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teint point en pourpre les matieres animales telles que la peau, les os, les plumes, &c. ni le marbre, comme on sait que l’eau fait la dissolution d’or. La platine dissoute ne se précipite pas non plus d’une couleur pourpre par le moyen de l’étain, comme la dissolution d’or. La platine n’est point dégagée de son dissolvant ni par le vitriol martial, ni par l’esprit de vin, ni par les huiles essentielles, comme il arrive à l’or.

L’alkali fixe & l’alkali volatil précipitent la platine dissoute sous la forme d’une poudre rouge brillante semblable à du minium qui ne détonne point comme l’or fulminant. Cependant les sels alkalis ne précipitent point totalement la platine, & le dissolvant reste toujours coloré jusqu’à un certain point.

L’acide vitriolique précipite la platine dissoute : elle est aussi précipitée, quoique fort imparfaitement, par le zinc, par le fer, par le cuivre, par le mercure, par l’or. Les précipités que l’on obtient de ces différentes manieres, ne sont point propres à colorer le verre, comme ceux des autres métaux.

La platine s’allie par la fusion à tous les métaux & demi-métaux ; ces alliages exigent différens degrés de feu qui doivent être toujours très-violens ; cependant elle marque plus de disposition à s’allier à quelques métaux qu’avec d’autres ; il paroît pourtant que dans ces sortes d’alliages il ne se fait qu’un mélange, & non une combinaison intime & parfaite. La platine durcit tous les métaux avec lesquels elle est alliée, leur ôte leur ductilité, & les rend cassans ; tous ces alliages, lorsqu’on les pese à la balance hydrostatique, ont, suivant M. Lewis, un poids moindre que le calcul ne l’annonçoit ; ce savant chimiste a donné une table des pesanteurs de ces différens alliages ; mais M. Scheffer a fait voir dans son dernier mémoire que souvent il s’est trompé dans ses calculs, & il prouve que la plûpart des alliages métalliques faits avec la platine ont une pesanteur spécifique plus grande que celle qui étoit indiquée par le calcul. En effet la balance hydrostatique est un moyen très-peu sûr pour connoître la pesanteur des alliages métalliques. Voyez Métaux.

L’étain allié avec la platine donne une matiere cassante, d’une couleur plus foncée que celle de l’étain pur, & qui devient terne à l’air.

Le plomb allié avec cette substance donne une masse d’une couleur de fer foncée, ou purpurine, qui se ternit à l’air, & qui est d’un tissu feuilleté ou fibreux ; le plomb acquiert par cet alliage un plus grand degré de dureté que tous les autres métaux.

La platine a plus de peine à s’allier avec l’argent ; il y a même une portion qui ne fait point d’union avec lui, & qui se précipite au fond du creuset pendant qu’il se refroidit. Par cette union, l’argent perd sa malléabilité, mais moins qu’avec l’étain ou le plomb. La couleur de l’argent est altérée très-foiblement par cet alliage.

Un alliage de parties égales de platine & d’or est d’un jaune plus pâle que l’or seul ; il est dur à la lime, devient aigre & cassant ; mais lorsqu’on le remet au feu, l’alliage devient assez ductile. S’il y a quatre parties d’or contre une de platine, l’alliage est assez ductile pour pouvoir être battu en lames très-minces sans se casser ; en le fondant avec du borax & du nitre, il devient fort pâle.

La platine augmente la dureté du cuivre, sans lui ôter ni sa couleur ni sa ductilité, lorsqu’elle n’y est qu’en petite quantité ; mais quand on en met beaucoup, l’alliage éclate sous le marteau. Cet alliage prend un très-beau poli, & ne se ternit point à l’air aussi promptement que le cuivre seul.

Le fer forgé ne peut s’allier avec la platine ; mais elle s’unit avec le fer de fonte ou le potin ; elle le rend si dur que la lime n’a point de prise sur lui ; il

devient par-là si tenace & si ductile, qu’il est très-difficile à casser. Cet alliage est composé de grains d’une couleur foncée dans la fracture.

La platine, suivant M. Lewis, paroît former un commencement d’union avec le mercure ; mais selon M. Scheffer, elle ne s’y unit pas du tout ; il ajoute que l’on peut employer ce moyen pour séparer l’or, lorsqu’il est allié avec de la platine, le mercure s’amalgamera avec l’or, & ne touchera point à la platine.

Alliée avec le bismuth, la platine ne change rien à sa consistance ; la masse est fragile, se ternit à l’air, & est d’un gris bleuâtre dans la fracture ; alliée avec le zinc, elle le rend plus dur & si aigre qu’il éclate sous le marteau. Son alliage avec le régule d’antimoine est dur, résiste à la lime, & est d’une nuance plus foncée que le régule seul.

Un des phénomènes les plus singuliers que présente la platine, c’est la facilité avec laquelle l’arsenic la fait entrer en fusion ; elle est au point qu’une partie de ce demi-métal suffit pour fondre 24 parties de platine. Il résulte de cet alliage une composition cassante & grise dans la fracture. Cette expérience est dûe à M. Scheffer ; M. Lewis ne l’avoit point tentée, ne croyant pas que le corps le plus fixe au feu de la nature pût se fondre à l’aide de l’arsenic qu’une chaleur assez foible dissipe & volatilise.

La platine alliée avec le laiton ou cuivre jaune, le blanchit, le durcit, le rend aigre, & forme une masse qui prend très-bien le poli. Si on allie la platine avec du cuivre & de l’étain, l’alliage qui résulte est plus sujet à se ternir que celui du cuivre seul sans étain.

La platine jointe avec du plomb résiste à la coupelle, comme l’or, il se fait un iris ; mais l’éclair ne se forme point parfaitement, parce que la platine retient toujours une portion du plomb, dont elle empêche l’entiere scorification, & l’on ne peut plus séparer cette portion de plomb, quelque degré de feu qu’on emploie. Pareillement lorsqu’on coupelle un alliage d’or & de platine, ou bien d’argent & de cette substance, le bouton qui reste sur la coupelle retient une quantité de plomb assez considérable.

Si on se sert du bismuth pour coupeller la platine, elle en retient aussi une portion.

Elle résiste pareillement à l’antimoine, & en retient une portion qu’elle garantit contre l’action du feu, & qu’elle empêche de se dissiper. La platine retient aussi une portion du zinc qui s’est uni avec elle par la déflagration.

Ces dernieres expériences font voir que la coupelle & la purification par l’antimoine, sont des moyens insuffisans pour dégager l’or d’avec la platine. Lorsqu’on voudra y parvenir, on n’aura qu’à faire dissoudre l’or allié avec de la platine dans de l’eau régale, & mettre du vitriol martial dans la dissolution, il précipitera l’or seul, n’ayant pas la propriété de précipiter la platine ; on édulcorera le précipité, on l’amalgamera avec le mercure qui, comme il a été dit plus haut, ne s’unit point non plus avec la platine, & par-là l’or seul restera dans l’amalgame.

De toutes les expériences qui viennent d’être rapportées, on conclud que la platine, & par-là l’or seul restera dans l’amalgame.

De toutes les expériences qui viennent d’être rapportées, on conclud que la platine est un métal particulier, qui a plusieurs propriétés communes avec l’or, & qui d’un autre côté en differe à bien des égards ; la platine n’a point sa ductilité, ni sa ténacité, ni sa couleur ; elle est beaucoup plus dure, & n’entre point en fusion au degré de feu le plus violent. Les propriétés qui lui sont communes avec l’or, sont sa pesanteur, sa dissolution dans l’eau régale & dans le foie de soufre, la faculté de résister au plomb