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valeur future, & de son bonheur à la guerre. Olearius, tome II.

SAMARCANDE, (Géog. mod.) grande ville d’Asie, au pays des Usbecks, dans la province de Maweralnahr, sur la riviere de Sogde, à sept journées au nord de la ville de Bockhara. Long. suivant Ptolomée 89. 30. lat. 47. 30. Long. selon Nassir-Eddein, 98. 20. latit. 40. Cette prodigieuse différence entre ces deux géographes, doit provenir de quelque erreur de chifre. Gréaves établit la latit. de Samarcande, 39. 37. 22.

L’auteur de l’histoire des Tartares, met la longitude à 95. & la latit. à 41. 20. M. de Liste ne met la latitude qu’à 39. 30. Ulug-Beg, qui est exact, à 39. 37.

Samarcande est la Maraganda de Pline, de Strabon, & des autres anciens. Elle avoit du tems d’Alexandre 70 stades de circuit, c’est-à-dire, environ 3 lieues de France ; mais elle avoit trois fois cette étendue, lorsque les Mogols l’assiégerent. Il ne faut pas s’en étonner, parce que cette ville renfermoit dans son enceinte, non-seulement des champs labourables, des prés, & une infinité de jardins, mais encore des montagnes & des vallées. Elle avoit douze portes éloignées d’un mille l’une de l’autre. Ses murailles étoient revêtues de tourelles, & entourées d’un fossé profond, sur lequel passoit un aqueduc qui conduisoit les eaux de la riviere en divers quartiers de la ville.

Ginzis-Kan, premier empereur des anciens Mogols & Tartares, forma le siege de cette ville, en 1220, & la prit par la mésintelligence qui regnoit entre tant de différens peuples qui l’habitoient. Le sultan Mehemet ne put la défendre avec une armée de cent dix mille hommes.

« Tamerlan descendant de Ginzis-Kan par les femmes, & qui subjuga autant de pays que ce prince, établit Samarcande pour la capitale de ses vastes états. Ce fut-là qu’il reçut à l’exemple de Ginzis, l’hommage de plusieurs princes de l’Asie, & la députation de plusieurs souverains. Non-seulement l’empereur grec Manuel y envoya des ambassadeurs, mais il en vint de la part de Henri III. roi de Castille. Il y donna une de ces fêtes qui ressemblent à celles des premiers rois de Perses. Tous les ordres de l’état, tous les artisans passerent en revue, chacun avec les marques de sa profession. Il maria tous ses petits-fils, & toutes ses petites-filles le même jour. Enfin il mourut en 1406, dans une extrème vieillesse, après avoir regné 36 ans, plus heureux par sa longue vie, & par le bonheur de ses petits-fils, qu’Alexandre le Grand, auquel les orientaux le comparent.

Il n’étoit pas savant comme Alexandre, mais il fit élever ses petits-fils dans les sciences. Le fameux Oulougbeg, qui lui succéda dans les états de la Transoxane, fonda dans Samarcande la premiere académie des sciences, fit mesurer la terre, & eut part à la composition des tables astronomiques qui portent son nom ; semblable en cela au roi Alphonse de Castille, qui l’avoit précédé de plus de cent années. Aujourd’hui la grandeur de Samarcande est tombée avec les sciences ; & ce pays occupé par les tartares Usbecks, est redevenu barbare, pour refleurir peut-être un jour. »

Tout même nous porte à l’imaginer. Samarcande est encore une ville considérable, dont la position est des plus heureuses, pour faire le commerce de la grande Tartarie, des Indes, & de la Perse. Elle ne manque de rien pour sa subsistance ; enfin, elle a autour d’elle à dix lieues à la ronde, un grand nombre de bourgades, dont les jardins délicieux font passer la fameuse vallée dans laquelle elle est située, pour

un des quatre paradis terrestres que les Orientaux mettent en Asie. (D. J.)

