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tout-autour, comme si c’étoit du plomb noir. Voyez Bordoyer, Bordement.

Plomber un arbre, (Jardinage.) c’est après qu’un arbre est planté d’alignement dans la terre, & comblé jusqu’au niveau de l’allée, peser du pié sur la terre pour l’affermir & l’assurer à demeure. (D. J.)

Plomber, en terme de Potier de terre ; c’est vernisser de la vaisselle de terre avec de la mine de plomb. Les Potiers emploient ordinairement à cet usage de l’alquifoux ou plomb minéral, du plomb en poudre, qui se fait en jettant du charbon pilé dans du plomb en fusion, & des cendres de plomb, qui ne sont autre chose que son écume & ses scories. Voyez Alquifoux, Plomb en poudre & Potier de terre.

PLOMBERIE, s. f. (Art méchanique.) De la plomberie en général. Sous le nom de plomberie on entend l’art d’employer le plomb, de lui donner des formes convenables aux lieux où il doit être placé. Ce mot vient du latin plumbus plomb, métal qui fait le principal objet de cet art.

Ce métal est un minéral qui se tire en France de quelques mines fort peu abondantes, encore n’est-il question que de celles du Limosin ; celles de Limarès en Espagne ne le sont pas beaucoup davantage. Il en vient d’Allemagne par la voie de Chambourg sous la forme de navette. Les Hollandois en tirent aussi de Pologne qu’ils envoient en différens pays ; mais presque tout celui que l’on voit en France, vient d’Angleterre sous la forme de saumons, (fig. 2.) & se tire des mines de Neucastel, du Derby, de Combmartin, & sur-tout de celles de Péak, où la pierre minérale se trouve presque sur la surface de la terre ; ce qui fait que ces mines s’exploitent fort facilement & le plus souvent de plain-pié & à découvert. Le plomb que l’on en tire, est sans contredit le plus pur & le plus sain de tous, & par conséquent le meilleur.

La mine de plomb que l’on nomme aussi plomb minéral, est noire, quoique cependant en la cassant elle semble être remplie intérieurement d’une infinité de petits filets blancs qui ressemblent à ceux que l’on voit dans l’antimoine. On en tire d’assez gros morceaux quelquefois purs, mais le plus souvent mêlés de roche.

Pour fondre cette mine on la met dans un fourneau fait exprès avec beaucoup de feu & de charbon par-dessus. Le plomb fondu coule par un canal pratiqué à côté, & la terre & les pierres restent avec les cendres du charbon. On le purifie ensuite avant qu’il soit figé en écumant, & en y jettant des suifs, graisses ou résines ; cette écume appellée plomb des potiers de terre, leur est de grande utilité pour leurs ouvrages ; les moules où on le reçoit ont la forme de navette ou de saumons (fig. 1. & 2.) noms que l’on donne aux masses de plomb qu’on en tire, dont les unes pesent environ deux cens livres, & les autres cent vingt ou cent trente livres ; il se vend ainsi chez les marchands de fer depuis vingt-cinq jusqu’à trente francs le cent pesant, & pese environ huit cens livres le pié cubique : on appelloit autrefois les marchands saumons, & les plombiers navettes.

Quoique le plomb soit fort facile à fondre, les fondeurs anglois y emploient cependant de grands feux, & sont très-attentifs à ne placer leurs fourneaux que sur des lieux élevés, & à les exposer au vent d’ouest, pour en rendre, par cette exposition, la chaleur plus vive, plus grande, exploiter plus de mine, & consommer moins de bois. D’habiles Physiciens ont cru que le poids du plomb augmentoit à l’air ; d’autres ont cru qu’il pourroit se produire dans les mines déja épuisées, en les laissant long-tems reposer, l’expérience nous a appris depuis que les uns &

les autres s’étoient également trompés, & que rien n’étoit plus faux que leur système.

Quelques savans qui l’ont analysé, ont trouvé qu’il étoit composé d’un peu de soufre & de mercure ; mais de beaucoup de terre bitumineuse. Les Chimistes l’appellent saturne : en général, c’est de tous les métaux le plus mou & le plus facile à fondre lorsqu’il est purifié.

Le plomb est d’une grande utilité, non-seulement dans les bâtimens pour les couvertures, terrasses, réservoirs, conduites d’eau, ainsi que pour les figures, statues & ornemens d’architecture, mais encore pour l’affinage de tous les métaux, comme le cuivre, l’argent & l’or, auxquels on prétend qu’il communique son humidité : on s’en sert encore dans les ouvrages de vitrerie, balancerie, chauderonnerie, bimbeloterie, poterie de terre & d’étain, ainsi que pour la guerre & la chasse, où l’on ne laisse pas que d’en faire une grande consommation.

Les anciens, tel que Pline & quelques-autres, confondoient le plomb avec un autre mineral à peu-près semblable, qu’ils ne distinguoient que par la couleur. Cette autre espece est l’étain, que l’on tire des mêmes mines, mais en beaucoup plus petite quantité ; raison pour laquelle il est infiniment plus cher ; il est plus blanc, plus dur & plus facile à fondre que le précédent. On l’emploie à souder le plomb & tous les autres métaux ; il est évident que quelques modernes ne se sont pas moins trompés pour avoir adopté le sentiment des anciens, ou pour avoir mal interprété le savant naturaliste, qui, dans son traité des propriétés de ce minéral, rapporte qu’il est propre à souder les autres métaux ensemble, & à d’autres opérations chimiques, ce qui ne peut mieux convenir qu’à l’étain.

La plomberie est donc l’art de donner au plomb les formes que l’on juge à-propos, selon les différentes occasions que l’on a de l’employer : on la divise en trois especes ; la premiere est la fonte du plomb, la seconde en est le couler, & la troisieme est la maniere de le souder.

De la fonte du plomb. La fonte du plomb n’est point merveilleuse ; elle est au-contraire très-simple, le plomb étant de tous les métaux le plus facile à fondre : on n’est pas obligé pour cela d’employer une chaleur aussi grande & aussi vive que pour tous les autres métaux : tout cet art ne consiste qu’à mettre le plomb que l’on veut fondre dans un vaisseau de fer quelconque capable de le contenir, tel par exemple qu’une cuilliere de fer (figure 3.) & le présenter ensuite au feu jusqu’à ce qu’il devienne liquide. Si cette quantité monte beaucoup au-dessus de vingt-cinq ou trente livres, qu’on ne pourroit porter facilement à la main, on est obligé alors d’avoir recours à une marmite (figure 4.) ou poële (figure 5.) de fer ou de fonte que l’on pose à terre, & au premier endroit, dans laquelle on met le plomb : on enveloppe ensuite le tout d’un feu de bois ou de charbon pour échauffer & faire fondre plus promptement la masse du plomb ; & c’est-là la maniere dont les Plombiers se servent le plus souvent, lorsqu’ils n’en ont besoin que d’une petite quantité, surtout lorsqu’ils travaillent en ville[1]. Si l’on a besoin pour de certains ouvrages d’entretenir liquide cette même quantité de plomb, on se sert à cet effet (ce qui économise beaucoup le charbon) d’une autre espece de poële de fer, fig. 6. & 7. appellée polastre, plus grande, de forme quarrée, circulaire ou ovale, dans laquelle (fig. 7.) on met le feu & la marmite qui contient le plomb ; ce feu ainsi concentré contient plus de chaleur & consomme moins de charbon : ce po-

  1. On dit communément qu’un homme travaille en ville, lorsque son ouvrage se fait chez le propriétaire & hors de l’attelier.