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tout avoir égard à la qualité & à la température de l’air où elles se trouvent. Dans les pays froids ou tempérés, on doit les tenir plus larges & plus spacieuses, afin que la ville en soit plus commode, plus saine & plus belle ; car l’air étant plus découvert, il est plus sain : de sorte que si une ville est située dans un air froid, & que les maisons y soient beaucoup exhaussées, il faudra donner beaucoup de largeur aux rues, afin que par ce moyen le soleil entre partout librement.

Mais si cette ville est située dans un climat fort chaud, il est nécessaire d’en faire les rues étroites, & les bâtimens plus exhaussés, afin que par le moyen de l’ombre qui se rencontre toujours dans les rues étroites, la chaleur se trouve plus modérée : ce qui contribue beaucoup à conserver la santé : c’est ce qu’on remarqua à Rome, depuis que Néron l’eut rebâtie, & qu’il eut tenu les rues plus larges qu’auparavant ; la ville en fut plus belle, mais elle se trouva plus exposée aux chaleurs & aux maladies.

Les rues principales doivent être disposées ensorte que des portes de la ville elles se rendent en droite ligne sur la grande place ; & quelquefois même, si la situation le permet, il est bon qu’elles passent jusqu’à l’autre porte ; & selon la forme ou l’étendue de la ville, on pourroit faire sur le même alignement, entre quelques-unes des portes & la principale place, plusieurs places moindres. Les autres rues doivent aussi aboutir non-seulement à la grande place, mais encore aux principales églises, aux grands palais, & à tous les lieux publics.

Mais dans ce compartiment des rues, il faut soigneusement prendre garde, selon l’avertissement que Vitruve nous donne, qu’elles ne soient point directement opposées à aucun vent violent, ni par conséquent sujettes à leurs tourbillons, & à l’impétuosité de leurs souffles ; d’ailleurs pour la conservation de la santé des habitans, on doit tâcher de détourner & de rompre les vents nuisibles.

Toutes les rues doivent avoir une pente vers le milieu, afin que les eaux qui tombent des toits des maisons, s’y viennent rendre toutes ensemble, se fassent un cours plus libre, & entrainent avec elles les ordures, de peur que, si elles croupissoient trop long-tems dans un même lieu, l’air ne s’infectât de leur corruption. On donne aux rues droites & larges une pente d’environ un pouce par toise pour l’écoulement des eaux. Les moindres ont un ruisseau, & les plus larges, une chaussée entre deux revers.

Les rues chez les Romains, étoient grandes ou publiques, & petites ou particulieres. Ils nommoient les premieres, royales, prétoriennes, consulaires ou militaires ; & les autres, vicinales, c’est-à-dire, rues de traverse, par lesquelles les grandes se communiquoient les unes aux autres.

Chacun dérive le mot de rue à sa fantaisie. Suivant Daviler, ce mot vient de rudus, aire pavée de mortier, de chaux & de ciment ; selon MM. de Port-Royal, le mot rue vient de ῥύμη, vicus, dont la racine est ῥύω, je coule. Ducange prétend qu’on a dit ruta, ruda dans la basse latinité, pour signifier une rue & place marchande. (D. J.)

Rue d’une ville de guerre, (Archit. milit.) dans les villes de guerre les principales rues prennent leur origine à la place d’armes, qui est au milieu de la ville, & se conduisent sur un même alignement aux portes de la ville, aux remparts, & principalement à la citadelle ou au réduit, s’il y en a, afin qu’elles puissent être enfilées. On les fait aussi perpendiculaires les unes aux autres, le plus qu’il est possible, afin que les encoignures des maisons soient à angles droits. On donne ordinairement six toises aux grandes rues, & trois ou quatre aux petites. A l’égard de leur distance, la rue qui est parallele à une autre, doit en

être tellement éloignée, qu’il y reste un espace pour deux maisons de bourgeois dont l’une regarde une rue, & l’autre a la vue dans celle qui lui est opposée. On suppose ici que chaque maison à cinq ou six toises de large sur sept à huit d’enfoncement, avec une cour de pareille grandeur, afin que l’intervalle d’une rue à l’autre soit d’environ trente-deux à trente-trois toises. Voyez la science des Ingénieurs de M. Belidor. (D. J.)

