’on appelloit tous d’un nom commun les prélats, avoient presque tous entrée au parlement, les uns comme pairs, d’autres comme barons.

Les hauts barons laïcs, y compris les six pairs, ne montoient pas au nombre de trente.

A l’égard des évêques barons, ils se multiplierent beaucoup à mesure que le royaume s’accrut par la réunion de différentes provinces à la couronne.

Les barons ou pairs, tant ecclésiastiques que laïques, étoient alors obligés de se trouver assiduement au parlement, pour y juger les affaires qui étoient de leur compétence.

On trouve en effet qu’en 1235 les barons laïcs se plaignoient de ce que l’archevêque de Reims & l’évêque de Beauvais, malgré le devoir de leurs baronies & la loi de leur féauté, ne vouloient pas se rendre au parlement. Cum regis sint ligii & fideles, & ab ipso per homagium teneant sua temporalia in paritate & baronia, in hanc contra ipsum insurrexerunt audaciam, quod in sua curiâ jam nolunt de temporibus respondere, nec in suâ curiâ jus facere.

Les barons, indépendamment des causes des pairs, jugeoient les affaires de grand criminel : il y en a un exemple des l’an 1202, pour l’affaire du roi d’Angleterre.

Les affaires dont le parlement prenoit connoissance, se multiplierent principalement par la voie d’appel, qui devint plus fréquente sous Saint Louis, & la décision en devint plus difficile par les ordonnances qu’il fit, & par les formes qui furent établies ; ce qui obligea Saint Louis d’introduire dans le parlement des gens lettrés, pour aider de leurs lumieres les barons, qui ne savoient la plûpart ni lire ni écrire ; ces gens de loi n’avoient d’abord que voix consultative, mais on leur donna bien-tôt voix délibérative.

Suivant une ordonnance non imprimée qui est au trésor des chartes, & dont on ne trouve pas la date, mais qui ne peut être devant 1294, ni postérieure à 1298, il paroît que le roi avoit dès-lors intention d’insérer tous les deux ou trois ans dans les lettres qu’il donnoit pour l’ouverture de chaque parlement, les noms des barons & des clercs qui auroient entrée au parlement ; ce qui fait croire que dès-lors & même long-tems auparavant, il n’y avoit que les pairs qui eussent conservé le droit d’y entrer par le titre seul de leur dignité.

L’ordonnance de Philippe-le-Bel en 1291, porte qu’il devoit y avoir chaque jour pendant le parlement pour entendre les requêtes, trois personnes du conseil du roi qui ne fussent point baillis ; il nomme ces trois personnes, auxquelles il donne le titre de maîtres : le dernier avoit aussi la qualité de chevalier.

Les baillis & sénéchaux avoient anciennement entrée, séance & voix délibérative au parlement ; mais depuis que l’usage des appellations fut devenu plus fréquent, ils furent privés de la voix délibérative, comme il paroît par l’ordonnance de Philippe-le-Bel, faite après la Toussaint 1291, qui ordonne de députer du conseil du roi un certain nombre de personnes ; tant pour la grand’chambre que pour l’auditoire de droit écrit & pour les enquêtes, mais que l’on ne prendra point de baillis & sénéchaux.

Les baillis & sénéchaux conserverent cependant leur entrée & séance en la grand’chambre, sur le banc appellé de leur nom banc des baillis & sénéchaux,