SAMARIE, (Géog. anc.) ville de la Palestine, capitale d’un petit royaume de même nom, qui comprenoit les dix tribus. Elle fut bâtie par Amri, qui acheta deux talens d’argent d’un nommé Somer, la montagne de Someron. Amri éleva sa ville sur cette montagne, qui étoit agréable, fertile, ayant des eaux en abondance, & située à une journée de Jérusalem. Achab bâtit dans cette ville un palais d’ivoire, c’est-à-dire, où il y avoit beaucoup d’ornemens d’ivoire, III. Reg. ch. xiij. Salmanazar, roi d’Assyrie, prit cette ville l’an 720 avant J. C. & la détruisit.

Il paroît qu’elle se rétablit dans la suite, puisque Esdras, l. I. c. iv. & l. II. c. iv. parle déja des habitans de Samarie, & que les Samaritains jaloux des faveurs qu’Alexandre le Grand avoit accordées aux Juifs, se révolterent ; ce prince, dit Quinte-Curce, l. IV. c. xxj. marcha contre eux, prit Samarie, & y mit des Macédoniens ; il donna le pays des environs aux Juifs pour le cultiver, & leur accorda l’exemption du tribut.

Jean Hircan prit dans la suite Samarie, & la ruina de nouveau ; mais quand Gabinius fut fait président de Syrie, il entreprit de rebâtir Samarie. De-là vient, dit Syncelle, qu’on l’appelle quelquefois la ville des Gabiniens, c’est-à-dire, la colonie de Gabinius ; cependant Samarie n’étoit encore qu’un village. Hérode fut le premier qui en refit une ville dans les formes, & qui la remit en honneur.

Comme Auguste lui avoit accordé cette place en propriété, il lui donna le nom grec de Sébaste, qui revient au nom latin Augusta, la ville d’Auguste. Il y attira six mille nouveaux habitans, & leur distribua les terres des environs, qui étant extrémement fertiles, produisirent en si grande abondance, que la ville se trouva bien-tôt riche & peuplée. Il mit une bonne garnison dans la tour de Straton, qui dans la suite, par compliment pour le même Auguste, porta le nom de Césarée.

Le nom de Samarie étoit commun à la ville, & au pays des environs : de sorte qu’il y avoit Samarie ville, & Samarie qui étoit le pays de Samarie. Les auteurs sacrés du nouveau Testament, parlent assez peu de Samarie ville, & lorsqu’ils emploient ce mot, ils expriment sous ce nom plutôt le pays que la ville dont nous parlons. Par exemple, quand on lit, Luc, c. xvij. que Jésus passoit par le milieu de la Samarie, cela veut dire par le pays de Samarie. Et dans S. Jean, c. iv. Jésus étant venu dans une ville de la Samarie nommée Sichar : c’est-là qu’il eut un entretien avec une femme de Samarie, c’est-à-dire, une samaritaine de la ville de Sichar.

Après la mort de S. Etienne, les disciples s’étant dispersés dans les villes de la Judée & de la Samarie, act. c. viij. le diacre S. Philippe vint dans la ville de Samarie, où il fit plusieurs conversions. Les apôtres ayant appris que cette ville avoit reçu la parole de Dieu, y envoyerent Pierre & Jean, pour donner le S. Esprit à ceux qui avoient été baptisés. C’est-là qu’étoit Simon le magicien, qui offrit de l’argent aux apôtres, afin qu’ils lui communiquassent le pouvoir de donner le S. Esprit. Samarie n’est jamais nommée Sébaste dans les livres du nouveau Testament, quoique les étrangers ne la connussent guere que sous ce nom-là. (D. J.)

SAMARITAINS, (Hist. Critiq. sacrée.) les Samaritains étoient des colonies de Babyloniens, des Cuthéens, & d’autres peuples, qu’Assaradon envoya pour repeupler la province de Samarie, dont Salmanasar avoit transporté le plus grand nombre des habitans au-delà de l’Euphrate du tems de la captivité des dix tribus.