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habile mathématicien. MM. Bernoulli, Fatio, Herman, & plusieurs autres, en ont aussi donné des solutions ; & dans les mém. de l’académ. de 1733, M. Bouguer a résolu ce problème d’une maniere fort générale, en ne supposant point que le solide qu’on cherche soit un solide de révolution, mais un solide quelconque. Voici l’énoncé du problème tel que M. Bouguer l’a résolu. Une base exposée au choc d’un fluide étant donnée, trouver l’espece de solide dont il faut la couvrir, pour que l’impulsion soit la moindre qu’il est possible.

J’ai dit dans mon Traité des fluides, que toutes les solutions qu’on a données de ce problème depuis M. Newton inclusivement, ne répondoient pas exactement à la question ; si on excepte celles où la masse du solide est supposée donnée. Car il ne suffit pas de chercher & de trouver celui d’entre tous les solides qui ont le même axe & la même base avec le même sommet, sur lequel l’impulsion de l’eau est la moindre qu’il est possible ; il faut de plus diviser cette impulsion par la masse entiere, pour avoir l’effet qu’elle produit, & qui est proprement le minimum qu’on cherche.

Cependant les solutions que les auteurs déjà cités ont données du probleme dont il s’agit, peuvent être regardées comme exactes, pourvû qu’on suppose que la résistance du fluide soit continuellement contrebalancée par une force égale & contraire, en sorte que le solide se meuve uniformément En ce cas, il est inutile d’avoir égard à la masse du solide ; & pourvû qu’on lui donne la figure qui est déterminée par la solution, ce solide ira plus vîte que tout autre qui seroit poussé par la même force. Par exemple, un vaisseau dont la proue auroit cette figure, étant poussé par un vent d’une certaine force déterminée, ira plus vîte que tout autre vaisseau dont la proue auroit une figure différente. Ainsi la solution du problème est exacte, quant à l’application qu’on veut en faire au mouvement des vaisseaux ; mais elle ne le sera plus lorsqu’on supposera un solide entierement plongé dans un fluide, & qui s’y mouvra d’un mouvement retardé en éprouvant toujours de la résistance, sans qu’aucune force lui rende le mouvement qu’il perd à chaque instant.

La résistance d’un globe parfaitement dur, & dans un milieu dont les particules le sont aussi, est à la force avec laquelle tout le mouvement qu’il a dans le tems qu’il a décrit l’espace de quatre tiers de son diametre, peut être ou détruit ou engendré, comme la densité du milieu est à la densité du globe. M. Newton conclut aussi de-là que la résistance d’un globe est, toutes choses égales, en raison doublée de sa vîtesse ; que cette même résistance est, toutes choses égales, en raison doublée de son diametre ; ou bien, toutes choses égales, comme la densité du milieu. Enfin, que la résistance actuelle d’un globe est en raison composée de la raison doublée de sa vîtesse, de la raison doublée du diametre, & de la raison de la densité du milieu.

Dans ces propositions on suppose que le milieu n’est point continu ; si le milieu est continu comme l’eau, le mercure, &c. où le globe ne frappe pas immédiatement sur toutes les particules du fluide qui occasionne la résistance, mais seulement sur celles qui en sont proches voisines, & celles-là sur d’autres, &c. la résistance sera moindre de moitié ; & un globe placé dans un tel milieu éprouve une résistance qui est à la force avec laquelle tout le mouvement qu’il a après avoir décrit huit tiers de son diametre, doit être engendré ou détruit, comme la densité du milieu est à la densité du globe.

La résistance d’un cylindre qui se meut dans la direction de son axe, n’est point altérée par aucune augmentation ou diminution de sa longueur ; & par

conséquent elle est la même que celle d’un cercle du même diametre, qui se meut avec la même vîtesse sur une ligne droite perpendiculaire à son plan.

Si un cylindre se meut dans un fluide infini & sans élasticité, la résistance résultante de la grandeur de sa section transverse, est à la force avec laquelle tout son mouvement, tandis qu’il décrit quatre fois sa longueur, peut être engendré ou anéanti, comme la densité du milieu est à celle du cylindre, du-moins à peu de chose près.

Ainsi les résistances des cylindres qui se meuvent suivant leur longueur dans des milieux continus & infinis, sont en raison composée de la raison doublée de leurs diametres, de la raison doublée de leurs vîtesses, & de la raison de la densité des milieux.

La résistance d’un globe qui est mu dans un milieu infini & sans élasticité, est à la force par laquelle tout son mouvement peut être engendré ou détruit, tandis qu’il parcourt huit tiers de son diametre, comme la densité du fluide est à la densité du globe, à très-peu près.

M. Jacques Bernoulli a démontré les théorèmes suivans.

Résistance d’un triangle. Si un triangle isocele est mû dans un fluide suivant la direction d’une ligne perpendiculaire à sa base, d’abord par sa pointe, ensuite par sa base ; la résistance dans le premier cas, sera à la résistance dans le second cas, comme le quarré de la moitié de la base est au quarré d’un des côtés.

La résistance d’un quarré mû suivant la direction de son côté, est à la résistance de ce même quarré mû suivant la direction de sa diagonale, comme le côté est à la moitié de la diagonale.

La résistance d’un demi-cercle qui se meut par sa base, est à sa résistance, lorsqu’il se meut par son sommet, comme 3 est à 2.

En général, les résistances de quelque figure plane que ce soit qui se meut par sa base, ou par son sommet, sont comme l’aire de la base à la somme de tous les cubes des dy, divisés par le quarré de l’élément de la ligne courbe. dy est supposée l’elément des ordonnées paralleles à la base.

Toutes ces regles peuvent être utiles jusqu’à un certain point dans la construction des vaisseaux. Voyez Vaisseau, &c. Chambers.

Telles sont les lois que l’on donne ordinairement dans la méchanique sur la résistance des fluides au mouvement des corps. Cependant on doit regarder ces regles comme beaucoup plus mathématiques que physiques ; & il y en a plusieurs auxquelles l’expérience n’est pas tout-à-fait conforme. En effet, rien n’est plus difficile que de donner sur ce sujet des regles précises & exactes : car non-seulement on ignore la figure des parties du fluide, & leur disposition par rapport au corps qui les frappe, on ignore encore jusqu’à quelle distance le corps agit sur le fluide, & quelle route les particules prennent lorsqu’elles ont été mises en mouvement par ce corps Tout ce que l’expérience nous apprend, c’est que les particules du fluide, après avoir été poussées, se reglissent ensuite derriere le corps, pour venir occuper l’espace qu’il laisse vuide par-derriere.

Voici donc le meilleur plan qu’il paroisse qu’on puisse se proposer dans une recherche de la nature de celle-ci : on déterminera d’abord le mouvement qu’un corps solide doit communiquer à une infinité de petites boules, dont on le supposera couvert. On peut faire voir ensuite que le mouvement perdu par ce corps dans un instant donné, sera le même, soit qu’il choque à la fois un certain nombre de couches de ces petites boules, soit qu’il ne les choque que successivement : que de plus, la résistance seroit la même quand les particules du fluide auroient