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est quand il survient quelqu’accident à la machine, & qu’il faut approvisionner les baissoirs.

Les bouteilles dont on se sert, sont composées de quatre morceaux de cuir, entre lesquels il y a trois bouts de chapeaux, le tout forme une épaisseur de 8 lignes.

Pour fixer ces morceaux de cuir aux chaînons, il y a quatre chevilles de bois qui les traversent ; mais quelque soin que l’on prenne pour les bien ajuster, le mouvement est si rapide, les chocs & les frottemens sont si violens, que ces morceaux de feutre & de cuir n’étant maintenus par aucun corps solide, & d’ailleurs humectés par l’eau, cedent au poids de la colonne.

Pour remédier à cet inconvénient, on propose des patenotres de cuivre garnies de cuir. Ces patenotres seront composées de deux platines d’environ 2 lignes d’épaisseur aux extrémités, revenant à un pouce dans le milieu, non compris une espece de bouton d’environ deux pouces de hauteur, dans lequel sera un œillet pour recevoir le chaînon, tant à la platine de dessus qu’à celle de dessous. On laissera entre ces deux platines environ quatre lignes de vuide, pour recevoir deux morceaux de cuir fort. Ces cuirs excéderont les platines de la patenotre d’environ 3 lignes seulement, pour empêcher le corps de la buse d’être endommagé par le frottement du cuir des platines qui n’auront que 4 pouc. 81. de diametre. Ces cuirs seront percés quarrément, afin que les deux platines puissent s’emboîter aisément au moyen d’un fer qui les traversera, & des deux ne fera qu’un corps. Le pié cube d’eau salée pese environ 75 liv. .

Les baissoires choment quand la machine ne peut travailler.

Pour prévenir les chomages, il faudroit construire une seconde buse en disposant la roue horisontale, de façon qu’elle fît mouvoir les chaînes des deux buses à-la-fois : ce qu’on voit exécuté, fig. 2. Pl. a.

Le pivot de la roue horisontale est placé vis-à-vis le milieu des deux buses ; & on a joint au treuil de la lanterne, dans les fuseaux de laquelle les dents de la roue horisontale s’engrenent, un rouet qui au moyen des deux autres lanternes fait mouvoir les boucs.

En 1723 on rechercha les sources d’eaux salées, qui pouvoient se trouver dans l’intérieur de la saline. Dans la fouille, on en découvrit une, dont l’épreuve réiterée indiqua que la salure étoit de 22 degrés. Le conseil ordonna en 1724 la construction d’un puits pour ses eaux.

Ici l’élévation des eaux se fait par un équipage de pompes composé de deux corps, l’une foulante, & l’autre aspirante. C’est un homme qui fait mouvoir la roue en marchant dedans : cet homme s’appelle le tireur. Les eaux de ce puits se rendent dans les baissoirs, & fortifient celles du grand puits ; de maniere que leur mélange est de 15 degrés de salure.

On entend par baissoirs, des réservoirs ou des magasins d’eau ; le bâtis en est de bois de chêne, & de madriers fort épais contenus par des pieces de chêne d’environ un pié d’équarrissage, soutenus par de pareilles pieces de bois qui leur sont adossées par le milieu. La superficie de ces magasins est garnie & liée de poutres aussi de chêne, d’un pié d’épaisseur, & placées à un pié de distance les unes des autres. Les planches & madriers qui les composent sont garnis dans leurs joints de chantouilles de fer, de mousse & d’étoupe poussées à force & avec le ciseau, & gaudronnées.