Rue, s. f. (terme de Carrier.) ils appellent les rues d’une carriere, les espaces qui restent vuides, après qu’on en a tiré les différens bancs de pierre dont elle est composée. C’est par ces rues qu’on nomme aussi chemins, que l’on pousse les pierres au trou, après qu’on les a mises sur les boules. Savary. (D. J.)

Rue, clou de rue, (Maréchal.) on dit qu’un cheval a pris un clou de rue, pour dire qu’en marchant il a rencontré un clou qui lui est entré dans le pié, & l’a rendu boiteux.

Rue, (Géog. mod.) il y a deux petites villes de ce nom, l’une en France, l’autre en Suisse.

La premiere est en Picardie, dans le Ponthieu, à une lieue de Crotoy, sur la riviere de Mage. Quoique ses fortifications aient été rasées, c’est cependant encore un gouvernement de place. Elle a deux paroisses, & un petit commerce en bestiaux & en chevaux. Long. 19. 15. latit. 50. 17.

La seconde petite ville nommée Rue est au canton de Fribourg dans le bailliage de Corbiere. Long. 24. 37. latit. 46. 57. (D. J.)

RUÉE, s. f. (Jardin.) amas de litieres seches, chaumes, bruyeres, &c. que l’on fait dans les basses-cours, pour les froisser sous les piés, & les faire pourrir, afin de les mêler ensuite avec du fumier, & en engraisser les terres. (D. J.)

RUGIEWITH, (Mythologie.) nom d’une divinité adorée par les anciens Vandales.

RUELLE, s. f. (Gram.) petite rue ; c’est aussi l’espace entre un lit & la muraille, un poste de ruelle, de petits vers de ruelle. On le prend encore pour un alcove, ou un lieu paré où les femmes reçoivent des visites familieres, soit au lit, soit debout.

Ruelle, s. f. (Hist. nat. Bot.) ruellia, genre de plante à fleur monopétale en forme d’entonnoir, & profondément découpée. Le pistil sort du calice ; il est attaché comme un clou, à la partie inférieure de la fleur, & devient dans la suite un fruit conique & membraneux qui s’ouvre en plusieurs parties par le sommet ; il renferme des semences qui sont pour l’ordinaire petites & arrondies. Plumier, nova plant. amer. genera. Voyez Plante.

RUELLER la vigne, (Agricult.) rueller la vigne, c’est avec la paume de la pioche, enlever la terre du milieu d’une perchée de vigne, & la relever de côté & d’autres contre les seps. On commence ordinairement ce travail par le haut bout de la perchée, en continuant jusqu’en-bas, de telle maniere que le milieu de cette perchée devient une rigole, & la terre forme un dos-d’âne le long de chaque perchée ; mais cette façon qu’on donne aux vignes, ne se pratique que dans celles qui sont plantées au cordeau. (D. J.)

RUER, v. n. (Maréchalerie.) se dit du cheval qui détache une ruade. Voyez Ruade. Il faut couper un cheval sujet à ruer : c’est un excellent remede contre ce vice. Voyez Chatrer.

RUESSIUM, (Géog. anc.) ville de la Gaule aquitanique, selon Ptolomée, l. II. c. vij. qui la donne aux peuples Velanni. C’est aujourd’hui Rieux, suivant Mercator, & Saint-Flour, suivant Villeneuve. (D. J.)

RUFÆ, (Géog. anc.) château d’Italie, dans la Campanie, selon la remarque de Servius sur ce vers de Virgile, Æneid. l. VII. v. 739.

Quique Rufas, batulamque tenent, atque arvacelennæ,