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On voit dans plusieurs endroits de cette peau des poils courts & noirs. Au-dessous de la partie nue du cou, il y a une espece de collier formé par des plumes assez longues d’un cendré foncé : ce collier entoure le cou, & descend un peu vers la poitrine : le reste du cou, le dos & les petites plumes des ailes sont d’un blanc mêlé d’une légere teinte de roussâtre. Le croupion & les plumes du dessus de la queue ont une couleur noire. (Le roi des vautours qu’Ewards a décrit, avoit le croupion & les plumes du dessus de la queue blancs.) La poitrine, le ventre, les côtés du corps, les jambes, les plumes du dessous de la queue & celles de la face inférieure des ailes sont blancs. La couleur des grandes plumes de l’aile est d’un noir changeant en un verd très-obscur ; les moyennes sont de la même couleur, & elles ont les bords extérieurs gris ; la queue est noire, le bec, les piés & les ongles sont rouges. On trouve cet oiseau à Cayenne. Derham l’a décrit sous le nom de vautour des Indes. Ornit. de M. Brisson, tom. I. Voyez Oiseau.

Roi, (Gouvern. polit.) Voici les vers qu’il faut graver sur la porte des palais des rois.

Hoc reges habent
Magnificum & ingens, nulla quòd rapit dies
Prodesse miseris, supplices fido lare protegere.

Le plus beau présent que les Dieux puissent faire aux hommes, c’est d’un roi qui aime son peuple & qui en est aimé, qui se confie en ses voisins & qui a leur confiance, enfin qui par sa justice & son humanité fait envier aux nations étrangeres le bonheur qu’ont ses sujets de vivre sous sa puissance.

Les oreilles d’un tel roi s’ouvrent à la plainte. Il arrête le bras de l’oppresseur : il renverse la tyrannie. Jamais le murmure ne s’eleve contre lui ; & quand les ennemis s’approchent, le danger ne s’approche point. Ses sujets forment un rempart d’airain autour de sa personne ; & l’armée d’un tyran fuit devant eux comme une plume légere au gré du vent qui l’agite.

« Favori du ciel, dit le bramine inspiré, toi à qui les fils des hommes tes égaux, ont confié le souverain pouvoir ; toi qu’ils ont chargé du soin de les conduire, regarde moins l’éclat du rang que l’importance du dépôt. La pourpre est ton habillement, un trône ton siege : la couronne de majesté pare ton front : le sceptre de la puissance orne ta main ; mais tu ne brilles sous cet appareil qu’autant qu’il sert au bien de l’état. »

Quant à l’autorité des rois, c’est à moi de m’y soumettre ; & c’est à l’auteur de Télemaque qu’il appartient d’en établir l’étendue & les bornes.

Un roi, dit-il, liv. V. p. 168 ; un roi peut tout sur les peuples : mais les lois peuvent tout sur lui. Il a une puissance absolue pour faire le bien, & les mains liées s’il vouloit faire le mal. Les lois lui confient les peuples comme le plus précieux de tous les dépôts, à condition qu’il sera le pere de ses sujets : elles veulent qu’un seul homme serve par sa sagesse & sa modération, à la félicité de tant d’hommes ; & non pas que tant d’hommes servent par leur misere & par leur servitude, à flatter l’orgueil & la mollesse d’un seul homme.

Un roi ne doit rien avoir au-dessus des autres, excepté ce qui est nécessaire, ou pour le soulager dans ses pénibles fonctions, ou pour imprimer au peuple le respect de celui qui est né pour soutenir les lois. Il doit être au-dehors le défenseur de la patrie ; & au-dedans le juge des peuples, pour les rendre bons, sages & heureux.

Il doit les gouverner selon les lois de l’état, comme Dieu gouverne le monde selon les lois de la nature. Rarement employe-t-il sa toute-puissance

pour en interrompre & en changer le cours, c’est-à-dire, que les dérogations & les nouveautés seront comme des miracles dans l’ordre de la bonne politique.

Quelques lauriers que la guerre lui promette, ils sont tôt ou tard funestes à la main qui les cueille :

En vain aux conquérans
L’erreur parmi les rois donne les premiers rangs.
Entre tous les héros ce sont les plus vulgaires ;
Chaque siecle est fecond en heureux téméraires......
Mais un roi vraiment roi, qui, sage en ses projets,
Sache en un calme heureux maintenir ses sujets,
Qui du bonheur public ait cimenté sa gloire ;
Il faut, pour le trouver, courir toute l’histoire.
La terre compte peu de ces rois bienfaisans ;
Le ciel à les former se prépare long-tems !
Tel fut cet empereur, sous qui Rome adorée,
Vit renaître les jours de Saturne & de Rhée ;
Qui rendit de son joug l’univers amoureux,
Qu’on n’alla jamais voir sans revenir heureux,
Qui soupiroit le soir, si sa main fortunée
N’avoit par ses bienfaits signalé la journée :
Le cours ne fut pas long d’un empire si doux.

Seneque (vers 463.) peint encore plus simplement, plus laconiquement & plus énergiquement, mais non pas avec ce brillant coloris, la gloire & les devoirs des rois. Je finis toutefois par ces maximes :

Pulchrum eminere est inter illustres viros ;
Consulere patriæ ; parcere afflictis ; ferâ
Cæde abstinere, tempus atque iræ dare ;
Orbi quietem ; sæculo pacem suo.
Hæc summa virtus : petitur hâc cælum viâ !

Roi, (Critique sacrée.) rex. Ce titre est donné indifféremment dans l’Ecriture aux souverains, soit que leurs états aient le titre de royaume ou d’empire. Les pontifes répondirent : nous n’avons d’autre roi que Céfar. Jean. 19. 15. Ce mot désigne aussi les chefs, les magistrats qui gouvernent un état ; non erat rex in Israël, Juges, j. 31. c’est-à-dire, il n’y avoit point de chefs en Israël, aux ordres duquel le peuple obéît. 3°. Il se prend pour guide, conducteur, soit parmi les hommes, soit parmi les bêtes. La sauterelle n’a point de roi (regem), Prov. xxx. 27. Il se prend, 4°. pour les grands, pour toutes les personnes puissantes en crédit ou en autorité : Je parlois de tes témoignages en présence des grands de ce monde, in conspectu regum. Ps. cxviij. 16. 5°. Pour les fideles ; tu nous as faits rois à notre Dieu, fecisti nos Deo nostro reges. 6°. Enfin, pour ceux qui par leur prééminence l’emportent au-dessus des autres. Il est roi sur tous les fils de l’orgueil, ipse est rex super universos filios superbiæ. Job. xlj. 25. Le roi des rois, & le seigneur des dominations est le titre que Saint Paul donne à l’Etre suprème. I. Tim. vj. 15. (D. J.)

Roi, nom que les anciens donnerent ou à Jupiter ou au principal ministre de la religion dans les républiques.

Après que les Athéniens eurent secoué le joug de leurs rois, ils éleverent une statue à Jupiter sous le nom de Jupiter-roi, pour faire connoître qu’à l’avenir ils ne vouloient point d’autre maître. A Lébadie on offroit de même des sacrifices à Jupiter roi, & on trouve que ce titre lui est souvent donné chez les anciens.

Mais ils ne le croyoient pas tellement attaché à la suprème puissance de ce dieu, qu’ils ne l’attribuassent quelquefois à certains hommes distingués par leur dignité. Ainsi le second magistrat d’Athènes ou le second archonte s’appelloit roi, βασιλεύς ; mais il n’avoit d’autres fonctions que celles de présider aux mysteres & aux sacrifices : hors de là nulle