Le bâtis est élevé au-dessus du niveau des poëles. Ce magasin d’eau est divisé en deux baissoirs on parties inégales ; la plus grande a 82 piés 4 pouces 8 lignes de longueur, sur 21 piés 6 pouces de largeur ; la petite,

48 piés 8 pouces de longeur, sur 21 piés 6 pouces de largeur : & l’une & l’autre 4 piés 11 pouces de haut, qui ne peuvent donner que 4 piés 6 pouces d’eau dans les poëles, parce qu’ils sont percés à 5 pouc. du fond. Le toisé de ces baissoirs donne 13645 piés cubes 6 pouces d’eau ; comme ils communiquent par le moyen d’un échenal, l’eau y est toujours de niveau ; ils abreuvent 5 poëles par dix conduits. Voyez les fig. de.

Ces poëles sont séparées par des murs mitoyens, de maniere toutefois que la communication est facile d’une poële à une autre par le dedans du bâtiment. Il y en a quatre de 28 piés de longueur, sur 32, mesure de Lorraine, où le pié est de 10 pouces 5 lignes de roi.

Chaque poële est composée depuis 260 jusqu’à 290 platines de fer battu, chacune de 2 à 2 piés & de longueur, sur 1 pié & de largeur, & de 4 lignes d’épaisseur au milieu, & 2 lignes sur les bords : ces platines sont cousues ensemble par de gros clous rivés par les deux bouts.

Chaque poële est garnie par-dessous de plusieurs anneaux de fer de 4 à 5 pouces de diametre, appellés happes, où passent des crocs de fer de 2 piés & de longueur, ou environ. Le croc est recourbé par l’extrémité de façon à entrer dans la happe qui lui sert d’anneau, ensorte qu’il est semi-circulaire. La pointe du haut, longue de cinq pouces ou environ, en est seulement abattue, & tient à de grosses pieces de sapin qu’on appelle bourbons. Chaque bourbon a 30 piés de longueur, sur 6 pouces en quarré ; il y en a 16 sur la longueur de la poële, espacés de 6 en 6 pouces, & appuyés sur deux autres pieces de bois de chêne beaucoup plus grosses, posées sur les faces de la longueur de la poële. Ces deux dernieres pieces se nomment machines.

Une poële ainsi armée est établie sur quatre murs, à l’angle de chacun desquels il y a un saumon de fonte de fer qui la soutient. Chaque saumon a environ un pié en quarré, & cinq piés de long.

Ces quatre murs ont environ cinq piés de hauteur, sur deux d’épaisseur, & forment le même quarré que la poële ; ils sont séparés en-dedans par un autre mur appellé barange, d’environ trois piés de hauteur, & ouverts sur le devant dans toute leur hauteur de deux entrées d’environ trois piés de largeur, & sur le derriere de deux trouées de même hauteur, mais d’un pié & demi seulement de large. Celles-ci servent de cheminées ; c’est par les autres qu’on jette le bois, les fascines, &c. & qu’on gouverne le feu. Les murs de refend servent à la séparation des bois & des braises ; ils sont faits de cailloutage & des pierres de sel qui se forment par le grand feu, lorsqu’il se fait des gouttieres aux poëles, avec de la glaise mêlée de cendres & de crasse provenant des cuites ; cette composition résiste à la violence du feu pendant plusieurs abattues.

Au derriere de chaque poële, & à l’ouverture des cheminées, il y a deux poëlons de 8 à 10 piés de longueur, sur 6 à 7 de largeur, & 10 à 11 de profondeur. Chacun est composé de 28 platines : c’est dans ces poëlons que les conduits ou échenaux amenent les eaux des baissoirs, d’où elles se rendent dans les poëles après avoir reçu un premier degré de chaleur.

Chaque poële est servie par une brigade de 14 ouvriers ; savoir deux maîtres, deux socqueurs, deux salineurs, quatre sujets, & quatre brouetteurs.

On compte le travail des poëles par abattues, composées chacunes de 18 tours, le tour est de 24 heures. Voilà le tems nécessaire à la formation des sels. Lorsqu’une abattue est finie, on laisse reposer la poële pendant six jours, qu’on emploie à la raccommoder. Une poële fournit ordinairement depuis 27, 28, jusqu’à 30 ou 31 abattues.